2000-2020 : La longue agonie de la droite toulousaine

David Gerson • 26 mai 2020

2000-2020 : LA LONGUE AGONIE DE LA DROITE TOULOUSAINE

En l’an 2000, le RPR31 et l’ UDF31 font partie des fédérations de la droite et du centre-droit les plus puissantes de France. Depuis 1983 la ville est dirigée par Dominique Baudis, qui est également député de la Haute-Garonne. Sa réélection comme premier magistrat de la ville a toujours été acquise, que ce soit en 1989 ou en 1995, où il fut élu haut la main dès le 1er tour. Sa majorité municipale est composée alors, à part à peu près égale, entre membres du RPR31 et de l’UDF31. Pendant douze années la droite obtiendra même plusieurs sièges de députés dans une région traditionnellement acquise aux socialistes et aux MRG, et dirigera le Conseil Régional. Seul manque à l’appel le Conseil départemental resté à gauche (sans discontinuer depuis 1945), malgré de belles victoires dans quelques cantons comme celui en 1994 d’un certain Jean-Luc Moudenc.

Pendant la période 1983-2000, Toulouse et les partis de droite ont profité des ambitions que Dominique Baudis avait pour la ville dont il avait la charge et à qui il voulait donner un rôle national d’importance : Toulouse est devenue l’une des plus belles villes de France, et le RPR31, au fil des années, une fédération puissante. Nous avions un Maire centriste certes mais sans ambiguïté de centre-droit.

C’est également au cours de cette période que la droite a conquis de grandes villes du département, comme Balma, L’Union, Castelginest, Luchon, Muret ou Cugnaux dont le Maire Michel Aujoulat a dirigé pendant la dernière décennie le RPR31.

En ce qui concerne les élections nationales, notre terre traditionnellement de gauche, votait en majorité pour les candidats PS, mais le score de Jacques Chirac en 1995 frôla quand même les 50%.

C’est ainsi qu’à l’entrée du 21ème siècle, la situation est au beau fixe pour la Droite à Toulouse et en Haute-Garonne, avec un positionnement clair du RPR local. Fin du 1er acte, début du 2ème.



La première ombre au tableau arrive au premier trimestre 2000 : la décision de Dominique Baudis de ne pas se représenter à l’élection municipale de 2001, alors qu’il était initialement prévu qu’il se retire pour celle de 2007. Il demande à Philippe Douste-Blazy, ancien ministre de la culture de Jacques Chirac et actuel Maire de Lourdes, de mener la liste. Ce dernier est Secrétaire Général du CDS (composante la plus centriste de l’UDF), et va composer une liste qui va, à ce moment-là, pencher un peu plus vers le centre et commencer à intégrer de plus en plus de personnes issues de la société civile n’appartenant à aucune formation politique. Douste-Blazy remporte l’élection, mais est mis en ballotage au 1er tour. Au cours de cette élection, les villes de Balma et Cugnaux basculent à gauche. Va commencer aussi, dès le début de la mandature, au sein de la majorité, une guerre d’influence entre les proches du clan Baudis et ceux du clan Douste-Blazy.

La deuxième ombre au tableau arrive en 2002, avec la présence de Jean-Marie Le Pen au 2nd tour de l’élection présidentielle, le fameux front républicain inventé par la gauche qui se met en place, et la création rapide de l’UMP à la fin de l’année, qui va avoir des conséquences néfastes pour la droite républicaine ( https://www.lignes-droites.fr/2002-2019-la-longue-chute-de-la-droite-francaise ). Comme je l’écrivais précédemment dans cet article, cohabiter le temps d’une élection ou gouverner ensemble au sein d’un groupe majoritaire dans une assemblée n’a rien à voir avec vivre ensemble de façon permanente. Pour le RPR31, qui doit se fondre dans l’UMP31, le problème est double car au moment de sa création ce sont surtout des personnalités du Centre qui sont les élus principaux (Douste-Blazy, Maire et député, et Christine De Veyrac unique eurodéputée du département). Pendant les deux premières années, avec la Mairie partagée entre d’anciens élus RPR et UDF, les choses se déroulent plutôt dans un bon esprit.

En mars 2004, Philippe Douste-Blazy est appelé par Jacques Chirac au ministère de la Santé et démissionne de son mandat de Maire de Toulouse. Une élection au sein du conseil municipal doit désigner le nouveau magistrat de la ville. En pleine affaire Allègre qui met en cause Dominique Baudis dans des affaires de parties fines et de proxénétismes aggravées (il en sortira complètement blanchi mais y laissera sa santé), les ex-RPR ne sont pas favorables au poulain désigné par Douste-Blazy qui est le centriste Jean Luc Moudenc. Une opposition se met alors en place, prête à faire un groupe dissident, mais ces opposants, soit par manque d’organisation, soit plus probablement, selon moi, par manque de courage politique et par peur de perdre leurs postes et sièges, se couchent, et JLM est élu Maire de Toulouse par le conseil municipal le 31 mars 2004.

Cette guerre fratricide qui s’est installée au sein du conseil municipal entre ex-RPR et ex-UDF est dissimulée par le contexte national, grâce à un homme, Nicolas Sarkozy, qui prend la tête de l’ UMP en décembre 2004 et qui est élu triomphalement en 2007 Président de la République. Les élections municipales décalées d’un an en 2008 pour cause de surcharge du calendrier électoral devaient alors bien s’annoncer… Mais aux élections législatives suivant les présidentielles, JLM est battu dans la 1ère circonscription qui appartenait à la droite depuis 1986 ! Un maire faisant partie de la majorité présidentielle qui perd aussi nettement devrait peut-être s’interroger sur l’image ou la politique qu’il défend… Au regard des résultats et du score plus élevé qu’avait obtenus Nicolas Sarkozy dans cette circonscription six semaines avant, on s’aperçoit que l’électorat de droite est resté à la maison. De plus, toutes les autres circonscriptions reviennent à la gauche et la fédération UMP31 n’a plus qu’une seule élue eurodéputée !

Pour garder Toulouse et d'autres villes du département à droite, on comprend qu'aucune voix de droite ne doit manquer, d'autant que la gauche s'est remobilisée depuis le début du quinquennat de Sarkozy. Mais au lieu de reconquérir les électeurs de droite, Jean-Luc Moudenc, dans sa campagne, va au contraire essayer de conquérir les électeurs du centre gauche en ouvrant sa liste à des personnalités toulousaines issues de la gauche, beaucoup de membres de la société civile, avec un programme insuffisamment porté sur les thèmes privilégiés de la droite…. La fédération UMP31, principalement dévouée à l’élection municipale de Toulouse, ne peut aller que dans le sens du Maire candidat. De plus sa campagne sur le terrain démarre assez tardivement … Le résultat du 1er tour laisse à penser que c’est jouable mais, la gauche unifiée qui n’avait jamais réalisé un aussi bon score, se mobilise encore plus pour le 2nd tour, et Pierre Cohen l’emporte de 1200 voix. Dans le reste du département c’est aussi la Bérézina, de nombreuses villes sont remportées par la gauche dès le 1er tour et cette dernière obtient une majorité plus qu’absolue à la Métropole.

C’est dans un contexte assez houleux que se déroulent donc les élections internes à l’UMP31 en décembre 2008. Bien sûr, on reproche la perte de Toulouse à JLM qui s’est porté candidat à la présidence de la fédération, et c’est Christine De Veyrac qui l’emporte. Fin 2008 la droite toulousaine, moribonde, se retrouve donc avec … une centriste à la tête de la fédération. Fin du 2ème acte, début du 3ème.



A la sortie de l’élection interne, JLM est considéré comme un looser, voire un pestiféré, sans aucun avenir politique. Mais c’est mal connaître le personnage : besogneux, travailleur infatigable, pouvant aussi gagner l’ingagnable (souvenez-vous du canton cité plus haut gagné en 1994), il décide de faire de son groupe d’opposition au conseil municipal, son fer de lance pour reconquérir le Capitole en 2014.

Analysant son échec, il comprend que la reconquête de l’électorat de droite est la première des conditions et, pour rendre légitime sa candidature future, il doit reprendre la main sur la fédération dont les élections internes se tiennent en 2010 : recrutement dans son équipe de jeunes adhérents UMP, composition dans toutes les circonscriptions d’une liste pour avoir la majorité au conseil départemental UMP31, et surtout, se retrouvant face à de Veyrac, un programme de droite et vraiment de droite. Les élections se déroulent dans une atmosphère plus que tendue et, au final, se traduisent par une victoire nette de la ligne JLM. Le voilà élu président ! Laurence Arribagé qui a soutenu sa candidature, est nommée Secrétaire départementale. La première des missions est remplie. La fédération UMP31 se retrouve pour la première fois avec une majorité d’anciens RPR à la tête des circonscriptions.

La deuxième mission est de remettre un premier pied au Capitole (malgré un groupe d’opposition dissident qui s’est constitué au CM, mais qui n’ira pas bien loin et se ralliera par la suite de nouveau à JLM) et rien de mieux que les élections législatives de 2012 et la 3ème circonscription retaillée en 2008 par Sarkozy et qui serait favorable à la droite. Soutenant activement la campagne de Nicolas Sarkozy et malgré la défaite de ce dernier, JLM remporte l’élection législative, preuve que, quand on sait parler à l’électorat de droite, celui-ci se déplace en masse dans les urnes. Sa victoire est courte mais dans une France qui a basculé majoritairement à gauche, elle prend encore plus de sens et le lance véritablement dans la course au Capitole pour 2014 , même si les sondages sont favorables à Cohen… Mais bon, on sait ce que sont les sondages….

Du côté de la fédération, on prépare les élections de la Présidence de l’UMP (on ne reviendra pas sur cette malheureuse page de l’histoire de la droite française). On y retrouve les deux camps de l’élection interne : ceux qui étaient majoritairement favorables à JLM soutiennent Copé et les autres Fillon. Le score à l’UMP31 est sans appel en faveur de Copé et de sa ligne de droite décomplexée qui réalise un score de près 70%.

En 2013, comprenant que seul JLM est en capacité de remporter la Mairie en 2014, tout le monde se rallie derrière lui. JLM réussit le tour de force de réunir tous les partis du centre et de droite derrière sa candidature. Dans toutes les villes du département nous réussissons à avoir un candidat affiché UMP et non dissimulé (dont je fais partie à Blagnac) et, là aussi, dans la plupart tous les partis partent ensemble dès le 1er tour. Dans une France qui, en fin 2013, bascule dans une réaction anti-Hollande, le programme porté par les candidats insiste sur les thèmes, tels que la sécurité, la fiscalité, l’urbanisme, qui sont chers à l’électorat de droite. Alors qu’on le donnait perdant encore une semaine avant l’élection, JLM remporte Toulouse, et nous réussissons à conquérir des villes (Cugnaux, Balma, Fenouillet, Pibrac, Saint-Orens, Rieumes), tout en manquant de peu d’autres villes comme Blagnac, qui se joue à moins de 300 voix. Plusieurs jeunes de moins de 35 ans intègrent les conseils municipaux dans plusieurs villes de la Haute-Garonne, grâce notamment à l’excellent travail réalisé par Xavier Spanghéro à la tête des jeunes actifs ces cinq dernières années. Nous avons la majorité à la Métropole, Laurence Arribagé remporte l’élection législative partielle en mai pour remplacer JLM, et aux élections sénatoriales 2 sénateurs de droite sont élus.

C’est ainsi qu’à l’été 2014, au moment je suis nommé délégué de la 1ère circonscription, la situation de la droite toulousaine et haute garonnaise n’a jamais été aussi bonne. La fédération compte plus de 5500 adhérents à jour de cotisation. Les élections départementales, qui ont lieu en mars 2015 (pour lesquelles j’ai été investi sur le canton de Blagnac), nous sont promises. Fin du 3ème acte, début du 4ème .



Mais voilà, alors que nous avions gagné en défendant nos valeurs, en parlant à notre électorat, pour une raison que je ne sais pas encore expliquer aujourd’hui, JLM mais aussi Laurence Arribagé ont amorcé un virage à 180 degrés.

Cela commence avec la mise en place des accords politiques pour les élections départementales, qui n’est pas un scrutin de liste mais un scrutin uninominal avec un homme et une femme. En 2012, je rappelle que François Bayrou, président du MoDem appelle à voter Hollande, ce qui restera une trahison pour le peuple de droite. Eh bien, pour ces élections, on devra faire candidature commune dans certains cantons avec des candidats MoDem. Ca sera le cas pour moi à Blagnac, alors que le MoDem soutenait la candidature de mon adversaire aux municipales six mois auparavant ! La raison invoquée pour ce choix est que nous gagnerons des voix à gauche ! Moi, à ce moment-là, je me posais plutôt la question de savoir combien de voix à droite nous allions perdre ! JLM pensait que ce qu’il avait réussi à Toulouse aux municipales se reproduirait dans tout le département. Mais ce n’est pas la même chose d’avoir deux ou trois MoDem sur une liste de soixante-neuf candidats, noyés dans la masse, que d’appeler des électeurs de droite à voter directement pour un candidat MoDem ! On peut ajouter à cela que le programme imposé à la plupart des cantons était tout, sauf de droite ! Alors qu’on nous promettait le basculement, pour la première fois à droite depuis 1945, du conseil départemental, l’échec en fut plus cuisant : 3 malheureux cantons remportés sur 27, et une élimination dans la majorité des cantons hors Toulouse dès le 1er tour (Blagnac en fait partie !)

Pensant que cet échec nous servirait de leçon, je me suis rendu compte lors du conseil de notre parti, en interpellant JLM sur cette erreur de stratégie, que rien n’avait été appris car la seule réponse que j’ai obtenue, c’est que si c’était à refaire, on referait pareil. Et, justement, on recommence immédiatement la même chose pour les élections régionales qui ont lieu six mois après, nous imposant un candidat inconnu, à qui on a imposé les mêmes accords, et qui au final n’est même pas soutenu sur le terrain par ceux qui l’ont mis en place. J’ai apprécié l’homme, qui est d’une grande intelligence, mais je me demande encore ce qu’il est venu faire dans cette galère !

Mais bon, fin 2015, l’unité du parti et de la fédération sont de mise : pour les élections internes en janvier 2016, seule Laurence Arribagé est candidate et adoubée par JLM. Nous décidons avec d’autres de lui faire confiance sur la stratégie et sur la ligne. La voilà élue et quelques amis et moi sommes réélus dans nos fonctions.

Pour préparer l’alternance promise en 2017 à la droite, nous devons préparer la campagne présidentielle suivie de celle des législatives, avec les candidats proposés par notre fédération à la commission nationale d’investiture LR de Paris. Commence ici le début de la disparition de la droite toulousaine : les candidats ne sont pas choisis pour leurs compétences et le travail accompli depuis plusieurs années sur le terrain. Mais sont désignées des personnes qui ne représentent aucun danger pour les membres de la direction départementale, soucieux avant tout de sauvegarder leur poste, ou d'autres à qui on n'a pas pu donner une place éligible aux élections régionales en 2015, qui s’empresseront une fois battues de quitter le parti vers LREM ou AGIR.

C’est ainsi qu’un tiers des circonscriptions sont données à d’autres partis qui ne représentent pas grand-chose ! On évince Nicolas Bonleux sur la 2, Xavier Spanghero sur la 5, Anne Borriello sur la 6 parce qu’ils ont simplement osé, en interne, porter une autre voix. Viennent par la suite les démissions de notre parti, ou les non renouvellements d’adhésion de nos élus tel que Serban Iclanzan, un des seuls conseillers départementaux, ou Elizabeth Pouchelon figure historique de notre fédération dénonçant la perte des idées de droite , le manque de positionnement, le manque de rassemblement. Car au lieu de chercher à les écouter, à les mettre autour de la table, la présidente et la secrétaire départementale se sont au contraire repliées sur elles-mêmes et ont mis en avant des gens qui n’avaient aucune conviction, aucune idée, à l’image de toutes les nominations qui n’étaient dues qu’à des liens d’amitié !

On ne revient pas sur les primaires de la droite et les élections présidentielles perdues mais il fallait tout faire pour que les candidats LR puissent gagner des circonscriptions. Mais c’est à ce moment-là que JLM signe l’appel à aider Emmanuel Macron dans le redressement du pays. Les élections législatives en juin sont une débâcle, 9 candidats sur 10 sont éliminés dès le 1er tour, et Laurence Arribagé perd la 3ème circonscription, celle qu’on considérait à droite comme imperdable !

A la suite de ces élections, vus les résultats obtenus, nous nous attendions à une véritable prise de conscience, à un véritable changement, à des prises de décision … Mais encore une fois, on a fermé les yeux. Nous avons par conséquent décidé avec quelques amis de quitter nos fonctions au sein de la fédération parce que nous ne pouvions plus cautionner cette ligne. Une ligne, qui malgré les échecs répétés depuis les élections victorieuses de 2014 et le changement de stratégie et d’alliances, ne changerait pas, mais qui, pire encore, s'amplifiera malheureusement encore à l’approche des municipales de 2020. Au niveau de LR31, pour la première fois pour des élections municipales aucun comité départemental n’est organisé pour investir des candidats en Haute-Garonne, aucune tête de liste n’affichera nos couleurs, jusqu’à notre secrétaire départementale elle-même à l’Union. Pire encore, une cadre de la fédération désignée à l’origine tête de liste d’une des villes les plus importantes démissionne de sa fonction jusqu’à rendre sa carte pour se rallier au Maire sortant de gauche ! A Toulouse la moitié des candidats LR qui sont dans la liste de JLM n’ont jamais été vus au sein de la fédération. Et le « phénomène de mode » de l’écologie à tout va rattrape notre candidat qui fait l’inverse de ce qu’il avait fait six ans plus tôt, ne parle que des préoccupations de ceux qu’on surnomme les « bobos de gauche », et passe du « bleu de droite » au « vert de l’écolo» !

Même si l’abstention record due à la peur face au Coronavirus a amplifié l’ampleur de nos mauvais résultats, il ne faut pas se cacher derrière cette interprétation très partielle d’un score décevant. Si l’électorat de droite ne s’est pas déplacé dans toutes les villes de la Métropole , c’est aussi lié aux lignes défendues depuis six ans qui fait que nous nous sommes coupés de notre électorat. Ne pas l’admettre, c’est le risque de partir à nouveau à l’échec aux futures élections municipales qui ont de grandes chances d’être finalement rejouées pour tous. Servons-nous de ces résultats comme match d’entraînement sans conséquence et faisons tout pour gagner, rectifier la ligne, le discours et le programme, sinon la désillusion va être énorme car, cette fois, nous n’aurons plus rien.



La morale de cette histoire est simple : quand nous avons affirmé nos valeurs, quand nous n’avons pas eu peur d’afficher nos convictions de droite, c’est alors que nous avons obtenu les meilleurs résultats possibles, que nous avons remporté de nombreuses indiscutables victoires, toutes élections confondues. Certes nous n’avions pas tout gagné mais, quand nous perdions, nous restions proches de la victoire.

Mais dès lors que nous éloignons de ce que nous sommes, nos électeurs sont sans pitié et nous le font comprendre.


La droite républicaine et ses valeurs n’attendent qu’une chose : qu’on les représente !

par Une interview de François Lenglet par Ronan Planchon dans FigaroVox 5 août 2025
https://www.lefigaro.fr/vox/monde/francois-lenglet-la-commission-europeenne-court-comme-un-canard-sans-tete-desorientee-par-la-disparition-du-monde-d-hier-20250803 ENTRETIEN - Après l’accord signé avec les États-Unis de Donald Trump le 27 juillet en Écosse, l’Europe entame son «siècle de l’humiliation», estime le journaliste économique et essayiste. François Lenglet est éditorialiste économique à TF1-LCI et RTL. Son prochain livre : Qui sera le prochain maître du monde ?, Éditions Plon, octobre 2025. LE FIGARO. - Dans le cadre de son accord avec Trump , l’Union européenne accepte de voir la quasi-totalité de ses exportations de biens vers les États-Unis frappées de droits de douane à hauteur de 15 % et n’obtient ni ne sanctionne rien en retour. Une autre issue était-elle possible ? Passer la publicité François LENGLET. - Non, cet accord est tout sauf surprenant. Il matérialise le rapport de force entre l’Amérique de Trump et l’Europe : tout pour moi, le reste pour toi. C’est la conséquence du rôle nouveau qu’occupent les États-Unis dans les affaires du monde, la « superpuissance voyou », pour reprendre les termes de l’universitaire américain Michael Beckley. C’est-à-dire la puissance numéro un sans autre ambition que de se renforcer au détriment des autres, à commencer par les alliés de naguère - ce sont eux qui offrent le meilleur rendement dans le chantage, parce qu’ils sont faibles. Le plus frappant dans cette affaire, c’est que l’Union européenne est contente. Humiliée et satisfaite. Alors même qu’en plus des tarifs, Bruxelles piétine ses propres politiques, pour satisfaire Trump. Elle accepte ainsi d’investir 600 milliards en Amérique, alors que l’exode de l’investissement est justement le principal problème pointé par le rapport Draghi… Elle s’engage à acheter des armes américaines, alors qu’elle exhorte les pays membres à renforcer leur base industrielle de défense… Elle s’engage à acheter des tombereaux de gaz américains alors qu’elle œuvre pour le zéro carbone ! Quant à la prétendue « prévisibilité » offerte par l’accord aux exportateurs, c’est une vaste blague. Un condamné à dix ans de prison peut évidemment se féliciter de la prévisibilité de son cadre de vie pour la prochaine décennie. Londres a obtenu de la Maison-Blanche le taux de tarifs douaniers les plus bas possible à ce jour (10 %). Cette « victoire » participe-t-elle à la décrédibilisation de l’Union européenne ? Le commerce américain avec le Royaume-Uni n’est pas déficitaire, cela peut expliquer le traitement plus favorable qu’a obtenu Londres. Dans la hiérarchie des royaumes tributaires de l’empire américain, nous occupons un rang intermédiaire, entre le Royaume-Uni, qui s’en sort mieux, et le Japon, duquel Trump a obtenu le versement de plusieurs centaines de milliards directement au Trésor américain. Et tous ceux qui sont menacés aujourd’hui de 30 % ou 40 % s’ils ne concluent pas d’accord cette semaine. Si l’Union européenne n’était pas en position de force, est-ce parce qu’elle ne maîtrise aucune de ses positions stratégiques à l’échelle de l’économie globale ? Oui, sans aucun doute. Il faut se souvenir que l’Union européenne n’a pas été conçue pour peser dans le jeu mondial. La raison d’être fondamentale de la Commission de Bruxelles, c’est de surveiller les États membres pour qu’ils se soumettent aux règles du marché unique et de la concurrence. Bruxelles a été dressé pour éradiquer les frontières et le nationalisme économique à l’intérieur de l’Union. L’édification de ce marché unique a d’ailleurs été une propédeutique utile pour apprivoiser la mondialisation, surtout pour la France et sa bureaucratie. Mais les temps sont bouleversés. La mondialisation change de nature et de périmètre, elle se fragmente, à cause du recentrage de la puissance principale sur ses intérêts exclusifs au détriment d’un ordre mondial. Il ne peut y avoir de mondialisation sans maître du monde assumé. La Commission devrait donc s’appuyer sur les frontières et pratiquer une sorte de nationalisme européen, si cette expression n’était pas un oxymore, pour défendre les États membres dans la grande confrontation entre les empires. Elle en est incapable car il faudrait pour cela qu’elle renie les traités. Elle court donc comme un canard sans tête, désorientée par la disparition du monde d’hier. Bruxelles a passé des semaines à élaborer des contre-mesures punitives pour les États-Unis en expliquant que nous n’allions pas les utiliser… Les fonctionnaires ont inventé la version commerciale du pistolet à bouchon. François Lenglet L’Europe-puissance est une chimère, entretenue par les fédéralistes qui voudraient encore sauver leur rêve. C’est le dernier stade du déni, avant l’acceptation de la réalité : l’Europe entame son « siècle de l’humiliation », comme la Chine de 1842, après la guerre de l’opium. Trump, exactement comme les Britanniques de l’époque, force l’ouverture de nos ports. Avec ces accords, l’Europe signe donc son traité de Nankin, qui avait asservi l’empire du Milieu aux intérêts commerciaux britanniques. Mais à la décharge de Bruxelles, le problème est plus grave que celui de la seule Commission. Ce sont les citoyens eux-mêmes qui rechignent à la puissance et aux sacrifices qu’elle exigerait d’eux. « Nous n’avons pas été craints », aurait dit Emmanuel Macron juste après cet accord-capitulation. C’est ce qu’on appelle une litote… Le problème pour être craint, c’est bien sûr d’avoir des moyens de rétorsion, mais c’est surtout de vouloir les utiliser. Bruxelles a passé des semaines à élaborer des contre-mesures punitives pour les États-Unis en expliquant que nous n’allions pas les utiliser… Les fonctionnaires ont inventé la version commerciale du pistolet à bouchon. Pire, les officiels français expliquaient à la veille de l’accord qu’il n’y aurait pas de rétorsions tarifaires, car les économistes avaient calculé qu’elles seraient préjudiciables à nos consommateurs ! Pour Trump, ces tarifs visent-ils surtout à relocaliser la production aux États-Unis ? Oui, il veut siphonner la croissance mondiale. Il récuse la position de « consommateur en dernier ressort », qui avait toujours été celle du maître du monde, les États-Unis au XXe siècle, le Royaume-Uni au XIXe. Il vise au contraire la réindustrialisation de son pays. C’est pour cela qu’il veut des tarifs et un dollar faible, afin d’inciter les industriels du monde entier à s’installer aux États-Unis. Il ne s’arrêtera pas là. Ces tarifs vont servir à la coercition des partenaires, afin qu’ils réévaluent leurs devises ou financent gratuitement la dette américaine, avec les fameuses obligations à coupon zéro prônées par l’un des inspirateurs de Trump, Stephen Miran. L’autre objectif est bien sûr budgétaire. Les taxes douanières vont remplir les coffres de Washington. Rien que l’accord avec l’Europe pourrait lui fournir une centaine de milliards de ressources annuelles supplémentaires. Il s’agit de financer le « Big and Beautiful Budget », les baisses d’impôts votées par le Congrès le mois dernier. Dans les deux cas, c’est la stratégie de la prédation : l’Amérique pompe les investissements pour arroser son sol, et les ressources financières des autres pour les redistribuer à ses entreprises sous forme de baisse d’impôt. Ne surestime-t-on pas la victoire de Trump ? Les engagements d’achats et d’investissements européens n’ont d’autre valeur que politique… C’est vrai que les chiffres sont tellement fous qu’ils ne sont pas crédibles. Ursula von der Leyen s’est engagée à 250 milliards d’achats de gaz liquéfié par an, alors que nous sommes, pour l’Europe entière, en dessous de 100 milliards aujourd’hui… Mais cela crée quand même une pression pour les années qui viennent, et c’est sans doute ce que cherchaient les négociateurs américains. Aussi déraisonnables qu’ils soient, ces montants ont été semble-t-il validés par l’Europe. Et, au-delà des considérations sur les montants, une leçon doit être retenue : l’accès aux marchés internationaux a un prix, car il a une valeur. Et ce prix est à la hausse, depuis l’élection de Trump. L’Europe ferait donc bien de réfléchir au prix de l’accès à son propre marché, l’un des plus grands du monde, et à la façon de négocier les prochains accords commerciaux. À quoi peut-on s’attendre, concrètement, sur le plan commercial ? Toute la question est de savoir qui va payer les tarifs. En bonne logique, c’est le consommateur américain, qui verra augmenter le prix des biens importés. Non pas de 15 %, car dans le prix final, les coûts de distribution comptent pour jusqu’à un tiers. En réalité, chacun des intervenants dans le circuit commercial, exportateur, transporteur, importateur, distributeur et consommateur va être mis sous pression pour réduire ses marges ou payer un peu plus. La répartition de ces efforts sera variable en fonction du rapport de force sur le marché, très différent selon les secteurs. Tout cela devrait contracter les flux commerciaux à destination de l’Amérique. Avec des conséquences sur la croissance, moins fortes en France qu’en Allemagne et en Italie, plus exportatrices, comme on le constate déjà sur les chiffres du deuxième trimestre 2025. Le commerce retourne à sa place, asservi à des objectifs politiques. De ce point de vue, Trump nous donne une leçon douloureuse, mais fort utile. François Lenglet Quels seront les secteurs les plus touchés ? Les entreprises de luxe peuvent supporter à la fois une augmentation de prix et une contraction de leurs marges, qui sont importantes. En revanche, pour les produits laitiers et fromage, c’est l’un de nos postes d’exportation importants, le consommateur sera moins enclin à payer. Ce seront les exportateurs qui vont devoir encaisser la moins-value, s’ils ne veulent pas perdre des parts de marché. Idem pour la cosmétique, également l’une de nos forces à l’export. Le haut de gamme s’en sortira, grâce à la puissance des marques et à l’image du « made in France », mais les produits grand public, plus sensibles au prix, devraient souffrir. L’automobile n’est concernée qu’indirectement, car nous n’exportons pas de voitures françaises outre-Atlantique. Les équipementiers français, sous-traitants des constructeurs européens, pourraient toutefois subir les conséquences de la pression sur les exportateurs allemands. Dans tous ces domaines, les industriels vont tenter de produire davantage aux États-Unis, pour échapper aux taxes. Il peut donc y avoir une nouvelle vague de délocalisations. Restent enfin des industries dans l’incertitude, car leur régime douanier n’a pas encore été défini, comme la pharmacie. Peut-on s’attendre désormais à une marginalisation de la Commission européenne ? Von der Leyen va-t-elle devenir l’amie que les États membres n’assument plus ? Les questions commerciales divisent l’Europe depuis toujours, à la fois entre États membres, qui n’ont pas les mêmes intérêts, et d’un secteur à l’autre au sein d’un même pays. Cette fois-ci, pourtant, le continent n’est pas vraiment divisé, il se partage entre les perdants résignés et les perdants soulagés. Soulagés parce qu’ils redoutaient pire - c’est la force de Trump que d’avoir attendri la viande pendant les négociations, en menaçant de taxes encore plus punitives. Au-delà des jérémiades, il n’y a donc pas de réelle volonté de remettre en cause l’accord avalisé par la présidente de la Commission. De plus, plusieurs partenaires commerciaux des États-Unis ont déjà avalé leur pilule, le Japon, la Corée du Sud, et tous ceux qui attendent dans le couloir de la Maison-Blanche… Il n’y a plus guère que la Chine qui tienne tête à l’Amérique. Il faut espérer que cette affaire aura au moins eu pour effet de révéler à l’Europe, à ses citoyens et ses dirigeants, l’ampleur des changements en cours dans les relations internationales. Dans la confrontation qui s’intensifie, tout est stratégique, y compris les questions commerciales. Tout a un prix. Tout est levier pour obtenir de l’influence ou des ressources. Cela exige de nous une révolution, dans l’idéologie et dans l’action, après quarante ans où le libre-échange était considéré comme l’état naturel des rapports internationaux, indépendant des questions politiques et profitables à tous. Le commerce retourne à sa place, asservi à des objectifs politiques. De ce point de vue, Trump nous donne une leçon douloureuse, mais fort utile. Pour reprendre un aphorisme de l’économiste Marc de Scitivaux, dans la longue histoire du coup de pied au derrière, ce n’est pas toujours le pied le plus coupable.
par Henri Guaino 4 août 2025
"Lettre ouverte à Jean-Luc Mélenchon à propos de la langue française et de quelques autres sujets" Une tribune d'Henri Guaino parue dans Le Figaro le 28 juillet 2025 : https://www.notrefrance.fr/index.php/medias/
par Louise Morice 26 juillet 2025
"Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le solde naturel est négatif. Ce que l’on attendait pour 2027 est déjà là, en 2025. Trop tôt. Trop vite. Et pourtant, pas un sursaut. Pas un électrochoc. Le pays continue, imperturbable, comme sous anesthésie. Ce chiffre, pourtant fondamental, ne suscite ni débat national, ni mobilisation. On le constate, on le commente, puis on passe à autre chose. Comme toujours." https://www.frontieresmedia.fr/tribunes/tribune-louise-morice-le-silence-des-enfants-le-prix-du-renoncement
par Mathieu Bock-Côté 26 juillet 2025
Une tribune de Mathieu Bock-Côté dans FigaroVox (25/07/2025) https://www.lefigaro.fr/vox/politique/mathieu-bock-cote-de-la-fin-du-macronisme-20250724 CHRONIQUE - Le macronisme, dont Bruno Retailleau a prédit la fin une fois qu’Emmanuel Macron ne sera plus président de la République, a d’abord été le réflexe de survie d’un régime en panne, avant de se muer en une forme de centrisme autoritaire. C’est une des polémiques de l’été : sommes-nous témoins de la fin du macronisme ? La question peut se comprendre au premier degré : dans quelle mesure Emmanuel Macron peut-il encore peser jusqu’à l’élection présidentielle de 2027 ? Pour certains, elle relève de l’hérésie. La garde prétorienne du président accuse ainsi de lèse macronisme les figures du gouvernement qui n’ont pourtant jamais caché leur hostilité à son endroit. Voyons-y la joute politique ordinaire. À découvrir La question ne devient pourtant intéressante qu’en se détachant de la personnalité du président de la République pour faire plutôt le bilan de la synthèse qu’il a cherché à composer en 2017. Ce qui nous oblige à revenir à ses origines. Le macronisme fut d’abord le réflexe de survie d’un régime en panne, aux clivages devenus stériles, sentant monter une menace « populiste » et voulant se donner les moyens de la mater en ripolinant sa façade et en confiant la direction du pays à un jeune homme qu’on disait exceptionnel. Les élites politiques concurrentes qui, jusqu’alors, s’affrontaient selon la loi de l’alternance entre la gauche et la droite, se fédérèrent alors dans ce qu’on allait appeler un bloc central revendiquant le monopole de la République, de ses valeurs et de la légitimité démocratique, mobilisé contre des extrêmes, censées menacer la démocratie. L’alternative était posée : macronisme ou barbarie ! La rhétorique anti-extrêmes au cœur du macronisme masquait toutefois une fixation bien plus précise sur la droite nationale - alors qu’il convergeait culturellement avec la gauche radicale. Le macronisme n’a jamais cessé de proposer une offre politique conjuguant diversitarisme et mondialisme, auxquels s’est ajoutée la transition énergétique, sous le signe d’un empire européen à construire. L’homme européen auquel rêvent les macronistes a souvent eu les traits d’un l’homo sovieticus revampé. Le macronisme semblait faire du multiculturalisme une promesse. Il croyait les tensions dans les quartiers solubles dans la croissance, convaincu qu’il n’existe pas d’incompatibilité entre certaines civilisations, que l’islam est une religion comme une autre, et que le nombre, en matière migratoire, est une variable insignifiante. Il n’a pas vu et ne voit toujours pas la submersion migratoire, sauf pour la célébrer. Il se représente moins l’immigration comme une fatalité que comme un projet. Le macronisme s’est aussi rapidement dévoilé comme une forme de centrisme autoritaire qui préfère se faire appeler État de droit Mathieu Bock-Côté Le macronisme se voulait aussi un technocratisme : les meilleurs enfin rassemblés pourraient facilement résoudre les problèmes de la France, dégraisser l’État social, relancer l’économie et libérer les énergies du pays. La pensée unique trouvait sa traduction pratique et quiconque entendait gouverner à partir d’autres principes était accusé de se laisser emporter par des bouffées idéologiques délirantes. La situation financière de la France laisse croire que cette stratégie était moins performante que prévu. Le macronisme s’est aussi rapidement dévoilé comme une forme de centrisme autoritaire qui préfère se faire appeler État de droit. De 2017 à 2025, les initiatives se sont multipliées pour assurer une régulation publique de l’information, pour lutter contre les discours haineux, pour étendre la surveillance des pensées coupables au discours privé, sans oublier la dissolution de nombreux groupes identitaires, l’acharnement judiciaire et financier contre le RN et la fermeture d’une chaîne de télévision décrétée d’opposition. Le régime n’a plus de base populaire C’est ce qui a permis au macronisme de fédérer, l’an passé, les partis du système dans un front républicain allant de l’extrême gauche à la droite classique pour empêcher l’arrivée au pouvoir du RN. Le macronisme, à ce stade, abolissait le pluralisme politique authentique. Il n’y avait de diversité idéologique légitime qu’au sein du bloc central. L’extrême centre et la gauche radicale ont l’antifascisme en langage partagé. La droite classique, évidemment, s’est tue, de peur de déplaire. La seule opposition autorisée est celle qui se structure dans les paramètres du régime, et qui célèbre ses principes, avant de le contredire dans les détails. La révolte fiscale se fait entendre, la révolte identitaire et sécuritaire travaille la France depuis un bon moment, mais le macronisme est résolu à mater les gueux et les lépreux, qu’il se représente comme un peuple factieux, presque comme une meute de dégénérés dangereux. Le régime n’a plus vraiment de base populaire, mais ne s’en émeut guère. Le macronisme en est ainsi venu à confondre les palais de la République avec le maquis. Derrière les appels à répétition à sauver la démocratie, on trouve surtout une caste, qui est aussi une élite moins douée qu’elle ne le croit, résolue à prendre tous les moyens nécessaires pour conserver ses privilèges et ses avantages, effrayée devant la possibilité qu’une autre élite la congédie et la balaie. Les prébendes de la République valent bien la peine qu’on se batte pour elles.
par Julien Abbas (Valeurs Actuelles) 26 juillet 2025
Une tribune de Julien Abbas dans Valeurs Actuelles "La France, bercée par ses souvenirs de grandeur, se trouve aujourd’hui, après huit ans de présidence d’Emmanuel Macron, fragilisée sur l’échiquier mondial. L’action de Jean-Noël Barrot à la tête du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ne fait qu’accentuer cette dérive." https://www.valeursactuelles.com/politique/jean-noel-barrot-un-ministre-etranger-aux-affaires
par Eric Chol (L'Express) 26 juillet 2025
Un edito d'Eric Chol dans l'Express (16/07) Et si on appliquait le plan Pinay-Rueff à la France ? Arrivé à Matignon en 1958, le général de Gaulle trouve un pays au bord de la banqueroute, comparable à la situation actuelle. Le président de la République a eu beau appeler à « la force d’âme », le pays aura du mal à se défaire du bonnet d’âne qui désormais le caractérise en Europe. Car comment qualifier autrement l’abyssesse des finances publiques, rendue possible par une croissance moribonde et dix ans de promesses mensongères successifs pour l’intendance, de la démagogie d’un personnel politique plus soucieux des élections que de l’intérêt national, et de l’addiction incurable de nos compatriotes aux chèques et à l’Etat ? On connaît (depuis 1974) la chanson, mais n’y fait : la France, année après année, déchoit. Même le plan Bayrou ne lui ressemble qu’à une énième incantation qui nourrira une gêne ou elle sera vite oubliée. Et si l’on essayait vraiment un plan de redressement national ? C’est ce qu’avait fait l’un des ministres des Finances les plus brillants, Antoine Pinay, nommé en 1958 par le général de Gaulle. Un esprit comparable mentalement au plus lucide des conseillers de Gaulle, lorsqu’il arrive à Matignon, c’est d’avoir compris que la crise budgétaire de la France, anémique, asphyxiée par les dépenses, dissuadait le grand débiteur d’agir. Pinay demande donc l’aide d’un directeur général du FMI de l’époque, le Suédois Per Jacobsson, ni plus ni moins. Le plus fou est qu’à Paris, comme à Washington, ce fut le diagnostic économique qui fit l’unanimité : la France, dans sa totalité – Intérieur, Défense, Affaires étrangères… – devait rendre les comptes à l’Etat, dans les moindres détails. Et c’est à ce moment-là que le général de Gaulle, aidé par Jacques Rueff, inspecteur des finances, met le pied dans la fourmilière. L’événement économique déterminant de décembre 1958, pour assainir le pays, Car oui, c’était possible, et de Gaulle l’a fait. Comment ? Tout d’abord en misant sur Jacques Rueff, un inspecteur des finances habitué à voler au secours des économies fragiles : trente ans plus tôt, dépêché par la Société des nations, cet ancien du cabinet Poincaré avait testé l’efficacité de ses recettes en Bulgarie, en Grèce ou au Portugal. De ces sauvetages, le polytechnicien a tiré une devise : « Exigez l’ordre financier ou acceptez l’esclavage. » Le plan Pinay-Rueff, adopté en décembre 1958, n’a rien d’un chemin de roses : augmentation de taxes et des impôts, compression des dépenses publiques, fin de nombreuses subventions, dévaluation du franc… La purge a un goût amer. « Et bien, les Français crient. Et après ? », rétorque de Gaulle à ses ministres inquiets. Mais les Français n’ont pas crié, et les comptes de la nation ont été rétablis en six mois. « La force de ce programme, c’est qu’il touchait l’ensemble des classes sociales : agriculteurs, retraités, fonctionnaires, chefs d’entreprise… Tout le monde a dû mettre la main à la poche », analyse l’historienne Laure Quennouëlle-Corre. Le plan Pinay-Rueff avait d’autres atouts. La popularité de Pinay, pour faire passer la pilule auprès des Français. « Sa mise en œuvre a été faite par un homme fort qui disposait d’un ascendant et d’une majorité très importante dans le pays. Le plan a été accepté parce qu’il était porté par de Gaulle, » précise l’auteur du Dénî de la dette. Une histoire française (Flammarion). Sept décennies plus tard, on a la recette, mais incontestablement, on manque encore d’un chef !
par LD31 26 juillet 2025
On croyait que la suppression des 2 jours fériés, ce serait pour réduire le cout du travail ? Raté ... ce sera pour financer un impôt supplémentaire sur les entreprises !
par François Vannesson 17 juillet 2025
Un post Linkedin de François Vannesson, avocat au barreau des Hauts-de-Seine et fondateur du cabinet Morpheus Avocats Najat Vallaud-Belkacem, L’avatar capillaire du pédagogisme invertébré, vient d’être bombardée à la Cour des comptes. Une récompense bien méritée pour l’immense œuvre de destruction méthodique qu’elle a menée contre l’instruction publique : elle a vidé les cerveaux avec une cuillère en bois, puis repeint les murs de la salle de classe avec les restes. À l’époque, elle nous vendait l’école comme un espace d’auto-expression émotive où la syntaxe était fasciste, la chronologie raciste, la discipline patriarcale et l’excellence un attentat psychologique. Elle dirigeait le ministère comme on organise une orgie dans un hospice : sans scrupule, sans hygiène, sans témoin. Et maintenant elle va compter. Pas les fautes, non, ni les manques, ni les milliards égarés entre deux lubies. Elle va compter avec sa méthode : à la louche, au ressenti, à l’échelle du trauma perçu. Chaque déficit sera une blessure symbolique, chaque trou dans le budget une opportunité de réinvention inclusive. Mais la meilleure part, c’est le parrainage. François Bayrou, incarnation ambulante du compromis diarrhéique, l’a propulsée là. L’homme qui croit encore à son destin présidentiel comme un vieil ivrogne croit au retour de l’amour conjugal. Il négocie une nomination comme un souteneur distribue des faveurs : contre une abstention PS sur la censure. République mon amour, tu n’es plus qu’un kiosque à prostitutions morales. La scène est si grotesque qu’on en pleurerait de rage : l’ancienne démolisseuse de la langue française promue gardienne des comptes. L’incompétence sanctifiée, l’idéologie élevée au rang de compétence, l’erreur transformée en critère de sélection. Bientôt viendra son premier rapport : « Vers une comptabilité intersectionnelle : décoloniser les bilans, racialiser les soldes ». Elle y ajoutera une bibliographie lacrymale, quelques verbes en inclusif approximatif, et un graphique en arc-en-ciel pour masquer l’effondrement. La France, pendant ce temps, crève à petit feu. On supprime les jours fériés, on broie les actifs, on appuie sur la gorge des classes moyennes jusqu’à ce qu’elles n’aient plus que l’impôt pour respirer. Mais au sommet de la pyramide invertie, les fossoyeurs se félicitent. On ne leur demande plus d’être bons. Juste d’avoir bien nui. Et là, Najat coche toutes les cases. Avec application. Et un très joli stylo.
par Interview du philosoque Pierre-Henri Tavoillot par Eugénie Boilait dans FigaroVox 16 juillet 2025
ENTRETIEN - Le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, a contesté sur LCP l’existence d’un quelconque « islamo-gauchisme » au sein de l’université française, arguant que le terme n’existait pas « en tant que terme universitaire ». Pour le philosophe Pierre-Henri Tavoillot*, cette affirmation est doublement erronée. * Maître de conférences à Sorbonne Université et président du Collège de philosophie, Pierre-Henri Tavoillot est aussi le référent laïcité de la région Île-de-France. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/quoi-qu-en-dise-le-ministre-la-realite-du-terrain-confirme-l-existence-d-un-islamo-gauchisme-dans-les-universites-20250709 LE FIGARO. – Le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, a contesté le 7 juillet sur LCP l’existence d’un quelconque « islamo-gauchisme » au sein de l’université française, arguant que le terme n’existait pas « en tant que terme universitaire ». « Il n’est même pas bien défini, donc cette notion n’existe pas », a-t-il assuré. Selon vous, cet argumentaire tient-il la route ? Passer la publicité Pierre-Henri TAVOILLOT. - À vrai dire, ce propos est doublement erroné : d’abord parce que le concept d’« islamo-gauchisme » est clairement identifié, et ensuite parce que, comme toute idéologie, il est évidemment présent à l’université, réceptacle naturel de toutes les idéologies existantes. Mais chaque chose en son temps. Revenons au concept qui a été construit par Pierre-André Taguieff dans les années 2000 et dont l’histoire est parfaitement connue. L’historien des idées l’évoque notamment dans son ouvrage Liaisons dangereuses. Islamo-nazisme, islamo-gauchisme (Hermann, 2021). À partir de là, la définition de l’idéal-type est simple à établir, avec trois points fondamentaux qui le caractérisent. Il y a d’abord l’idée que l’islam est la religion des « opprimés » - ce qui permet aux révolutionnaires de gauche d’abjurer leur aversion du religieux, la religion étant traditionnellement perçue comme l’« opium du peuple ». Et la révolte islamiste est, pour le révolutionnaire en herbe, une « divine surprise » qui permet de pallier la tendance conservatrice, voire réactionnaire, du prolétariat européen. En effet celui-ci se contente dorénavant de « défendre les acquis sociaux » ou de voter pour le Rassemblement national. Dans ces conditions, la révolution n’est plus envisageable avec lui, d’où la deuxième idée structurante qui réside dans l’urgence de faire venir un prolétariat actif et révolutionnaire. L’islamo-gauchisme soutient donc l’ouverture sans limite des frontières et l’accueil de ceux qu’ils pointent comme les « damnés de la terre ». Avec ces derniers, il redevient possible d’envisager la destruction de la pseudo-social-démocratie libérale et du système capitaliste. La troisième idée est que l’islamisme est lui-même une simple réaction de défense, légitime donc, face à un impérialisme occidental et néocolonial qui veut imposer à coups de canon son « idéologie des droits de l’homme » dans le monde entier. De ce point de vue, les plus à l’extrême vont percevoir les attentats comme des réactions, à l’instar du pogrom du 7 Octobre en Israël, que certains ont qualifié d’« acte de résistance ». D’ailleurs, la judéophobie est l’une des dernières composantes, et non des moindres, de cette idéologie. On a là un raisonnement qui donne sa cohérence à bien des prises de position étranges de la part de La France insoumise, notamment. Dire que le concept n’existe pas, c’est se priver du moyen de comprendre l’extrême gauche, et même une partie de la gauche, qui met par exemple Gaza et le drapeau palestinien en tête de toutes ses revendications. D’après le ministre, tous les atermoiements des dernières années à l’université témoignent donc simplement d’une tradition française bien ancrée, celle de la forte politisation des universités. Sur ce point, il n’a pas tort : qu’est-ce qui différencie vraiment la période actuelle ? Il existe tout de même une inquiétude supplémentaire par rapport au passé : on a affaire là, potentiellement, à de la violence. Ce ne sont pas seulement des débats d’idées. On a vu ce qui s’est passé à l’école avec Samuel Paty et Dominique Bernard quand la haine est attisée. Ces choses sont à prendre au sérieux. Ce n’est pas majoritaire, mais c’est une minorité fanatique. Entre les débats même violents que l’on a pu connaître par le passé à l’université et ceux d’aujourd’hui, il y a un potentiel changement de nature. Cette idéologie existe donc à l’université ? Elle n’est pas majoritaire ni structurelle, mais elle est bien présente. Et cela dépend largement des secteurs. On peut en donner bien des exemples : il n’a par exemple échappé à personne qu’un certain nombre de blocages qui avaient eu lieu ces derniers mois devant ou dans nos universités se justifiaient par l’hostilité envers la guerre à Gaza. De prime abord, on peut se demander pourquoi, dans une université française, on bloque les cours du fait de la guerre au Moyen-Orient ? En effet, la France n’est pas cobelligérante : sur le strict plan universitaire, ça n’a pas de sens. Il a donc fallu trouver des justifications et on les a trouvées au cœur de ce qu’on appelle l’islamo-gauchisme. Il faut arrêter ce déni qui, en plus d’être agaçant, donne l’impression que c’est l’ignorance qui prime Pierre-Henri Tavoillot Plus personnellement, en tant que référent laïcité de la région Île-de-France, j’ai de nombreuses remontées de terrain qui témoignent de ce que l’on appelle l’« entrisme islamiste ». Ce n’est pas un fantasme. Il y a quelques mois, notre collègue Fabrice Balanche a été interrompu dans son propre cours par des activistes. À Lyon, on sait aussi qu’il existe des salles de prière au sein des établissements. Il y a le spectacle de l’Unef dont la dimension de gauche laïque cède la place aujourd’hui à une dimension « frériste » - cela laisse d’ailleurs dans la stupéfaction ceux qui furent ses anciens militants. Les étudiants sont-ils les seuls concernés ? Les professeurs le sont également. J’ai de nombreux collègues proches de La France insoumise, et ils sont d’ailleurs dans leur bon droit. Certains, comme François Burgat, se revendiquent même de l’islamo-gauchisme. Preuve, s’il en fallait, que, si, aujourd’hui, pour nombre de gens, ce terme est péjoratif, il est en premier lieu descriptif et renvoie à des idées et à un raisonnement. Je ne suis pas d’accord avec cette position, mais elle a de la cohérence : ainsi, dire que ça n’existe pas n’a absolument aucun sens… C’est une grille incontestable qui explique une partie des débats aujourd’hui en France. Dans la classification de la gauche selon Jacques Julliard, il y a la gauche collectiviste, la gauche libertaire, la gauche libérale et la gauche jacobine. Il y a beaucoup d’antagonismes entre elles, mais ce qui réunit les gauches libertaire et collectiviste, c’est précisément l’islamo-gauchisme. Elles vont se retrouver ensemble comme à la manifestation contre l’islamophobie du 10 novembre 2019. Cette dernière avait réuni la CGT, l’Unef, le Parti communiste, Les Verts, Lutte ouvrière, LFI, le NPA. Il y avait une unification des deux gauches radicales qui s’opposaient, de ce point de vue, aux deux autres gauches, laïcardes. Il faut donc arrêter ce déni qui, en plus d’être agaçant, donne l’impression que c’est l’ignorance qui prime. D’autant qu’il est de plus en plus marginal. Il faut être clair pour établir un diagnostic fiable. Ce serait d’ailleurs bienheureux pour tout le monde, car cela nous empêcherait à la fois de sous-réagir et de surréagir. Il faut plutôt accepter le réel, pour, ensuite, voir ce qui relève de la liberté d’expression politique et ce qui relève des attitudes et des actions contraires à l’esprit et à la lettre des universités. Là est le véritable enjeu. D’autant que la prise de parole du ministre s’oppose à ce que disaient certains de ses prédécesseurs… Cet effet yoyo est une constante depuis que Jean-Michel Blanquer a cessé d’être ministre. Lui a eu l’immense mérite d’avoir une politique claire et de long terme sur le sujet. Maintenant, les allers-retours sont permanents, alors même que la réalité commence à apparaître au grand jour.
par Stéphane Loignon et Solenn Poullennec (Les Echos) 14 juillet 2025
Les propositions pour réformer les dépenses publiques ne manquent pas et le Sénat a rendu récemment une nouvelle copie. Mais François Bayrou aura t'il ne courage de n'en retenir ne serait ce que quelques unes plutôt que de tomber dans la lâcheté habituelle des augmentations d’impôts ... https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/budget-les-propositions-chocs-du-senat-pour-redresser-les-comptes-publics-2175473 Budget : les propositions chocs du Sénat pour redresser les comptes publics Gel des crédits, non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, jours de carence des fonctionnaires, « année blanche » sur les prestations sociales… La majorité sénatoriale a livré des recommandations drastiques pour redresser les comptes.Par Stéphane Loignon, Solenn Poullennec Le Sénat a rendu sa copie budgétaire au Premier ministre. Son contenu donne une idée de l'ampleur des sacrifices qui pourraient être demandés. Lundi, le président de la Chambre haute, Gérard Larcher, s'est rendu à Matignon pour dévoiler la contribution de la majorité sénatoriale au prochain budget, à une semaine de l'annonce par François Bayrou de son plan de redressement des finances publiques. « Les Echos » ont pu se procurer ce document révélé par Contexte. Sans prétendre remplacer le gouvernement, les sénateurs de la majorité du centre et de droite ont souhaité apporter leur pierre à l'édifice, en compilant des pistes d'économies pour ramener le déficit à 4,6 % du PIB l'an prochain, contre 5,4 % visés cette année. « Il y a une voie, qui est exigeante, mais c'est maintenant qu'il faut le faire », insiste le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR), à l'issue de ce travail collégial entamé mi-mai. « On a essayé d'équilibrer entre les entreprises, les retraités, les actifs. Que chacun puisse considérer qu'il est soumis au même régime d'effort… », témoigne la sénatrice centriste Elisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des Affaires sociales. Selon elle, « ce n'est pas la copie définitive » mais plutôt « des options ». Baisse des dépenses Alors que le gouvernement a estimé l'effort nécessaire à 40 milliards d'euros en 2026, les propositions sénatoriales aboutissent à une fourchette comprise entre 30 à 50 milliards d'euros. « Sur les presque 50 milliards, environ 45 milliards concernent la baisse de la dépense publique, ça ne s'est jamais fait », souligne Jean-François Husson. Le recours à la fiscalité se limite à un éventuel gel du barème de l'impôt sur le revenu, dans le cadre d'une « année blanche » si les baisses de dépenses ne suffisent pas, et à la pleine application du dispositif contre la fraude CumCum (1,5 à 2 milliards d'euros à la clé), prévu au budget 2025 et que les sénateurs jugent bridé par un texte d'application de Bercy. Tout le reste repose sur la baisse des dépenses, en premier lieu de l'Etat. A minima, le Sénat recommande le gel en valeur des crédits budgétaires - hors défense, charge de la dette et contribution à l'Union européenne -, qui produirait 10 milliards d'euros d'économies par rapport à l'évolution spontanée des dépenses. Chaque baisse de 1 % des crédits hors loi de programmation rapporterait 2,4 milliards d'euros supplémentaires. Non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux Sauf pour les Armées, le Sénat propose même de « réinterroger » les lois de programmation qui encadrent les budgets du ministère de l'Intérieur, de la Justice et de la Recherche. Au maximum, ramener les crédits au niveau du dernier budget avant Covid (soit celui de 2019), en tenant compte de l'inflation, rapporterait carrément 22 milliards d'euros (un objectif qui ne pourrait être atteint que progressivement). Pour réaliser des économies dans la durée, les sénateurs veulent aussi que l'Etat reprenne le contrôle de sa masse salariale, qui a grimpé de 6,7 % l'an passé. Ils remettent sur la table le principe du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, mis en place sous le mandat de Nicolas Sarkozy puis abandonné sous François Hollande. La mesure rapporterait 500 millions d'euros l'an prochain. Ils réclament également l'harmonisation du régime des jours de carence dans la fonction publique (un jour actuellement) avec celui du privé (trois jours), avec 200 millions d'euros à la clé en 2026. La rationalisation des agences et opérateurs apporterait 540 millions d'euros d'économies sur leur fonctionnement, en suivant les recommandations du rapport de la sénatrice LR Christine Lavarde. « Année blanche » notamment sur les retraites. Les collectivités apporteraient un écot modeste au redressement des comptes, à hauteur d'un « maximum de 2 milliards d'euros », comme cette année. Celles-ci ne sont que « de manière anecdotique responsable de l'aggravation de la dette publique depuis 2019 », juge le Sénat, contrairement à la Cour des comptes. Les sénateurs voient en revanche de gros gains potentiels dans la lutte contre l'enchevêtrement des compétences entre Etat et collectivités. L'application des recommandations du rapport Ravignon rapporterait jusqu'à 7,5 milliards d'euros, éventuellement au bout de deux ans (3,8 milliards la première année). Une réforme des décrets tertiaires, dont le coût qui pèse sur les collectivités aurait atteint 3,3 milliards d'euros en 2023, permettrait de récupérer cette somme, potentiellement en deux ans. Enfin, la Sécurité sociale fournirait environ 10 milliards d'euros d'économies en 2026 dans le plan des sénateurs, notamment via une « année blanche » (non-indexation) des prestations sociales (5 milliards d'euros dont 3 milliards d'euros pour les retraites). L'Assurance Maladie apporterait aussi 5 milliards d'euros, par différentes mesures concernant entre autres la prise en charge des affections de longue durée, les médicaments et les dispositifs médicaux. Les assureurs santé pourraient se voir confier des missions de prévention, aujourd'hui assumées par la « Sécu ». Reste à savoir dans quelle mesure le gouvernement s'inspirera de ces nombreuses propositions.