2000-2020 : La longue agonie de la droite toulousaine

David Gerson • 26 mai 2020

2000-2020 : LA LONGUE AGONIE DE LA DROITE TOULOUSAINE

En l’an 2000, le RPR31 et l’ UDF31 font partie des fédérations de la droite et du centre-droit les plus puissantes de France. Depuis 1983 la ville est dirigée par Dominique Baudis, qui est également député de la Haute-Garonne. Sa réélection comme premier magistrat de la ville a toujours été acquise, que ce soit en 1989 ou en 1995, où il fut élu haut la main dès le 1er tour. Sa majorité municipale est composée alors, à part à peu près égale, entre membres du RPR31 et de l’UDF31. Pendant douze années la droite obtiendra même plusieurs sièges de députés dans une région traditionnellement acquise aux socialistes et aux MRG, et dirigera le Conseil Régional. Seul manque à l’appel le Conseil départemental resté à gauche (sans discontinuer depuis 1945), malgré de belles victoires dans quelques cantons comme celui en 1994 d’un certain Jean-Luc Moudenc.

Pendant la période 1983-2000, Toulouse et les partis de droite ont profité des ambitions que Dominique Baudis avait pour la ville dont il avait la charge et à qui il voulait donner un rôle national d’importance : Toulouse est devenue l’une des plus belles villes de France, et le RPR31, au fil des années, une fédération puissante. Nous avions un Maire centriste certes mais sans ambiguïté de centre-droit.

C’est également au cours de cette période que la droite a conquis de grandes villes du département, comme Balma, L’Union, Castelginest, Luchon, Muret ou Cugnaux dont le Maire Michel Aujoulat a dirigé pendant la dernière décennie le RPR31.

En ce qui concerne les élections nationales, notre terre traditionnellement de gauche, votait en majorité pour les candidats PS, mais le score de Jacques Chirac en 1995 frôla quand même les 50%.

C’est ainsi qu’à l’entrée du 21ème siècle, la situation est au beau fixe pour la Droite à Toulouse et en Haute-Garonne, avec un positionnement clair du RPR local. Fin du 1er acte, début du 2ème.



La première ombre au tableau arrive au premier trimestre 2000 : la décision de Dominique Baudis de ne pas se représenter à l’élection municipale de 2001, alors qu’il était initialement prévu qu’il se retire pour celle de 2007. Il demande à Philippe Douste-Blazy, ancien ministre de la culture de Jacques Chirac et actuel Maire de Lourdes, de mener la liste. Ce dernier est Secrétaire Général du CDS (composante la plus centriste de l’UDF), et va composer une liste qui va, à ce moment-là, pencher un peu plus vers le centre et commencer à intégrer de plus en plus de personnes issues de la société civile n’appartenant à aucune formation politique. Douste-Blazy remporte l’élection, mais est mis en ballotage au 1er tour. Au cours de cette élection, les villes de Balma et Cugnaux basculent à gauche. Va commencer aussi, dès le début de la mandature, au sein de la majorité, une guerre d’influence entre les proches du clan Baudis et ceux du clan Douste-Blazy.

La deuxième ombre au tableau arrive en 2002, avec la présence de Jean-Marie Le Pen au 2nd tour de l’élection présidentielle, le fameux front républicain inventé par la gauche qui se met en place, et la création rapide de l’UMP à la fin de l’année, qui va avoir des conséquences néfastes pour la droite républicaine ( https://www.lignes-droites.fr/2002-2019-la-longue-chute-de-la-droite-francaise ). Comme je l’écrivais précédemment dans cet article, cohabiter le temps d’une élection ou gouverner ensemble au sein d’un groupe majoritaire dans une assemblée n’a rien à voir avec vivre ensemble de façon permanente. Pour le RPR31, qui doit se fondre dans l’UMP31, le problème est double car au moment de sa création ce sont surtout des personnalités du Centre qui sont les élus principaux (Douste-Blazy, Maire et député, et Christine De Veyrac unique eurodéputée du département). Pendant les deux premières années, avec la Mairie partagée entre d’anciens élus RPR et UDF, les choses se déroulent plutôt dans un bon esprit.

En mars 2004, Philippe Douste-Blazy est appelé par Jacques Chirac au ministère de la Santé et démissionne de son mandat de Maire de Toulouse. Une élection au sein du conseil municipal doit désigner le nouveau magistrat de la ville. En pleine affaire Allègre qui met en cause Dominique Baudis dans des affaires de parties fines et de proxénétismes aggravées (il en sortira complètement blanchi mais y laissera sa santé), les ex-RPR ne sont pas favorables au poulain désigné par Douste-Blazy qui est le centriste Jean Luc Moudenc. Une opposition se met alors en place, prête à faire un groupe dissident, mais ces opposants, soit par manque d’organisation, soit plus probablement, selon moi, par manque de courage politique et par peur de perdre leurs postes et sièges, se couchent, et JLM est élu Maire de Toulouse par le conseil municipal le 31 mars 2004.

Cette guerre fratricide qui s’est installée au sein du conseil municipal entre ex-RPR et ex-UDF est dissimulée par le contexte national, grâce à un homme, Nicolas Sarkozy, qui prend la tête de l’ UMP en décembre 2004 et qui est élu triomphalement en 2007 Président de la République. Les élections municipales décalées d’un an en 2008 pour cause de surcharge du calendrier électoral devaient alors bien s’annoncer… Mais aux élections législatives suivant les présidentielles, JLM est battu dans la 1ère circonscription qui appartenait à la droite depuis 1986 ! Un maire faisant partie de la majorité présidentielle qui perd aussi nettement devrait peut-être s’interroger sur l’image ou la politique qu’il défend… Au regard des résultats et du score plus élevé qu’avait obtenus Nicolas Sarkozy dans cette circonscription six semaines avant, on s’aperçoit que l’électorat de droite est resté à la maison. De plus, toutes les autres circonscriptions reviennent à la gauche et la fédération UMP31 n’a plus qu’une seule élue eurodéputée !

Pour garder Toulouse et d'autres villes du département à droite, on comprend qu'aucune voix de droite ne doit manquer, d'autant que la gauche s'est remobilisée depuis le début du quinquennat de Sarkozy. Mais au lieu de reconquérir les électeurs de droite, Jean-Luc Moudenc, dans sa campagne, va au contraire essayer de conquérir les électeurs du centre gauche en ouvrant sa liste à des personnalités toulousaines issues de la gauche, beaucoup de membres de la société civile, avec un programme insuffisamment porté sur les thèmes privilégiés de la droite…. La fédération UMP31, principalement dévouée à l’élection municipale de Toulouse, ne peut aller que dans le sens du Maire candidat. De plus sa campagne sur le terrain démarre assez tardivement … Le résultat du 1er tour laisse à penser que c’est jouable mais, la gauche unifiée qui n’avait jamais réalisé un aussi bon score, se mobilise encore plus pour le 2nd tour, et Pierre Cohen l’emporte de 1200 voix. Dans le reste du département c’est aussi la Bérézina, de nombreuses villes sont remportées par la gauche dès le 1er tour et cette dernière obtient une majorité plus qu’absolue à la Métropole.

C’est dans un contexte assez houleux que se déroulent donc les élections internes à l’UMP31 en décembre 2008. Bien sûr, on reproche la perte de Toulouse à JLM qui s’est porté candidat à la présidence de la fédération, et c’est Christine De Veyrac qui l’emporte. Fin 2008 la droite toulousaine, moribonde, se retrouve donc avec … une centriste à la tête de la fédération. Fin du 2ème acte, début du 3ème.



A la sortie de l’élection interne, JLM est considéré comme un looser, voire un pestiféré, sans aucun avenir politique. Mais c’est mal connaître le personnage : besogneux, travailleur infatigable, pouvant aussi gagner l’ingagnable (souvenez-vous du canton cité plus haut gagné en 1994), il décide de faire de son groupe d’opposition au conseil municipal, son fer de lance pour reconquérir le Capitole en 2014.

Analysant son échec, il comprend que la reconquête de l’électorat de droite est la première des conditions et, pour rendre légitime sa candidature future, il doit reprendre la main sur la fédération dont les élections internes se tiennent en 2010 : recrutement dans son équipe de jeunes adhérents UMP, composition dans toutes les circonscriptions d’une liste pour avoir la majorité au conseil départemental UMP31, et surtout, se retrouvant face à de Veyrac, un programme de droite et vraiment de droite. Les élections se déroulent dans une atmosphère plus que tendue et, au final, se traduisent par une victoire nette de la ligne JLM. Le voilà élu président ! Laurence Arribagé qui a soutenu sa candidature, est nommée Secrétaire départementale. La première des missions est remplie. La fédération UMP31 se retrouve pour la première fois avec une majorité d’anciens RPR à la tête des circonscriptions.

La deuxième mission est de remettre un premier pied au Capitole (malgré un groupe d’opposition dissident qui s’est constitué au CM, mais qui n’ira pas bien loin et se ralliera par la suite de nouveau à JLM) et rien de mieux que les élections législatives de 2012 et la 3ème circonscription retaillée en 2008 par Sarkozy et qui serait favorable à la droite. Soutenant activement la campagne de Nicolas Sarkozy et malgré la défaite de ce dernier, JLM remporte l’élection législative, preuve que, quand on sait parler à l’électorat de droite, celui-ci se déplace en masse dans les urnes. Sa victoire est courte mais dans une France qui a basculé majoritairement à gauche, elle prend encore plus de sens et le lance véritablement dans la course au Capitole pour 2014 , même si les sondages sont favorables à Cohen… Mais bon, on sait ce que sont les sondages….

Du côté de la fédération, on prépare les élections de la Présidence de l’UMP (on ne reviendra pas sur cette malheureuse page de l’histoire de la droite française). On y retrouve les deux camps de l’élection interne : ceux qui étaient majoritairement favorables à JLM soutiennent Copé et les autres Fillon. Le score à l’UMP31 est sans appel en faveur de Copé et de sa ligne de droite décomplexée qui réalise un score de près 70%.

En 2013, comprenant que seul JLM est en capacité de remporter la Mairie en 2014, tout le monde se rallie derrière lui. JLM réussit le tour de force de réunir tous les partis du centre et de droite derrière sa candidature. Dans toutes les villes du département nous réussissons à avoir un candidat affiché UMP et non dissimulé (dont je fais partie à Blagnac) et, là aussi, dans la plupart tous les partis partent ensemble dès le 1er tour. Dans une France qui, en fin 2013, bascule dans une réaction anti-Hollande, le programme porté par les candidats insiste sur les thèmes, tels que la sécurité, la fiscalité, l’urbanisme, qui sont chers à l’électorat de droite. Alors qu’on le donnait perdant encore une semaine avant l’élection, JLM remporte Toulouse, et nous réussissons à conquérir des villes (Cugnaux, Balma, Fenouillet, Pibrac, Saint-Orens, Rieumes), tout en manquant de peu d’autres villes comme Blagnac, qui se joue à moins de 300 voix. Plusieurs jeunes de moins de 35 ans intègrent les conseils municipaux dans plusieurs villes de la Haute-Garonne, grâce notamment à l’excellent travail réalisé par Xavier Spanghéro à la tête des jeunes actifs ces cinq dernières années. Nous avons la majorité à la Métropole, Laurence Arribagé remporte l’élection législative partielle en mai pour remplacer JLM, et aux élections sénatoriales 2 sénateurs de droite sont élus.

C’est ainsi qu’à l’été 2014, au moment je suis nommé délégué de la 1ère circonscription, la situation de la droite toulousaine et haute garonnaise n’a jamais été aussi bonne. La fédération compte plus de 5500 adhérents à jour de cotisation. Les élections départementales, qui ont lieu en mars 2015 (pour lesquelles j’ai été investi sur le canton de Blagnac), nous sont promises. Fin du 3ème acte, début du 4ème .



Mais voilà, alors que nous avions gagné en défendant nos valeurs, en parlant à notre électorat, pour une raison que je ne sais pas encore expliquer aujourd’hui, JLM mais aussi Laurence Arribagé ont amorcé un virage à 180 degrés.

Cela commence avec la mise en place des accords politiques pour les élections départementales, qui n’est pas un scrutin de liste mais un scrutin uninominal avec un homme et une femme. En 2012, je rappelle que François Bayrou, président du MoDem appelle à voter Hollande, ce qui restera une trahison pour le peuple de droite. Eh bien, pour ces élections, on devra faire candidature commune dans certains cantons avec des candidats MoDem. Ca sera le cas pour moi à Blagnac, alors que le MoDem soutenait la candidature de mon adversaire aux municipales six mois auparavant ! La raison invoquée pour ce choix est que nous gagnerons des voix à gauche ! Moi, à ce moment-là, je me posais plutôt la question de savoir combien de voix à droite nous allions perdre ! JLM pensait que ce qu’il avait réussi à Toulouse aux municipales se reproduirait dans tout le département. Mais ce n’est pas la même chose d’avoir deux ou trois MoDem sur une liste de soixante-neuf candidats, noyés dans la masse, que d’appeler des électeurs de droite à voter directement pour un candidat MoDem ! On peut ajouter à cela que le programme imposé à la plupart des cantons était tout, sauf de droite ! Alors qu’on nous promettait le basculement, pour la première fois à droite depuis 1945, du conseil départemental, l’échec en fut plus cuisant : 3 malheureux cantons remportés sur 27, et une élimination dans la majorité des cantons hors Toulouse dès le 1er tour (Blagnac en fait partie !)

Pensant que cet échec nous servirait de leçon, je me suis rendu compte lors du conseil de notre parti, en interpellant JLM sur cette erreur de stratégie, que rien n’avait été appris car la seule réponse que j’ai obtenue, c’est que si c’était à refaire, on referait pareil. Et, justement, on recommence immédiatement la même chose pour les élections régionales qui ont lieu six mois après, nous imposant un candidat inconnu, à qui on a imposé les mêmes accords, et qui au final n’est même pas soutenu sur le terrain par ceux qui l’ont mis en place. J’ai apprécié l’homme, qui est d’une grande intelligence, mais je me demande encore ce qu’il est venu faire dans cette galère !

Mais bon, fin 2015, l’unité du parti et de la fédération sont de mise : pour les élections internes en janvier 2016, seule Laurence Arribagé est candidate et adoubée par JLM. Nous décidons avec d’autres de lui faire confiance sur la stratégie et sur la ligne. La voilà élue et quelques amis et moi sommes réélus dans nos fonctions.

Pour préparer l’alternance promise en 2017 à la droite, nous devons préparer la campagne présidentielle suivie de celle des législatives, avec les candidats proposés par notre fédération à la commission nationale d’investiture LR de Paris. Commence ici le début de la disparition de la droite toulousaine : les candidats ne sont pas choisis pour leurs compétences et le travail accompli depuis plusieurs années sur le terrain. Mais sont désignées des personnes qui ne représentent aucun danger pour les membres de la direction départementale, soucieux avant tout de sauvegarder leur poste, ou d'autres à qui on n'a pas pu donner une place éligible aux élections régionales en 2015, qui s’empresseront une fois battues de quitter le parti vers LREM ou AGIR.

C’est ainsi qu’un tiers des circonscriptions sont données à d’autres partis qui ne représentent pas grand-chose ! On évince Nicolas Bonleux sur la 2, Xavier Spanghero sur la 5, Anne Borriello sur la 6 parce qu’ils ont simplement osé, en interne, porter une autre voix. Viennent par la suite les démissions de notre parti, ou les non renouvellements d’adhésion de nos élus tel que Serban Iclanzan, un des seuls conseillers départementaux, ou Elizabeth Pouchelon figure historique de notre fédération dénonçant la perte des idées de droite , le manque de positionnement, le manque de rassemblement. Car au lieu de chercher à les écouter, à les mettre autour de la table, la présidente et la secrétaire départementale se sont au contraire repliées sur elles-mêmes et ont mis en avant des gens qui n’avaient aucune conviction, aucune idée, à l’image de toutes les nominations qui n’étaient dues qu’à des liens d’amitié !

On ne revient pas sur les primaires de la droite et les élections présidentielles perdues mais il fallait tout faire pour que les candidats LR puissent gagner des circonscriptions. Mais c’est à ce moment-là que JLM signe l’appel à aider Emmanuel Macron dans le redressement du pays. Les élections législatives en juin sont une débâcle, 9 candidats sur 10 sont éliminés dès le 1er tour, et Laurence Arribagé perd la 3ème circonscription, celle qu’on considérait à droite comme imperdable !

A la suite de ces élections, vus les résultats obtenus, nous nous attendions à une véritable prise de conscience, à un véritable changement, à des prises de décision … Mais encore une fois, on a fermé les yeux. Nous avons par conséquent décidé avec quelques amis de quitter nos fonctions au sein de la fédération parce que nous ne pouvions plus cautionner cette ligne. Une ligne, qui malgré les échecs répétés depuis les élections victorieuses de 2014 et le changement de stratégie et d’alliances, ne changerait pas, mais qui, pire encore, s'amplifiera malheureusement encore à l’approche des municipales de 2020. Au niveau de LR31, pour la première fois pour des élections municipales aucun comité départemental n’est organisé pour investir des candidats en Haute-Garonne, aucune tête de liste n’affichera nos couleurs, jusqu’à notre secrétaire départementale elle-même à l’Union. Pire encore, une cadre de la fédération désignée à l’origine tête de liste d’une des villes les plus importantes démissionne de sa fonction jusqu’à rendre sa carte pour se rallier au Maire sortant de gauche ! A Toulouse la moitié des candidats LR qui sont dans la liste de JLM n’ont jamais été vus au sein de la fédération. Et le « phénomène de mode » de l’écologie à tout va rattrape notre candidat qui fait l’inverse de ce qu’il avait fait six ans plus tôt, ne parle que des préoccupations de ceux qu’on surnomme les « bobos de gauche », et passe du « bleu de droite » au « vert de l’écolo» !

Même si l’abstention record due à la peur face au Coronavirus a amplifié l’ampleur de nos mauvais résultats, il ne faut pas se cacher derrière cette interprétation très partielle d’un score décevant. Si l’électorat de droite ne s’est pas déplacé dans toutes les villes de la Métropole , c’est aussi lié aux lignes défendues depuis six ans qui fait que nous nous sommes coupés de notre électorat. Ne pas l’admettre, c’est le risque de partir à nouveau à l’échec aux futures élections municipales qui ont de grandes chances d’être finalement rejouées pour tous. Servons-nous de ces résultats comme match d’entraînement sans conséquence et faisons tout pour gagner, rectifier la ligne, le discours et le programme, sinon la désillusion va être énorme car, cette fois, nous n’aurons plus rien.



La morale de cette histoire est simple : quand nous avons affirmé nos valeurs, quand nous n’avons pas eu peur d’afficher nos convictions de droite, c’est alors que nous avons obtenu les meilleurs résultats possibles, que nous avons remporté de nombreuses indiscutables victoires, toutes élections confondues. Certes nous n’avions pas tout gagné mais, quand nous perdions, nous restions proches de la victoire.

Mais dès lors que nous éloignons de ce que nous sommes, nos électeurs sont sans pitié et nous le font comprendre.


La droite républicaine et ses valeurs n’attendent qu’une chose : qu’on les représente !

par Nicolas Conquer (Valeurs Actuelles) 23 novembre 2025
A l’heure de l’IA, l’immigration choisie devient un grand déclassement "Cette question deviendra l’une des dimensions majeures des prochaines échéances électorales en France. Ceux qui continueront de célébrer « l’immigration choisie » sans condition seront jugés pour ce qu’ils sont : les fossoyeurs silencieux de la mobilité sociale de nos enfants." https://www.valeursactuelles.com/economie/a-lheure-de-lia-limmigration-choisie-devient-un-grand-declassement
par Louise Morice dans Frontières 23 novembre 2025
Je suis de la génération Bataclan. La génération qui n’a pas connu la guerre, mais qui voit le sang couler sur son propre sol. Chaque année, chaque mois, chaque semaine. Nous avons grandi dans l’ombre des sirènes et des bougies, dans la peur sourde des métros bondés, des gares trop silencieuses, des sacs abandonnés. Je fais partie d’une génération qui vit la barbarie à chaque coin de rue ; d’une génération de femmes qui hésite à mettre une jupe, de garçons qui baissent les yeux pour éviter une provocation. Nous sommes ceux qui ont appris trop tôt ce que veut dire mourir pour rien. Je suis de la génération qui n’oubliera jamais, et qui ne pardonnera pas. Remplie de colère, parce qu’on ne nous protège pas. Remplie de colère, parce qu’ils ont les clés mais préfèrent le déni, la lâcheté, plutôt que le courage d’affronter le réel. Ils disent craindre la guerre civile, mais la guerre est déjà là, diffuse, rampante, dans les cœurs et dans les rues. J’avais seize ans, j’étais au lycée. Je me souviens du message sur la conversation de classe : « Y’a encore un attentat à Paris. » Encore. Ce mot résonne encore plus fort que les balles. Ce n’était pas le premier. Et nous savons, hélas, que ce ne sera pas le dernier. Louise Morice, média Frontières
par Jeanne Durieux (Le Figaro) 10 novembre 2025
"Contrairement au conflit à Gaza, ou à la guerre en Ukraine, la guerre au Soudan passe largement sous les radars politiques et médiatiques." "il n’y a pas d’armes actionnées par des Juifs, donc pas d’antisémitisme à galvaniser sous le masque de la bonne cause" Deux poids et deux mesures avec Gaza ? Une chronique de Jeanne Durieux sur un conflit qui passe largement sous les radars politiques et médiatiques à lire dans le Figaro : https://www.lefigaro.fr/international/pourquoi-parle-t-on-moins-du-conflit-au-soudan-que-de-gaza-ou-de-l-ukraine-20251108 DÉCRYPTAGE - Contrairement au conflit à Gaza, ou à la guerre en Ukraine, la guerre au Soudan passe largement sous les radars politiques et médiatiques. Des civils abattus d’une rafale de kalachnikov le long des talus, des hommes rassemblés en groupe pour être brûlés vifs, des enfants épuisés et muets qui déambulent sans parents le long des camps de réfugiés, des femmes atones au regard hanté qui taisent les viols collectifs dont elles ont été victimes. Voilà quelques-unes de la kyrielle d’images insoutenables qui ont envahi les réseaux sociaux ces derniers jours, presque deux semaines après la prise de la ville soudanaise d’El-Fasher par les FSR, les Forces de soutien rapide. Un premier bilan fait état d’environ 3000 civils abattus, mais le bilan pourrait être en réalité considérablement plus élevé. À découvrir Ces massacres de civils, dont l’horreur augmente à chaque témoignage rapporté par les ONG, jettent une lumière crue sur le conflit sanglant qui sévit au Soudan depuis plus de deux ans. Il oppose, sur un échiquier soudanais très complexe mêlé d’enjeux ethniques et religieux, les généraux Al-Burhan, chef de l’armée régulière, à Mohamed Daglo dit Hemedti, à la tête des FSR. Et s’inscrit dans le temps long d’une guerre multifactorielle qui ensanglante la région du Darfour depuis des décennies. Et pourtant, les massacres qui sévissent dans ce pays d’Afrique de l’Est bordé par la mer Rouge peinent à bénéficier d’une couverture médiatique ou de dénonciations proportionnelles à la hauteur des 150.000 morts et des 12 millions de déplacés depuis 2023. Contrairement au conflit à Gaza qui engendre depuis deux ans nombre de mobilisations, réactions, et polarise profondément la société française, la guerre au Soudan ne génère qu’une discrète indignation, voire un silence indifférent, malgré plusieurs récits publiés par les médias (dont Le Figaro ). Comment, malgré tout, expliquer cet angle mort ? Le Soudan échappe aux schémas impérialistes et colonialistes Le Soudan est un pays «inclassable», présente d’emblée le chercheur Marc Lavergne. À cheval sur l’Afrique noire et le monde arabe, multiethnique et multireligieux, lié à la Méditerranée, mais aussi à l’Afrique centrale et au Sahel, il échappe à toute catégorisation géographique mais également historique. Le Soudan a été conquis par les Britanniques et les Égyptiens à la fin du XIXe siècle, qui y ont établi un condominium [un territoire sur lequel plusieurs puissances exercent conjointement une souveraineté, NDLR], avant que le pays ne proclame son indépendance en 1956. Mais en réalité, «les Anglais n’ont pas vraiment colonisé le pays puisqu’ils n’y voyaient qu’une mainmise formelle. Ils sont d’ailleurs regrettés par les Soudanais», pointe encore Marc Lavergne. Par cette histoire, le Soudan échappe aux schémas classiques «impérialistes et colonialistes» qui ont profondément forgé les dynamiques actuelles de la plupart des pays africains. Et c’est d’abord là que le bât blesse. Concrètement, le Soudan n’est pas considéré comme un pays où doit s’exercer une lutte anti-impérialiste ou décoloniale, matrice des discours actuels qui défendent par exemple ardemment la Palestine en «lutte» contre «l’État colonisateur» que serait Israël. En réalité, «le conflit qui déchire le Soudan n’est pas une guerre idéologique mais un conflit pour l’argent», avance Marc Lavergne. Les factions en guerre cherchent en partie à contrôler le pays pour des motivations économiques : ils se disputent notamment la mainmise sur le contrôle des ressources économiques soudanaises agricoles et minières (comme l’or et pétrole). Et dans ce conflit, «le sort, comme l’opinion des civils, est complètement évacué» pointe le spécialiste. Le conflit à Gaza accapare la question du génocide Or, c’est précisément le conflit idéologique qui fait de Gaza une tragédie abondamment exposée. Se joue là le paradoxe de la solidarité sélective : les défendeurs de la cause palestinienne requièrent une prise en charge mondiale de cette tragédie mais s’opposent de l’autre «à l’universalité funéraire» pour d’autres conflits, pointait l’écrivain Kamel Daoud dans les colonnes du Point dès novembre 2024. Selon le prix Goncourt, il n’est pas populaire de plaindre tous les morts, quelles que soient leurs origines. Il poursuivait : «Si vous abordez ce sujet tragique [de la guerre au Soudan, NDLR], vous êtes accusé de cacher un conflit armé ’exclusif’ [celui de Gaza, NDLR], de changer de sujet, de procrastiner et de manipuler.» Par ailleurs, de façon évidente, les mobilisations autour du conflit armé à Gaza servent de relais à l’antisémitisme. Très concrètement au Soudan, «il n’y a pas d’armes actionnées par des Juifs, donc pas d’antisémitisme à galvaniser sous le masque de la bonne cause. (...)», appuie Kamel Daoud. Ce que corrobore l’avocat et essayiste Gilles William Golnadel dans une tribune publiée au Figaro : «[Il y a] une focalisation sur la chose juive par une sorte de fascination», expose-t-il pour justifier l’exposition qui entoure Gaza. Or, au Soudan, «les musulmans y tuent d’autres musulmans, ce qui équivaut à zéro. La mort ne devient importante que si elle suscite des émotions collectives à travers un casting précis», pointe encore Kamel Daoud. Davantage de personnes peuvent avoir été assassinées en une semaine à el-Fasher, sans aucune exagération, qu’en deux ans à Gaza. Nathaniel Raymond, directeur exécutif du laboratoire humanitaire de recherches à Yale Pourtant, les ethnies du Darfour (Fours, Masalit et Zaghawa) ont été victimes d’un génocide au début des années 2000, notamment de la part des Janjawid, ces milices arabes dont découlent aujourd’hui les FSR. Et ces violences contre les ethnies non arabes ont redoublé avec la reprise du conflit en 2023. Mais aujourd’hui, la question du «génocide» dans le débat public est presque exclusivement captée par les événements à Gaza. «Les informations qui remontent du terrain [au Soudan] témoignent d’un nettoyage ethnique voire d’un génocide en cours. On s’est posé des questions très longtemps sur Gaza, on a eu toutes sortes de débats, “est-ce un génocide ou pas ?” alors qu’au Darfour, on avait des éléments [pour le caractériser] et on n’en parlait pas du tout», a pointé le 6 novembre 2025 sur le plateau de C ce soir Meriem Amellal, journaliste spécialiste de l’Afrique à France 24. Plus prosaïque, Nathaniel Raymond, directeur exécutif du laboratoire humanitaire de recherches à Yale, établissait un parallèle cette semaine : «davantage de personnes peuvent avoir été assassinées en une semaine à el-Fasher, sans aucune exagération, qu’en deux ans à Gaza». Et pour cause : après la prise de cette ville, il n’y a pas eu de mouvement massif de population, comme c’est normalement le cas dans une zone nouvellement conquise. Cette constatation «augmente la probabilité que la majorité des civils soient morts, capturés ou cachés» dans l’enceinte de la ville, indique un rapport établi par l’université de Yale et cité par le Middle East Eye . Les Nations unies estiment à environ 60.000 le nombre de personnes ayant réussi à fuir el-Fasher − près de 200.000 personnes sont en conséquence toujours entre les mains des sanguinaires milices. À titre de comparaison, 67.000 civils environ auraient trouvé la mort à Gaza depuis le 7 octobre 2023, selon le décompte (invérifiable) du Hamas. En clair, le Soudan est bien loin des projections collectives et des débats qui agitent et polarisent nos sociétés occidentales. Au sein de cette guerre africaine s’entrelacent de nombreux enjeux internes qui entravent notre implication morale dans le conflit. En Occident, «on ne fait pas la différence entre tous les Soudanais, même s’il existe de nombreuses différences ethniques», éclaire Marc Lavergne, - à l’inverse, là encore, du conflit à Gaza, qui oppose deux parties clairement connues et identifiées. Ce que corrobore encore Kamel Daoud dans sa chronique au Point : «Le corps d’un Soudanais est-il moins choquant parce qu’il n’a pas d’histoire qui nous ressemble ?» s’interroge-t-il. Par ailleurs, depuis deux ans, le conflit soudanais oppose deux généraux belligérants unanimement dénoncés. Les Forces de soutien rapide se sont certes rendues complices de nombreux massacres de civils, largement documentés ces derniers jours, mais les exactions du gouvernement dit «légal» du général Al-Burhan les talonnent sur l’échelle de la violence. «Concrètement, les troupes d’Al-Burhan tuent certes moins de gens, mais les milices qui sont alliées à l’armée régulière font les basses besognes. Et de façon générale, l’armée n’a que faire des civils», résume Roland Marchal, chercheur au Centre de recherches internationales (CERI) de Sciences Po Paris. Par ailleurs, les acceptions des termes «gouvernement légal» et «gouvernement rebelle» ne s’appliquent pas réellement au Soudan. «Lorsque deux généraux anciens complices s’affrontent, qui est dans la légalité et qui ne l’est pas ?» interroge le chercheur Marc Lavergne. Et ce dernier de poursuivre : «Entre une armée putschiste, dirigée par al-Burhan, qui a ruiné le pays et pris le pouvoir par un coup d’État, et les Forces de sécurité rapide dirigées par le général Hemedti, grand responsable de la crise du Darfour en 2005, qu’on présente comme des rebelles alors qu’ils sont avant tout des Bédouins, à qui accorder la légitimité ?» De quel côté se placer ? Un tel parti pris est, à l’inverse, plus évident dans le cas du conflit en Ukraine : il y a d’un côté l’agresseur, la Russie, et l’agressé, l’Ukraine, dont une partie des terres a été envahie par l’armée russe. Peu d’intérêt stratégique La donne géopolitique impose également sa grille de lecture : celle des Européens est d’abord liée aux décisions de Washington et à la menace russe. Là encore, l’attention constante qu’accorde la France au conflit russo-ukrainien se justifie ainsi par la proximité géographique et culturelle avec l’Ukraine. Cette dernière étant aux portes de l’Europe et candidate à l’UE et l’Otan, les Français ont tout intérêt à peser pour la victoire de l’Ukraine et la résolution du conflit. Dans le cas du Soudan, la France, qui avait soutenu la chute du régime d’Omar el-Béchir en 2019 en s’affirmant se placer du côté «de ce nouveau Soudan», y accorde en réalité peu d’intérêt. «Il n’y a plus cette génération de gens qui ont connu la Françafrique et qui conservent des liens et des intérêts forts sur le continent», dépeint Marc Lavergne, pour qui «la France s’est désintéressée du Soudan».
par Olivier Babeau / Valeurs Actuelles 4 novembre 2025
"Fuite des cerveaux, désindustrialisation, endettement, services publics défaillants, dépendance au luxe et à l’aéronautique : la France adopte les caractéristiques économiques des pays pauvres" Une tribune à lire dans Valeurs Actuelles : https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/economie/olivier-babeau-la-france-se-tiers-mondise
par Guillaume Roquette dans FigaroVox 3 novembre 2025
Un edito de Guillaume Roquette dans FigaroVox suite à la large victoire de Javier Milei aux législatives de mi-mandat en Argentine. Javier Milei a mis ses actes en accord avec ses paroles depuis qu’il dirige le pays. Et pendant ce temps là, en France, on cogite sur la meilleure façon d'augmenter encore un peu plus la fiscalité alors que nous sommes déjà champion du monde toutes catégories ! https://www.lefigaro.fr/vox/politique/l-editorial-du-figaro-magazine-la-lecon-argentine-20251031 "Large vainqueur aux législatives de mi-mandat, avec un peu plus de 40% des voix pour son parti au niveau national, Javier Milei a mis ses actes en accord avec ses paroles depuis qu’il dirige le pays. Une victoire éclatante. En remportant haut la main les dernières élections législatives en Argentine, Javier Milei a ridiculisé les pseudo-experts qui affirmaient qu’un président aussi libéral serait nécessairement désavoué par les électeurs. À travers ce scrutin, le peuple de ce pays nous administre une magnifique leçon de courage : oui, on peut choisir en toute conscience la voie du redressement, accepter des efforts douloureux, couper à la tronçonneuse dans les dépenses publiques si c’est la condition pour ne pas sombrer. Pour nous autres Français, les Argentins sont des Martiens. Malgré notre dette vertigineuse, notre administration obèse et nos prélèvements obligatoires suffocants, nous refusons collectivement de rompre avec un modèle pourtant à bout de souffle, comme si nous pouvions indéfiniment vivre à crédit sans en payer un jour le prix. L’essayiste Mathieu Laine dresse ce constat désabusé : « Les peuples ne deviennent libéraux que quand ils ont touché le fond de la piscine keynésienne. » Passer la publicité Nous en sommes loin. Le patron du Parti socialiste français, Olivier Faure, continue au contraire de claironner qu’ « il va falloir prendre l’argent là où il est, c’est-à-dire dans les poches de ceux qui ont les moyens ». Voilà les gens avec lesquels le premier ministre Sébastien Lecornu a dangereusement choisi de pactiser : des démagogues d’une médiocrité crasse qui vont tuer notre pays si on les laisse faire. Là-bas, Nicolás ne veut plus payer Pourquoi les Argentins sont-ils capables d’un sursaut auquel nous nous refusons, en tout cas pour l’instant ? La démographie est l’une des réponses : leur pyramide des âges est moins déséquilibrée que la nôtre. Plus nombreux et plus jeunes, les actifs ne veulent plus d’un système qui les empêche de vivre décemment. Là-bas, Nicolás ne veut plus payer. On connaît le franc-parler de Javier Milei. Quand on lui demande ce qu’il pense de ses adversaires progressistes, il les traite de « gauchistes de m… » et affirme : « Il ne faut pas leur laisser un millimètre, si vous le faites, ils vont l’utiliser pour vous détruire. »« Ma mission est de botter le cul des keynésiens et des fils de p… collectivistes. » Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement… Et sa franchise ne s’arrête pas aux discours. Contrairement à ce qui se passe habituellement avec la droite française quand elle est au pouvoir, le président argentin a mis ses actes en accord avec ses paroles depuis qu’il dirige le pays. Il a baissé la dépense publique de 30% et supprimé 60 000 postes de fonctionnaires. Le nombre de ministères est passé de 21 à 10. « Afuera » (ça dégage) ! Pour la gauche française, Milei est le mal personnifié. En rétablissant l’équilibre budgétaire de son pays (une première depuis 14 ans), il a coupé les vivres à des centaines de structures politiques, médiatiques et culturelles qui vivaient au crochet de l’État. Un cauchemar pour nos progressistes ; un modèle à suivre pour une droite digne de ce nom."
par Pierre Brochand (ancien directeur général de la DGSE) 18 octobre 2025
Immigration de masse, insécurité, risque de guerre civile... Le cri d’alarme de Pierre Brochand (ex-DGSE) "EXCLUSIF - Vingt ans après les émeutes qui avaient éclaté à Clichy-sous-Bois puis dans toutes les banlieues, l’ancien directeur général de la DGSE dresse le constat inquiétant d’une France au bord de la « confrontation interne »." Une tribune à lire dans FigaroVox : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/immigration-de-masse-insecurite-risque-de-guerre-civile-le-cri-d-alarme-de-pierre-brochand-ex-dgse-20251017 LE FIGARO MAGAZINE. - Il y a tout juste vingt ans, le 27 octobre 2005, éclataient les premières grandes émeutes de banlieue. Plus qu’une expression de violence passagère, était-ce le début d’un long processus nous conduisant à une forme de « guerre civile » ? Pierre BROCHAND. - Avec le recul, ce qui s’est passé, il y a vingt ans, apparaît, d’abord, comme un révélateur cruel de l’état du pays. Depuis les années 1980, s’était dessiné un paysage inédit : des émeutes ethniques, jamais vues, fusaient ponctuellement en zones urbaines, sur fond de délinquance, d’islamisation et de séparation. La vague d’octobre, en étendant l’incendie à plusieurs villes simultanément, a sonné un réveil en fanfare. Deux tiers de nos compatriotes en ont déduit qu’il fallait « arrêter l’immigration ». Ceux qui détenaient le pouvoir ne les ont pas écoutés. Résultat : rien n’a été fait. Ce qui nous amène directement aux angoisses d’aujourd’hui, que résume la prophétie de « guerre civile ». Je doute que celle-ci se réalise à court terme. En revanche, je tiens pour certaines les affirmations suivantes : – Si nous restons bras croisés, nous irons vers le pire. – Ce pire sera la régression de notre pays en tous domaines, à commencer par la sécurité de ses habitants et, plus généralement, leur bonheur de vivre. – L’épicentre en sera la débâcle de la confiance sociale, clé de voûte des peuples heureux, dont la perte disloque non seulement les sociétés « multi » mais aussi les fondements de l’État-providence. – Je ne vois pas d’autre ferment à ces ébranlements que l’irruption d’une immigration de masse, aux caractéristiques antagoniques des nôtres. Qu’est-ce qui vous rend dubitatif à l’égard du terme « guerre civile », pourtant repris par nombre de responsables politiques ? D’abord, les mots eux-mêmes. Je viens de le dire : pour moi, le fait générateur de troubles à venir ne peut être qu’importé. En effet, dans une démocratie avancée et apaisée, les différends, entre autochtones, ne semblent plus de nature à ressusciter la Révolution ou la Commune. La parenthèse de la « question sociale », ouverte en 1848, refermée en 1968, a laissé la place à des compromis quantitatifs sur le partage d’un gâteau commun, autour de la notion de pouvoir d’achat. De même, les problèmes sociétaux, qui ont pris la suite, n’ont jamais donné lieu à échanges de coups de feu : la haute tenue de la Manif pour tous en a fourni la preuve. Pour faire simple, je dirais qu’entre citoyens de souche, la violence, politique et sociale, n’est plus de mise : pour eux, l’Histoire est finie, au sens de Fukuyama. Leurs débats sont canalisés pour converger fatalement vers un centrisme bien-pensant, quel que soit le numéro de la République. Ceux qui le contestent ne sont pas nombreux : les black blocs ont affiché leurs limites, l’ultradroite parade modestement. L’échec des « gilets jaunes » a, en outre, confirmé qu’aucun projet, centré sur la redistribution du gâteau, ne pouvait renverser la table. Pour la même raison, j’écarte les concepts de « décivilisation » et d’« ensauvagement », qui, en douce, tendent à mettre tout le monde dans le même sac. J’irai plus loin : c’est le thème même de l’immigration, qui, par rétroaction, risque de susciter les plus graves dissensions chez les natifs, entre « universalistes » (mondialistes mercantiles, humanistes rêveurs, wokistes justiciers) et « localistes » (patriotes têtus, régionalistes renaissants, communautaires de tradition). Schisme, qui, d’ailleurs, réintroduit, dans le jeu belliqueux, certains de nos extrémistes, tenants d’une mythique « convergence des luttes », prêts à servir de cheval de Troie aux factions les plus militantes de l’immigration. Nos immigrés sont entrés avec de lourds bagages culturels, religieux, historiques, qu’ils n’ont pas abandonnés à la frontière Pierre Brochand Ensuite, le fait que les fauteurs de troubles de 2005, comme leurs prédécesseurs et successeurs, soient majoritairement de nationalité française ne change en rien le diagnostic. Nos immigrés sont entrés avec de lourds bagages culturels, religieux, historiques, qu’ils n’ont pas abandonnés à la frontière. Ces bagages étaient même si pesants qu’une partie de leurs arrière-petits-enfants continuent à les porter. Énumérons-les, une fois encore, puisque tout en découle : origine du tiers-monde, mœurs communautaires, majorité musulmane, culture de l’honneur, passé colonisé, démographie dynamique, endogamie élevée, faible niveau culturel, productivité et employabilité inférieures, coagulation en isolats géographiques et, surtout, donc, aggravation de ces dispositions au fil des générations dans un contexte global de vengeance du Sud sur le Nord. De ce point de vue, la distinction entre guerre « civile » et « étrangère » ressort brouillée. Nous sommes, au minimum, dans un cas hybride, qui efface, dès le départ, la dimension fratricide des luttes entre Armagnacs et Bourguignons, catholiques et protestants, et où la géopolitique intervient au moins autant que la politique. C’est pourquoi je préfère parler de confrontation interne, vulnérable à des ingérences extérieures. Dans ce tableau, il faut toutefois réserver un sort particulier à l’outre-mer, héritier lui aussi de l’ère coloniale, et doté d’une géographie lointaine et insulaire : on peut y voir des « laboratoires », où des débuts d’insurrection ont déjà opposé des citoyens français, selon leur origine ethnique. Enfin, une « vraie » guerre civile est une lutte armée, au sein d’une même collectivité, entre parties organisées qui s’en disputent le contrôle. Soit le basculement, brutal et total, d’un pays tout entier dans une violence physique concertée. Je le redis : cette vision paraît simpliste. Car d’innombrables hypothèses, plus complexes, sortant des sentiers battus, peuvent se vérifier. Même si nous pensons très fort à l’Empire romain, nul précédent ne saurait nous guider. Gardons à l’esprit qu’aucune société, avant la nôtre, n’a vécu sous le règne de l’individualisme de masse, sorte de terra incognita, sans carte ni boussole. Si nous ne nous dirigeons pas tout à fait vers une « guerre civile », vers quoi allons-nous ? Mon sentiment est le suivant. Bien avant d’en arriver à une bataille à mort pour la souveraineté, nous allons continuer de nous enfoncer dans des sables mouvants. Le raz-de-marée migratoire, s’il persiste, va produire un enchaînement de dégradations, à la fois sous-jacentes dans la durée et explosives dans l’instant. L’immigration actuelle est un fait social total dont les ondes de choc se font sentir partout. Pour les schématiser, elles raniment, d’abord, les clivages non négociables, c’est-à-dire non solubles en procédures, que nous pensions derrière nous : discorde religieuse, inimitié coloniale, fléau racial, gouffre culturel, allégeances nationales incompatibles, auxquels s’ajoute, pour faire bonne mesure, inadéquation économique. En bref, nous prenons, en pleine figure, le boomerang d’une Histoire, loin d’être finie ailleurs. Cheminement souterrain, donc, quand ces disruptions, imperceptibles au jour le jour, finissent par émerger à force de cumulation. Bouffées détonantes lorsque, de ces transformations, naissent des contradictions que les mécanismes d’absorption – autrefois performants avec les eurochrétiens – ne parviennent plus à surmonter. La violence devient, alors, la seule issue. Violence multiforme – délinquante, nihiliste, métapolitique –, d’abord sporadique et dispersée, mais prenant une tournure agglutinante, au fur et à mesure qu’empirent les dérèglements. Soit, au final, un processus quasi volcanique, associant un magma souterrain, porteur de tendances lourdes, et des éruptions soudaines, survenant à tout prétexte. Étant entendu que le choix n’est pas toujours entre la vie et la mort, mais aussi entre une existence qui mérite d’être vécue et d’autres qui n’en valent pas la peine. Sinon, à quoi bon ? J’ai bien conscience qu’ainsi esquissé, ce futur reste nébuleux. Ce qui n’interdit pas d’ouvrir un cadre de réflexion, qui, tout en essayant d’exclure la paranoïa – tâche parfois difficile – met en évidence un éventail de possibles. Sous la forme de l’État de droit, l’État régalien n’est plus que l’ombre de lui-même Pierre Brochand Vous parlez d’un « cadre de réflexion ». Pouvez-vous mieux le cerner ? À mon avis, il faut commencer par prendre conscience du point d’arrivée, lui, irrécusable : une France à majorité africaine et musulmane, bien avant la fin de ce siècle. Bouleversement que je défie quiconque d’espérer paisible et débonnaire. La logique conduit, donc, d’abord à identifier les acteurs de cette tragédie. Si l’on en croit la grille de lecture en vigueur, ils sont en nombre illimité, puisque tout n’est que cas particuliers. Ce n’est pas mon approche. Mon expérience professionnelle m’incite à commettre le péché d’amalgame. Les groupes restent des agents historiques déterminants, et le redeviennent encore plus quand refont surface les casus belli d’antan. Pour moi, ces groupes sont au nombre de quatre. Le plus proactif est constitué de « ceux venus d’ailleurs ». Le critère pertinent, pour l’analyser, est celui de l’acculturation. Faute de statistiques, je m’en tiendrais à l’intuition. Sur un effectif qui atteint désormais 25 à 30% des résidents (sur trois générations), les « assimilés » ne sont plus, à mon sens, que 5 à 10%, les « intégrés » comptent pour 30 à 40% et le reste flotte de la non-adhésion à la haine sur fond d’assistanat. La jeunesse masculine en représente le fer de lance. C’est à travers cette dernière strate que sont ravivés, dans l’espace public, les us et coutumes des pays de départ, avec lesquels nous n’avons jamais demandé à cohabiter. J’attire l’attention sur le fait que l’intégration, « espoir suprême et suprême pensée », n’est qu’un CDD (le respect de la loi contre l’emploi, chacun gardant son quant-à-soi) : en période de basculement, les intégrés pèseront naturellement dans ce sens. Restent « ceux d’ici », les « déjà-là », rejoints par la frange des assimilés. Là aussi, en usant d’une sociologie de la hache, j’y distinguerai trois sous-groupes. « Ceux d’en haut » forment un noyau dur minoritaire, à l’abri des métropoles, à partir desquelles ils font rayonner l’idéologie du « laissez passer, laissez tomber », apothéose prétendue de la « civilisation ». Métropoles où se nouent, d’autre part, des relations pragmatiques de connivence, au moins matérielles, avec « ceux d’ailleurs », rassemblés alentour. « Ceux d’en bas » (65 à 70% du grand total) n’ont pas la même vision : soumis en permanence à des chocs avec des « civilisations » (minuscules, plurielles) aux pratiques antithétiques des leurs, ils n’acceptent plus cette situation et cherchent à le faire savoir poliment, sans y parvenir. Néanmoins, le haut et le bas se retrouvent pour rejeter l’autodéfense et se blottir derrière un quatrième agent : les forces de l’ordre, seule formation armée autorisée sur le territoire français. Ce monopole de la violence est, toutefois, soumis à fortes contraintes. D’abord budgétaires : l’efficacité de ces « gardiens de la paix » est conditionnée par la taille de leurs effectifs, ce qui pose le problème crucial de leur saturation en cas de coup dur. Restrictions juridiques, surtout, sous la forme de l’État de droit, pierre angulaire de la « société des individus » : sous ce régime, l’État national régalien, modèle prédominant auparavant, n’est plus que l’ombre de lui-même. D’une certaine façon, il est même un adversaire à désarmer, car menaçant, du reste de son autorité, les droits fondamentaux de chacun, étrangers et malfaisants compris. Cette impuissance voulue est source d’une incohérence mortelle. En effet, l’immigration ne tombe pas du ciel. Elle est, elle aussi, la conséquence du renversement de paradigme, survenu dans les années 1970, quand nous sommes passés de l’autodétermination des peuples, délimitée par des frontières, à celle des individus, libres de se mouvoir à l’échelle planétaire. Révolution qui, d’un même élan, a donné le feu vert à des exodes massifs, et empêché la puissance publique des pays de destination de les entraver. Or, la survie d’un tissu social, aussi fragile que le nôtre, ne tient qu’à un fil : celui d’une homogénéité culturelle parfaite, autour d’un « néochristianisme païen » unanime, seul à même d’intérioriser l’injonction du vivre-ensemble. Personne ne niera que les nouveaux venus n’ont pas du tout – mais, alors, pas du tout – suivi ce parcours historique, qui nous a conduit à l’épuisement de l’inimitié. D’où la quadrature du cercle : une société qui se veut ouverte mais ne peut se perpétuer que fermée à ceux qui ne partagent pas sa xénophilie. Voilà pour la distribution de la pièce, où nous jouons notre survie. Les réseaux sociaux enclenchent des spirales de contamination aussi soudaines qu’incontrôlables. OLIVIER CORET / OLIVIER CORET pour le Figaro Mag Si nous continuons d’explorer votre cadre de réflexion entre ces acteurs, quels sont les paramètres principaux des évolutions à venir ? Ce que vous me demandez, c’est comment va évoluer le rapport des forces. Si l’on reprend la métaphore d’un fleuve souterrain incandescent, la question devient : quels sont les éléments qui l’accélèrent et ceux qui le ralentissent ? L’accélérateur décisif est, bien sûr, la démographie, indicateur le plus fiable des temps futurs. On ne le répétera jamais assez : nous nous acheminons vers une inversion de majorité, ethnique et religieuse, dans notre pays. Ce n’est plus l’épaisseur du trait. De surcroît, ce chassé-croisé, hors de contrôle, tend à l’exponentialité : il se nourrit des droits opposables, dont se prévalent les immigrés, mais aussi de l’auto-engendrement des diasporas, qui génèrent un fort excédent naturel, disparu chez « ceux d’ici ». En outre, l’immigration est une grandeur non scalable, dont la qualité mute avec la quantité. D’où la notion de masse critique, au-delà de laquelle ce qui était possible en deçà ne l’est plus. Les quartiers où tous ces seuils sont dépassés sont la vitrine de ce qui nous attend. On y retrouve les réminiscences des pays de départ, dont aucun n’est démocratique, développé et égalitaire : incivisme, xénophobie, intolérance, banditisme, omerta, consanguinité, corruption, clientélisme, etc. Ce chamboulement, annoncé par l’arithmétique, ne peut se dérouler sans convulsions. Il y a aussi des « retardants » au processus. Mais ce ne sont, hélas, que des expédients temporaires visant à reculer pour mieux sauter. Le premier est l’évitement, entre anciens et nouveaux. Chacun vote avec ses pieds et se regroupe par affinités, preuve par neuf qu’on ne s’apprécie que mollement : « ceux d’en haut » dans la zone verte des centres-villes, « ceux d’en bas » en France périphérique, « ceux d’ailleurs » dans les banlieues. À ce contournement primaire s’ajoutent des fuites secondaires : la ruée vers l’enseignement privé, l’expatriation des jeunes diplômés, l’alya des Français juifs. Mais le vase déborde déjà : en attestent la répartition autoritaire des demandeurs d’asile en milieu rural et l’implantation obligatoire de logements sociaux dans des villes qui n’en veulent pas. Ensuite, viennent les petits arrangements pour acheter la paix sociale, voire des gains électoraux, sans secouer le cocotier. Ces concessions unilatérales se pratiquent à tous les échelons, depuis la politique de la ville au niveau national, jusqu’aux compromissions municipales, avec des consultants peu recommandables (imams, caïds, grands frères). On songe à la du Barry : « Encore une minute, monsieur le bourreau ! » Autre aspect : les deux minorités actives, susceptibles de coordonner les « révoltés » – trafiquants et Frères musulmans –, n’ont pas intérêt à renverser immédiatement la table. Les premiers en sont au stade embryonnaire de la cartellisation (DZ Mafia), avec pour ambition d’éliminer la concurrence et d’exploiter la poule aux œufs d’or, sans l’achever. Les seconds préfèrent l’entrisme à bas bruit afin d’imposer progressivement les codes de leur religion, en comptant sur l’inexorable loi du nombre pour triompher. Reste le plus grand frein à la belligérance : le comportement des « natifs d’en bas ». Chacun admire leur retenue («vous n’aurez pas notre haine »). Certes, leurs votes, croissants, en faveur de la « maîtrise des flux » montrent que leur imaginaire demeure national. Mais leur choix dans l’isoloir ne se double d’aucune démonstration de rue, pourtant circuit le plus court pour se faire entendre en France. Le poids des seniors ne pousse, évidemment, pas à l’action ni aux changements de cap. Mais, surtout, l’ensemble de la société vit sous les sédatifs obligatoires, que réclame le traitement de l’anarchie individualiste et de l’agressivité multiculturaliste. Citons pêle-mêle : la recherche du bien-être par la consommation, comme unique but commun ; la manipulation des émotions tétanisantes, telles que la peur (épidémies, Russie, climat) et la culpabilité (Vichy, colonialisme, racisme) ; le recours transversal au divertissement. Encore davantage, l’individu-roi, replié sur lui-même, attache un prix démesuré à sa vie biologique, occasion unique à ne pas rater, face à des extraterrestres (terroristes, délinquants) dont les valeurs « héroïques » lui sont devenues illisibles. C’est pourquoi les manifestations qu’il s’autorise – marches blanches, bougies, peluches – clament, avant tout, son refus d’en découdre. Les Français n’ont-ils pas restitué 150.000 armes en 2022 ? Notre orgueil de civilisé est de refouler nos pulsions. Attitude louable et honorable. Mais, alors, ne nous plaignons pas si nous sommes confrontés à des dissidences, que notre passivité enhardit. "La tiers-mondisation de notre corps social n’ira pas sans gros dégâts collatéraux" Pierre Brochand Vous évoquez un fleuve souterrain qui avance, mais aussi fait éruption en surface. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur ce point ? Notre pronostic vital est-il engagé, comme vous l’envisagiez en 2023 ? Il faut partir de l’état des lieux ! 1500 portions de territoire, en « peau de léopard », échappent au plein contrôle des autorités publiques, et la pression sociale qui s’y exerce va à rebours de nos façons de vivre et de penser. Se répand, dans ces contre-sociétés enclavées, une guérilla de basse intensité contre ce qui y subsiste de l’État national et, plus généralement, d’influence française (pompiers, médecins, enseignants, arbitres). Un pessimiste y décèlerait même le retour, en mode mineur, des insurrections coloniales : commissariats-fortins, check-points, « hits and runs » réciproques, caves-sanctuaires, contraste jour/nuit, lutte pour la « conquête des cœurs » (la politique de la ville, resucée du Plan de Constantine, contre l’entraide sociale fournie par imams et dealers), recherche d’interlocuteurs valables, « porteurs de valise », omerta ordinaire, etc. Ne manque – et ce n’est pas rien – que l’armature du FLN. La crainte la plus plausible est que cet écosystème ne gagne en extension, fréquence et intensité, en vertu de la combinaison d’effectifs qui s’accroissent et d’une distance culturelle qui ne se réduit pas. Le modèle, que je privilégie, vous l’aurez compris, est celui de plaques tectoniques, mises en branle par le couple infernal individualisme-immigration, dont le frottement produit des étincelles qui finissent par embraser la plaine. Sur cette base, rien, hélas, n’interdit que soient franchis, un à un, des seuils critiques irréversibles : usage d’armes létales, pénétrations en « zone verte », submersion des forces classiques, entrée en scène de l’armée, prises d’otages, etc. Parmi les phénomènes déstabilisants, un sort à part doit être fait au terrorisme, bien sûr, mais encore plus aux pillages, auxquels les jeunes des quartiers se sont déjà adonnés : rien n’est plus facile, contagieux et efficace pour réduire à zéro la confiance sociale, libérer les instincts et mettre à genoux une société, bien au-delà des méfaits eux-mêmes. Et, voilà que, pour couronner le tout, pointent les drones, innovation stupéfiante qui met à portée de chacun des capacités incalculables de dissémination de la terreur. En fond de tableau, il faut aussi garder à l’esprit que nous vivons sur le fil du rasoir, en raison de notre dépendance à des réseaux, qui sont autant de catalyseurs de chaos. Les réseaux « sociaux » remettent au premier plan la psychologie des foules, décuplent le potentiel de tangage et enclenchent des spirales de contamination aussi soudaines qu’incontrôlables. Quant aux « vitaux » – électricité, eau, gaz, transports, communication –, leur rupture nous renverrait en un éclair à un état de nature, où régneraient les moins inhibés, dont on devine qui ils seraient. À l’échelle nationale, ce scénario, qui suppose un haut degré de planification et exécution, relève de la science-fiction et nous éloigne des quartiers pour nous renvoyer vers des activistes indigènes, voire des services étrangers. Mais, on ne saurait écarter des applications locales, dont tireraient parti les éléments incontrôlés, dont il est question ici. Quant aux détonateurs proprement dits, la liste en est plus longue qu’on ne croit : aux attentats d’ampleur, « bavures », heurts communautaires habituels s’ajoutent des situations insoupçonnées, comme une brutale sortie de l’euro, suscitant une ruée vers les banques et, par engrenage, une déstabilisation de la rue, livrée aux exactions. Sans doute aucun de ces « fantasmes raisonnés » ne se produira, à brève échéance. Sans doute allons-nous continuer à vivre sur les pentes d’un Etna, dont les projections ne frapperont pas tout le monde, tout le temps, mais de plus en plus de monde, de plus en plus souvent. En tout cas, restons sûrs que la tiers-mondisation de notre corps social n’ira pas sans gros dégâts collatéraux, y compris physiques. Jusqu’à l’engagement du pronostic vital ? À très long terme, on ne peut malheureusement qu’opiner, en raison de la dynamique démographique, hors laquelle, il faut bien le reconnaître, tout n’est que bavardage, plus ou moins informé. Cette grande régression peut-elle être enrayée ? Un redressement est-il possible ? Comment ? Contrairement aux apparences, c’est votre question la plus facile, car les réponses existent et sont devenues banales. Mais, elles sont aussi inévitablement féroces, à proportion du temps et du terrain perdus. S’il reste une petite chance d’éteindre la mèche, il n’est d’autre voie que celle d’un radicalisme sans remords. Soit, à la fois, réduire les flux d’entrée à leur plus simple expression, reprendre le contrôle des diasporas et rétablir l’ordre public. Ce qui est tout à fait possible, mais exige un formidable regain de volonté. D’abord, prendre des mesures immédiatement opérationnelles en matière d’immigration (gel des régularisations, réduction drastique des naturalisations, raréfaction des visas des pays à risque). Puis, enjamber le préambule constitutionnel, indispensable au rétablissement des droits, collectifs et autonomes, du peuple français. Enfin, sur ce canevas, faire flèche de tout bois : externaliser les demandes d’asile, ramener à zéro l’attractivité sociale et médicale de la France, dégonfler les diasporas en agissant sur les titres de séjour, muscler la laïcité en l’étendant à l’espace public. Plus généralement, s’attaquer au virus mortel de l’impunité, par une réforme pénale décomplexée, s’adressant au moins autant aux peines, telles qu’elles sont décidées et appliquées, en cas de récidive, qu’à leur quantum. Sous cette brève formulation, l’ordonnance cache, on le sait, une entreprise herculéenne, dont, les choses étant ce qu’elles sont, j’ai le plus grand mal à imaginer qu’elle soit mise en œuvre. Mais, à l’inverse, je suis en mesure de garantir à vos lecteurs que, si nous persistons à céder au biais de normalité, pour repousser à plus tard ce qui aurait dû être fait hier, nous ne préparons pas à nos descendants des lendemains qui chantent.
par Pierre Nerval 15 octobre 2025
Un post X de Pierre Nerval : Lundi 13 octobre 2025, Emmanuel Macron s’envolera pour l’Égypte, persuadé qu’il va marquer l’Histoire en soutenant la première phase du plan de paix élaboré sous l’impulsion de Donald Trump, en coordination avec le Qatar, la Turquie et l’Égypte. En réalité, il n’y marquera rien... sinon la confirmation d’un trouble narcissique devenu incompatible avec la fonction de chef d’État. Car tout, chez Emmanuel Macron, est désormais mise en scène. Ce déplacement, présenté comme un geste diplomatique fort, n’est qu’un nouveau chapitre du roman qu’il écrit sur lui-même : Macron, l’homme providentiel. Mais la diplomatie ne se nourrit pas de poses, et la paix ne se bâtit pas à coups de photos devant les pyramides. Ce président vit dans un théâtre permanent. Il ne gouverne pas, il se projette. Il n’écoute pas, il parle de lui. Il ne consulte pas, il s’impose. Chaque déplacement devient un plateau de tournage, chaque déclaration une réplique, chaque crise une occasion d’apparaître. La France, elle, n’est plus qu’un décor de prestige... un arrière-plan commode pour ses ambitions d’acteur global. ... Pendant qu’il parade au Caire, les Français s’enlisent dans la crise économique, la perte de confiance, la fatigue morale d’un pays sans cap. Et tandis que les grandes puissances mènent la partie diplomatique à coups d’influence, d’énergie et de stratégie, notre président se rêve en chef de paix universel sans en avoir ni les moyens ni la crédibilité. Il ne voit pas que son narcissisme étouffe l’efficacité, que sa parole lasse autant qu’elle divise, et que son image, devenue son obsession, ridiculise la France qu’il prétend incarner. Un président qui s’aime trop finit toujours par oublier son peuple. Ce voyage en Égypte, qu’on nous vend comme un acte de diplomatie, n’est qu’un pèlerinage à son propre culte. Macron n’ira pas chercher la paix : il ira chercher son reflet.
par Alexandre Devecchio dans FigaroVox 4 octobre 2025
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par Étienne Gernelle 1 octobre 2025
Un éditorial d'Étienne Gernelle dans Le Point : https://www.lepoint.fr/editos-du-point/etienne-gernelle-le-zucmano-lepenisme-ou-le-fantasme-du-quelqu-un-d-autre-paiera-25-09-2025-2599534_32.php L’incroyable opération Zucman a encore frappé. Dans une France oppressée de ses difficultés économiques, on peut comprendre que l’appel pour la beauté des démonstrations mathématiques, l’autorité conférée par l’aura d’une grande université américaine (Stanford, rien de moins !) et l’image flatteuse de l’exil fiscal retourné contre lui séduisent. Mais ce n’est pas parce qu’une idée est enrobée dans des habits de prestige qu’elle est juste. Gabriel Zucman, économiste de gauche, très respecté dans son milieu, mène depuis des années une campagne pour la création d’un impôt mondial sur la fortune. Son raisonnement est simple : puisque les riches peuvent déplacer leurs fortunes pour éviter l’impôt, il faut créer un prélèvement coordonné à l’échelle planétaire. Avec cette manœuvre habile, on peut faire passer l’utopie du grand soir pour un pragmatisme de bon sens. L’idée séduit les partis de gauche, évidemment, mais aussi le RN, qui l’utilise dans sa rhétorique « anti-riches » tout en caressant l’espoir de voir cet argent magique remplir les caisses de l’État français. Le problème est que l’impôt mondial, même présenté avec le sérieux des économistes bardés de diplômes, reste une chimère. Il n’existe aucune instance capable de le mettre en œuvre, aucun mécanisme de contrainte universelle pour obliger tous les pays à l’adopter, et encore moins à le percevoir et le redistribuer. Déjà qu’à l’échelle européenne, l’harmonisation fiscale ressemble à un chemin de croix interminable, on imagine mal la Chine, les États-Unis, l’Inde, la Russie et d’autres accepter de s’aligner sur une taxation commune des patrimoines. En réalité, cet impôt mondial, c’est un peu la version contemporaine du mythe de l’argent magique. L’idée que l’on pourrait financer les dépenses publiques toujours croissantes non pas en faisant des choix, en hiérarchisant, en arbitrant – bref en gouvernant –, mais en allant chercher ailleurs des ressources illimitées. Le grand fantasme du « quelqu’un d’autre paiera ». Dans son livre Le triomphe de l’injustice, Zucman, avec son complice Emmanuel Saez, avait déjà popularisé cette vision, qui a rencontré un immense écho. Le discours est rassurant, flatteur : si les services publics se dégradent, si la dette explose, ce n’est pas à cause d’un excès de dépenses, d’une fuite en avant budgétaire, mais de la rapacité des riches et de l’insuffisance de la redistribution. La réalité, d’abord, est que la France n’est pas avare en matière de prélèvements : elle figure parmi les pays les plus taxés au monde, avec une fiscalité déjà très redistributive. Ensuite, croire qu’un impôt mondial règlerait tout revient à s’installer dans une illusion dangereuse. Au lieu d’affronter nos problèmes réels – la faible productivité, l’absence de réformes structurelles, l’endettement chronique –, on préfère croire qu’une baguette magique fiscale viendra nous sauver. La facilité d’adoption de ce discours tient au fond à un trait bien français : le refus de la responsabilité budgétaire. Depuis quarante ans, la dépense publique croît sans frein, chaque gouvernement repoussant le moment de la vérité en empruntant davantage. Comme si le monde entier était condamné à payer notre confort. Bref, le zucmano-lépénisme est une jolie fiction. Mais elle ne résout rien. Au contraire, elle alimente notre incapacité à voir la réalité en face. À force de rêver d’un impôt universel et miraculeux, on se prive des vraies solutions, certes moins spectaculaires, mais infiniment plus efficaces : réformer, produire plus et dépenser mieux.
par Franz-Olivier Giesbert 1 octobre 2025
Un edito de Franz-Olivier Giesbert dans Le Point https://www.lepoint.fr/editos-du-point/fog-comme-un-champ-de-ruines-24-09-2025-2599462_32.php Que la gauche ait perdu toutes les élections depuis 2017, même quand elle clamait victoire, cela ne l’empêche pas de détenir les clés du pouvoir : tel est le paradoxe qui contribue à ruiner notre vieille démocratie. D’où le sentiment qu’ont les Français de n’être plus gouvernés et leur tentation de renverser la table. Certes, il est toujours sain, dans une démocratie, qu’un pouvoir soit confronté sans cesse à des contre-pouvoirs. Mais à condition que ceux-ci ne finissent pas par le paralyser ou par prendre sa place. Or la gauche d’atmosphère contrôle à peu près toutes les institutions de la République. Sur le papier, c’est beau comme l’antique : vigie de la République, le Conseil constitutionnel est censé vérifier notamment que les lois sont conformes à la Constitution. Sauf qu’il penche fortement à gauche et à la peur du crédit, notamment en censurant, l’an dernier, la commande d’Emmanuel Macron et de son ministre Laurent Fabius, près de soixante textes d’application de la loi immigration dédiée au contrôle et à l’intégration et pilotée, entre autres, par Bruno Retailleau. L’immigration est un totem, pas touche ! Le 19 juin, le Conseil constitutionnel, toujours dans la même logique immigrationniste, a réduit à néant la loi Attal sur la justice des mineurs, qui, dans notre pays, continuent ainsi de bénéficier d’une sorte de sauf-conduit après avoir commis leurs forfaits, au grand dam d’une majorité de Français. Le 7 août, il a encore enfoncé le même clou en retoquant, au nom de la liberté individuelle, la loi visant à autoriser le maintien en rétention d’étrangers jugés dangereux. En somme, le vénérable institut ignore de moins en moins le droit, tout comme le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative, qui a inscrit dans le marbre le regroupement familial en 1978, sans en référer bien sûr à la souveraineté populaire. Les magistrats jugent souvent en fonction de leur conviction – de gauche ou d’extrême gauche. Pas tous, Dieu merci, mais, pour paraphraser La Fontaine, selon que vous serez de gauche ou de droite, les jugements vous rendront blanc ou noir. Une preuve parmi tant d’autres : apparemment, la justice a mis un mouchoir sur l’affaire des assistants des eurodéputés du parti de Jean-Luc Mélenchon, soupçonné de détournements de fonds, comme l’a rappelé opportunément l’Office européen de lutte antifraude, alors que, pour des faits semblables, François Bayrou a déjà été jugé et qu’une peine d’inéligibilité menace Marine Le Pen. Vous avez dit bizarre ? À voir ses « trophées », le célèbre Parquet national financier (PNF) est surtout une machine de guerre contre la droite, avec une obsession : Nicolas Sarkozy, coupable d’avoir comparé un jour les magistrats à des « cassation » à « des petits pois qui se ressemblent tous ». Pour avoir critiqué dans ce journal ses méthodes, nous savons à quoi nous en tenir : ce n’est pas l’objet du PNF, acharnant judiciairement depuis vingt ans à ruiner des hommes et des femmes, souvent avant même un début de moyens. C’est bien simple : avec sa présidence du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’audiovisuel public est presque totalement noyauté à gauche, sous la houlette de l’inévitable Arcom, « régulateur des médias » qui dépend, entre autres, de l’Éducation nationale... Dans sa “Déambulation dans les ruines”, un livre magnifique, Michel Onfray nous emmène en voyage dans la civilisation gréco-romaine, qui est morte pour laisser place à la nôtre, la judéo-chrétienne, aujourd’hui en point. Dans son introduction, il cite les Fragments posthumes de Nietzsche, où le philosophe allemand évoque les « valeurs du déclin », et force est de constater qu’elles commencent à recouvrir le mur sur notre vieux continent : la désagrégation de la volonté ; le triomphe de la populace ; la domination de la lâcheté sociale ; la honte du mariage et de la famille ; la haine de la tolérance ; la généralisation de la paresse ; le goût du remords ; une nouvelle conception de la vertu ; le dégoût de la situation présente. Réveillons-nous. Maintenant que, grâce à la pédagogie de François Bayrou, les Français saisissent la gravité de la situation financière du pays, il est temps de se ressaisir et de relever la tête. De passer à l’espoir ! Comme disait Tocqueville, « ce n’est pas parce qu’on voit poindre à l’horizon qu’il faut arrêter d’avancer ».