Enfin un programme pour l'Europe !

Objectif France - JM Belin • 8 mars 2019

Ce programme est le résultat du travail du groupe « Europe » d'Objectif France dirigé par Jean-Marie Belin. A la fois solide, précis, et tourné vers l'avenir, ce texte constitue la base fondamentale de notre vision pour l'Europe. Lignes Droites 31 souhaite partager ce texte, qui sera complété dans les prochaines semaines par notre groupe de travail spécifique sur l'Europe

Nous voulons redonner toute sa place à la France en Europe, dans une Union Européenne qui nous ressemble et autour d’une idée européenne qui nous rassemble. Objectif France est un parti politique qui porte haut l’ambition de redonner sa grandeur à notre pays. Nous croyons fermement en l’Union Européenne. Nos destins sont inextricablement liés. Nous prônons une Europe qui unit dans leur diversité les nations européennes et respecte leurs identités, leur histoire et leurs acquis. Nous pensons que la Nation reste le cadre principal d’épanouissement de la démocratie.

Objectif France défend l’idée européenne, mais désapprouve la gouvernance actuelle de l’UE. Nous mettons en avant le principe de subsidiarité. Nous faisons la part entre ce qui doit relever de l’Europe (donc de Bruxelles), et ce qui relève des Etats membres. Nous sommes pour une Europe puissance mondiale et non seulement marchande et économique, capable d’imposer le principe de réciprocité, ainsi que l’extraterritorialité du droit européen.

Notre pragmatisme nous conduit également à être favorables à une Europe à géométrie variable, celle des "cercles concentriques", dans un cadre commun, qui permet à chaque Etat de choisir son rythme et ses adhésions aux politiques de l’UE, en fonction de ses capacités et de ses choix. Capable de reprendre, le moment venu, la marche en avant avec ceux qui le peuvent et le veulent ; accepter que les autres rejoignent le moment venu ; accepter que certains partenaires ne suivent pas et choisissent le minimum obligatoire de cohésion.

Enfin, nous ne pourrons bâtir une Europe solide que sur des fondations et des valeurs communes fermes et assumées. Cela suppose de valoriser une identité partagée à travers l’Histoire, dont nous devons être fiers, pour nous affermir dans le Monde face aux géants de notre siècle, autour de notre héritage judéo-chrétien et humaniste.

Notre projet, largement partagé, discuté et amendé, parfois au-delà de nos frontières, se transforme en programme pour les élections européennes. Nous l’avons voulu clair, accessible et allant à l’essentiel. Il continuera d’évoluer dans les semaines à venir jusqu’à l’ouverture de la campagne électorale. En voici les 17 points fondamentaux.

La France, 1ère puissance européenne

Nos élus, pendant cinq ans, n’oublieront jamais que nous avons un seul grand objectif, qui prime sur les autres, celui de donner à la France la place de 1ère puissance économique en Europe, d’ici les dix prochaines années. Elle en a les capacités et les autres pays de l’Union sont prêts à lui reconnaitre ce rôle dès lors qu’elle aura remis de l’ordre chez elle, notamment au plan des finances publiques, qu’elle sera exemplaire et non plus donneuse de leçons. Avec l’Allemagne de l’après Merkel, redonnons du souffle au noyau dur de l’Europe sous le signe impératif de la liberté d’entreprendre. Il faut avoir une stratégie concertée, avec notre grand voisin, de croissance et de réforme qui rétablisse une forme nouvelle de confiance.

La recherche

Tout commence par là, Objectif-France en fera une priorité. L’Europe a perdu la bataille des infrastructures de l’Internet. C'est donc le terrain des prochaines rivalités, à intégrer dans la dimension extérieure de la construction européenne. Voulons-nous être alimentés en données, en informations, mais aussi surveillés par des satellites américains, russes, chinois ? Or, il n'est pas indifférent de voir qu'aujourd'hui le spatial n'est plus l'affaire exclusive des Etats seuls, mais qu'il émane aussi de la sphère privée. La recherche spatiale doit être une activité d'excellence de l'UE, comme toutes les activités de recherche, source de compétitivité et d’emplois.

Remettre l’entreprise au cœur de la recherche dans toute l’Union européenne

Il est impératif d’associer à la réflexion le monde économique. Envisager ce schéma sans que le monde économique y soit associé ou s’y reconnaisse est une garantie absolue d’échec. Pour Objectif France, la Recherche ne se décrète pas, elle ne s’impose pas, elle se fédère. Elle nécessite une gouvernance attentive et compétente, qui constitue un vrai interlocuteur pour les chercheurs. Finalement, si nous voulons atteindre les labels distinctifs, il faut abandonner le saupoudrage général et appliquer le concept de l’excellence distinctive.

La qualité principale de la gouvernance européenne de la Recherche doit être la pédagogie :

- pédagogie d’abord pour obtenir la création de la fédération des Universités européennes, évitant l’éparpillement de nos Universités, par une mise en réseau.
- pédagogie ensuite pour organiser une approche transversale des connaissances (cross-fertilisation des anglo-saxons)
- pédagogie enfin pour semer les graines d’une recherche entrepreneuriale, parce que l’économie de demain est celle de l’innovation technologique et de la propriété intellectuelle.

Faire de l’Intelligence artificielle une nouvelle politique commune, au-delà du numérique

Pour Objectif France, l’intelligence artificielle (IA) constitue un enjeu de civilisation, l’un des plus importants du XXIe siècle. Alors que les États-Unis et la Chine font de l’IA un outil de domination, via leurs géants du privé (GAFAM américains, BATX chinois) et leurs politiques publiques, l’Europe est en voie de marginalisation dans la lutte pour cette technologie d’avenir.

Objectif France propose que l’UE fasse de l’IA une politique à part entière, distincte de sa stratégie numérique, et demande qu’elle adopte vite une législation à la hauteur des défis. Nous voulons que l’UE investisse massivement dans ce secteur et créée un environnement favorable au développement d’entreprises et technologies européennes.

Un nouvel Erasmus, plus grand, plus ouvert, plus fort

Former une jeunesse européenne est un défi majeur pour l’UE. Nous disposons depuis 20 ans d’un outil formidable : Erasmus. Aujourd’hui, au-delà des effets d’annonce, il est urgent, en englobant le programme Leonardo, de l’étendre des étudiants vers les artisans, ou les métiers d’art pour créer de véritables centres européens de formation et d’échanges de bonnes pratiques.

Pour cela, nous proposons au niveau français, d’assouplir les contraintes législatives et réglementaires en la matière, notamment le Code du travail, qui freinent les employeurs et les apprentis. Au niveau européen, nous souhaitons jumeler les CFA de différents pays et prévoir une forte augmentation, allant jusqu’au triplement, des crédits Erasmus. Résoudre les difficultés des filières manuelles en France passe par une ouverture sur l’Europe !

Toujours à destination des jeunes, nous sommes également attachés au "Corps européen de solidarité" qui devrait passer, selon nous, de 3 600 (fin 2017) à plus de 100 000 jeunes placés dès 2020.

La Zone Euro : améliorer sa gouvernance

Les candidats d’Objectif France proposeront sur ce thème une approche de rupture : créer les conditions d’une nouvelle croissance en libérant les initiatives privées, ce qui signifie réduire l’interventionnisme européen dans les domaines économiques et normatifs, sans les imposer, mais en les évaluant d’une manière transparente. Face à cette situation, Objectif-France préconise tout d'abord d'améliorer la gouvernance et le pilotage de la zone euro en constituant un directoire politique, composé des chefs de gouvernement. En parallèle, un Secrétariat général de la zone euro - autonome de la Commission européenne - assurerait le suivi au quotidien de la zone économique.

Peut-être faudra-t-il, à terme, un mécanisme financier propre à la zone euro. Contrairement au projet du Président de la République, ce ne doit pas être un fonds de redistribution, mais un outil financier au service de l’impulsion dans les domaines de la recherche, dans le transport autonome de demain, dans la 5G, dans l’innovation, et exclusivement sur ces terrains-là. Nous y veillerons.

Le renforcement de la lutte contre l’évasion fiscale et la fuite des capitaux

Pour Objectif France, lutter beaucoup plus fermement contre l’évasion et la fraude fiscales, mieux encadrer les pratiques financières abusives sont des impératifs immédiats pour dynamiser la richesse de l’Union. L’évasion et la fraude fiscales, ainsi que l’optimisation fiscale "agressive", coûtent chaque année environ 1000 milliards d’euros à l’Europe. Si l’UE a récemment progressé sur la question (directive ATA entrée en application en 2019, projet de lutte contre le dumping fiscal intra-européen après 2020), le plus gros reste à faire. Nous voulons amener les États -membres à plus de transparence et de coopération financières, à instaurer définitivement le "reporting" pays par pays, à mieux croiser les données au niveau européen, à sanctionner lourdement les banques et multinationales opérant dans des paradis fiscaux et leur bloquer les marchés publics…

Objectif France défend également une meilleure régulation financière au sein de l'UE. Nous proposons, au niveau européen, d’identifier les produits financiers "toxiques" ou inutiles au financement de l’économie réelle, et de légiférer sur le trading haute fréquence.

L’immigration raisonnée

L’UE par ses cultures et ses valeurs, conformément aux vœux de ses citoyens, est une terre d’accueil ou d’asile pour tous ceux ou celles qui respectent ces valeurs, les droits et libertés fondamentales associés à des devoirs, donc pour des individus capables de s’y intégrer. Pour Objectif-France, elle ne peut accepter des idéologies ou des individus hostiles aux principes de liberté et d’égalité, comme droits inaliénables de chaque être. L’intégration n’est pas un droit mais elle appelle à des devoirs, notamment l’intégration par le travail, la maîtrise de la langue et le respect de valeurs communes cardinales.

Nous réclamerons immédiatement plus de moyens pour Frontex, trop lourd et peu efficace aujourd’hui, et dont les missions doivent être revues ; et surtout nous demandons la révision des accords de Dublin pour ne pas laisser la charge seule aux pays d’entrée. Bien sûr, cela suppose une fermeté et une solidarité commune. Nous sommes favorables à la création de hot-spots à l’extérieur de l’Union Européenne. Cela signifie aussi une reprise en main momentanée de notre souveraineté territoriale, le temps qu'une véritable police aux frontières de l'UE se mette en place et démontre son efficacité.

A moyen-long terme, il sera nécessaire de tarir durablement ce flux en passant des accords, des partenariats, pour aider au développement ou à l'apaisement des zones d'émigration afin d'y fixer les populations. Plutôt que de contraindre et restreindre, Objectif-France propose de négocier un grand traité "intercontinental", UE/Afrique de développement des économies locales en contrepartie d'un arrêt ou d'une forte limitation des migrations économiques. Chacun y gagnera.

La Défense et la Sécurité

Notre pays proposera aux autres Etats-membres un partenariat incitatif dans lequel les opérations extérieures seront partagées financièrement. Ce partage pourrait prendre la forme d’une nouvelle rubrique au sein du budget européen. Beaucoup de nos partenaires européens restent attachés à l’organisation militaire intégrée même si elle n’est pas adaptée pour faire face aux flux migratoires et à la menace de l’Islam radical à l’intérieur et à l’extérieur des frontières de la communauté européenne.

Pour Objectif-France, la priorité européenne en matière de Défense et de Sécurité est la préservation d'une base industrielle souveraine et l'augmentation de l'effort global des nations du continent actuellement nettement insuffisant pour garantir notre autonomie stratégique en dehors des Etats-Unis. Dans ce processus, la coopération franco-allemande est centrale.

Cette mobilisation doit aussi être scientifique et industrielle, avec un budget de défense pour développer une autonomie stratégique dans des domaines comme le spatial, l’aéronautique militaire et le cyberespace. Nos candidats soutiennent que c’est en créant et consolidant une infrastructure industrielle de Défense commune que l’Europe forgera un esprit de défense. Ils demanderont la mise en place d’une vraie coopération anti-criminalité à travers la création d’une académie européenne du renseignement.

Faire de la prévention en matière de santé une grande cause européenne

Les différents pays d'Europe ont en commun un environnement, des conditions de vie et un niveau de santé sensiblement comparables. C'est au niveau de l'Europe qu'il faut mettre en place les actions de prévention, qui constituent un sujet clé pour mieux lutter contre les maladies chroniques et les inégalités sociales face à la santé.

La prévention primaire, qui se poursuit tout au long de la vie, est à l’évidence l’affaire des Etats. Mais la prévention secondaire, qui vise à la détection et au traitement précoce d'une maladie ou d'un problème de santé, autant que le troisième type de prévention en matière de santé, doivent être traitées au niveau européen.

Cette prévention tertiaire vise à diminuer la prévalence des incapacités chroniques ou des récidives dans une population et à réduire les complications consécutives à la maladie. C’est la prévention qui a permis hier de déterminer les 7 facteurs de risque de l’infarctus du myocarde, avec pour corollaire une réduction très importante de sa mortalité. C’est elle qui, demain, permettra de définir ceux des maladies neuro-dégénératives (type Alzheimer), ce qui permettra de retarder l’apparition de la maladie. Plus les données sont nombreuses et analysées rapidement, plus vite le résultat des études est utilisable. Voilà l’effet d’une politique de prévention et de recherche cohérentes. Là encore, l’Union fait la force…

La mise en commun, en priorité au sein de l’UE, des études concernant la prévention puis des actions dans son champ, permettra en plus, à la France, de rattraper son retard dans ce domaine, mais surtout de démultiplier l’importance des cohortes étudiées et l'efficacité des mesures préventives au niveau européen.

Le défi climatique : une réponse commune, garantie du futur de l’Union

L’Union n’est pas parmi les plus mauvais élèves de la classe au niveau mondial. Objectif France soutient les axes généraux de l’Union en matière climatique qui sont de réduire de 40% les émissions de GES à l’horizon 2030 et de parvenir en 2050 à la neutralité climatique. Nous pouvons en faire un outil de relance économique et un vrai vecteur de croissance. Nous demanderons que cette action bénéficie d’une autorité de régulation de la transition, d’un comité de pilotage et d’un cadre réglementaire pour réorienter les flux financiers.

Le plan d’investissement (plan Juncker), 500 milliards d’ici 2020, devra en large partie soutenir les investissements industriels ayant la réussite de la transition écologique comme objectif. D’une politique de contrainte, nous veillerons à faire de la transition écologique un défi positif, suscitant l’adhésion des citoyens européens. L’investissement "vert" sera aussi source de richesse.

Une agriculture européenne libérée et compétitive

C’est vraiment le domaine où nous pratiquerons le mieux notre grand principe "En faire moins pour faire beaucoup mieux". Objectif France, à l’écoute du monde rural, demandera en premier lieu de rendre obligatoire l’évaluation, par une étude d’impact, des conséquences de toute décision publique en matière de politique sanitaire et environnementale.

Dans ce domaine essentiel, nous voulons fonder une PAC 2020 sur la gestion des risques et sur le soutien à l’investissement. Nous exigerons que soit appliquée systématiquement la préférence communautaire. Il faut pour cela conduire une réforme drastique du droit de la concurrence et supprimer la compétence générale de la Commission européenne. Nous veillerons aussi à ce que tout soit fait pour maintenir à l’euro près le budget actuel de la PAC.

La relance d’une Union pour la Méditerranée : commençons par le noyau dur des Etats du sud de l’Europe

Nous croyons aux vertus des cercles concentriques, et surtout quand des Etats de l’Union ont un trésor en partage, la Méditerranée. Objectif France préconise un rapprochement entre la France, l’Italie, l’Espagne et le Portugal. Ces quatre pays appartiennent à une même sphère culturelle latine et partagent des similitudes économiques, sociales et politiques. Cette Alliance des pays du sud de l’Union, à quatre rapidement, puis in fine à huit, aurait pour première mission de défendre les intérêts de l’Union et d’associer ceux des pays du sud du bassin méditerranéen qui le souhaiteraient.

Ce noyau dur aurait pour principales autres missions la protection des frontières extérieures à l’UE, la gestion des ressources maritimes et celle des transports (notamment le franchissement des massifs montagneux, Alpes et Pyrénées, par des voies de communication). Cette union des pays du sud de l’UE donnerait une dimension humaine à un projet européen vu comme coupé des peuples et désincarné, et lui permettrait de tendre la main aux pays du sud de la Méditerranée de façon plus crédible et plus sélective.

Le temps de la pause est arrivé

Il est temps de mener un examen de conscience approfondi, public, et un audit des institutions européennes, de leurs fonctionnements et surtout de leurs interactions, comme de leur connexion avec les peuples de l’UE à qui elles doivent rendre compte. Cette mission doit être confiée au Parlement Européen, dans son rôle politique légitimé par le vote au suffrage universel. Nous revendiquons pour lui un droit d’inventaire immédiat et prioritaire. Il pourrait s’appuyer, pour mener ces audits, sur la Cour des comptes européenne et ses équivalents nationaux. Aujourd'hui, l'Union Européenne pratique un entrisme de plus en plus prégnant dans des politiques qui relèvent des différents gouvernements, au lieu de parfaire les domaines où elle est compétente.

Pour Objectif France cette pause est nécessaire, car c’est à l'issue de cet examen que l'UE pourra ou non décider d'aller de l'avant, de façon unanime, au même rythme, à 27 ; ou en ordre dispersé, pourquoi pas, avec dans ce cas, les fameux cercles ou les noyaux durs. Ce temps est aussi celui où tout élargissement sera reporté à plus tard et les négociations d’adhésions en cours suspendues, voire, comme pour la Turquie, remises en cause et annulées. Dans ce temps de la pause, Frontex doit lui aussi être intégré à l'évaluation et à l’audit des institutions.

La fin du zèle normatif en France

Objectif France s’engage à rompre avec cette très mauvaise pratique française, zèle du mauvais élève : aggraver, alourdir, en France, les normes communautaires pour feindre d’être exemplaire. Mettons-nous enfin à égalité de contraintes avec tous les autres Etats-membres. Les agriculteurs et les pêcheurs, victimes principales de ces excès, seront les premiers à s'en réjouir !

En faire moins pour faire beaucoup mieux

A Objectif France, nous rejetons le choix binaire du "encore plus" ou du recul systématique et pénalisant, faux choix simpliste et primaire. Ce retour à l'essentiel plutôt qu'à l’infructueuse dispersion des compétences de l'UE doit être un progrès pour tous les citoyens européens.

L'Union Européenne doit concentrer ses efforts sur des domaines d'actions choisis en commun, où elle procure un réel effet levier comparativement à l'échelon national, et où elle fournit plus de résultats et plus rapidement. En contrepartie, elle devra réduire ses interventions dans d'autres secteurs. Moins de directives, de règlements, de charges : selon cette logique, l’UE serait en mesure d’agir beaucoup plus rapidement et de façon plus décisive dans ses domaines prioritaires.

Objectif France travaillera à trouver un accord sur les domaines auxquels il faudrait donner la priorité ou, au contraire, en faire moins. Nous proposons d’aller jusqu’à consulter nos concitoyens et nos territoires.

Un leitmotiv de conviction : favoriser les politiques qui feront aimer l’Europe qui protège Objectif France est fière de décliner cette règle à double entrée dans chacune de ses propositions. L’UE a trop l’image de la contrainte et des règlements hors-sol, alors que son action peut, sur la durée, redevenir plus positive aux yeux des citoyens. Le monde extérieur nous envie, mais il ne nous craint plus et nous en respecte moins. Redevenons l’Europe qui fait envie…

Pour nos frontières, pour notre sécurité et celle de nos enfants, pour l’immigration enfin maîtrisée, pour la prévention en matière de santé, pour la qualité de notre agriculture et la sauvegarde de nos agriculteurs, pour l’enseignement, et dans bien d’autres domaines, nous mettrons en avant ce leitmotiv dans toutes nos propositions, et nous faciliterons tout ce qui conduira à "aimer l’Europe qui protège ". L’Europe en partage, c’est bien celle-là que nous voulons !


Pour soutenir Objectif France : http://www.objectif-france.org/of/soutenir/index_niveau5.php

par Une interview de François Lenglet par Ronan Planchon dans FigaroVox 5 août 2025
https://www.lefigaro.fr/vox/monde/francois-lenglet-la-commission-europeenne-court-comme-un-canard-sans-tete-desorientee-par-la-disparition-du-monde-d-hier-20250803 ENTRETIEN - Après l’accord signé avec les États-Unis de Donald Trump le 27 juillet en Écosse, l’Europe entame son «siècle de l’humiliation», estime le journaliste économique et essayiste. François Lenglet est éditorialiste économique à TF1-LCI et RTL. Son prochain livre : Qui sera le prochain maître du monde ?, Éditions Plon, octobre 2025. LE FIGARO. - Dans le cadre de son accord avec Trump , l’Union européenne accepte de voir la quasi-totalité de ses exportations de biens vers les États-Unis frappées de droits de douane à hauteur de 15 % et n’obtient ni ne sanctionne rien en retour. Une autre issue était-elle possible ? Passer la publicité François LENGLET. - Non, cet accord est tout sauf surprenant. Il matérialise le rapport de force entre l’Amérique de Trump et l’Europe : tout pour moi, le reste pour toi. C’est la conséquence du rôle nouveau qu’occupent les États-Unis dans les affaires du monde, la « superpuissance voyou », pour reprendre les termes de l’universitaire américain Michael Beckley. C’est-à-dire la puissance numéro un sans autre ambition que de se renforcer au détriment des autres, à commencer par les alliés de naguère - ce sont eux qui offrent le meilleur rendement dans le chantage, parce qu’ils sont faibles. Le plus frappant dans cette affaire, c’est que l’Union européenne est contente. Humiliée et satisfaite. Alors même qu’en plus des tarifs, Bruxelles piétine ses propres politiques, pour satisfaire Trump. Elle accepte ainsi d’investir 600 milliards en Amérique, alors que l’exode de l’investissement est justement le principal problème pointé par le rapport Draghi… Elle s’engage à acheter des armes américaines, alors qu’elle exhorte les pays membres à renforcer leur base industrielle de défense… Elle s’engage à acheter des tombereaux de gaz américains alors qu’elle œuvre pour le zéro carbone ! Quant à la prétendue « prévisibilité » offerte par l’accord aux exportateurs, c’est une vaste blague. Un condamné à dix ans de prison peut évidemment se féliciter de la prévisibilité de son cadre de vie pour la prochaine décennie. Londres a obtenu de la Maison-Blanche le taux de tarifs douaniers les plus bas possible à ce jour (10 %). Cette « victoire » participe-t-elle à la décrédibilisation de l’Union européenne ? Le commerce américain avec le Royaume-Uni n’est pas déficitaire, cela peut expliquer le traitement plus favorable qu’a obtenu Londres. Dans la hiérarchie des royaumes tributaires de l’empire américain, nous occupons un rang intermédiaire, entre le Royaume-Uni, qui s’en sort mieux, et le Japon, duquel Trump a obtenu le versement de plusieurs centaines de milliards directement au Trésor américain. Et tous ceux qui sont menacés aujourd’hui de 30 % ou 40 % s’ils ne concluent pas d’accord cette semaine. Si l’Union européenne n’était pas en position de force, est-ce parce qu’elle ne maîtrise aucune de ses positions stratégiques à l’échelle de l’économie globale ? Oui, sans aucun doute. Il faut se souvenir que l’Union européenne n’a pas été conçue pour peser dans le jeu mondial. La raison d’être fondamentale de la Commission de Bruxelles, c’est de surveiller les États membres pour qu’ils se soumettent aux règles du marché unique et de la concurrence. Bruxelles a été dressé pour éradiquer les frontières et le nationalisme économique à l’intérieur de l’Union. L’édification de ce marché unique a d’ailleurs été une propédeutique utile pour apprivoiser la mondialisation, surtout pour la France et sa bureaucratie. Mais les temps sont bouleversés. La mondialisation change de nature et de périmètre, elle se fragmente, à cause du recentrage de la puissance principale sur ses intérêts exclusifs au détriment d’un ordre mondial. Il ne peut y avoir de mondialisation sans maître du monde assumé. La Commission devrait donc s’appuyer sur les frontières et pratiquer une sorte de nationalisme européen, si cette expression n’était pas un oxymore, pour défendre les États membres dans la grande confrontation entre les empires. Elle en est incapable car il faudrait pour cela qu’elle renie les traités. Elle court donc comme un canard sans tête, désorientée par la disparition du monde d’hier. Bruxelles a passé des semaines à élaborer des contre-mesures punitives pour les États-Unis en expliquant que nous n’allions pas les utiliser… Les fonctionnaires ont inventé la version commerciale du pistolet à bouchon. François Lenglet L’Europe-puissance est une chimère, entretenue par les fédéralistes qui voudraient encore sauver leur rêve. C’est le dernier stade du déni, avant l’acceptation de la réalité : l’Europe entame son « siècle de l’humiliation », comme la Chine de 1842, après la guerre de l’opium. Trump, exactement comme les Britanniques de l’époque, force l’ouverture de nos ports. Avec ces accords, l’Europe signe donc son traité de Nankin, qui avait asservi l’empire du Milieu aux intérêts commerciaux britanniques. Mais à la décharge de Bruxelles, le problème est plus grave que celui de la seule Commission. Ce sont les citoyens eux-mêmes qui rechignent à la puissance et aux sacrifices qu’elle exigerait d’eux. « Nous n’avons pas été craints », aurait dit Emmanuel Macron juste après cet accord-capitulation. C’est ce qu’on appelle une litote… Le problème pour être craint, c’est bien sûr d’avoir des moyens de rétorsion, mais c’est surtout de vouloir les utiliser. Bruxelles a passé des semaines à élaborer des contre-mesures punitives pour les États-Unis en expliquant que nous n’allions pas les utiliser… Les fonctionnaires ont inventé la version commerciale du pistolet à bouchon. Pire, les officiels français expliquaient à la veille de l’accord qu’il n’y aurait pas de rétorsions tarifaires, car les économistes avaient calculé qu’elles seraient préjudiciables à nos consommateurs ! Pour Trump, ces tarifs visent-ils surtout à relocaliser la production aux États-Unis ? Oui, il veut siphonner la croissance mondiale. Il récuse la position de « consommateur en dernier ressort », qui avait toujours été celle du maître du monde, les États-Unis au XXe siècle, le Royaume-Uni au XIXe. Il vise au contraire la réindustrialisation de son pays. C’est pour cela qu’il veut des tarifs et un dollar faible, afin d’inciter les industriels du monde entier à s’installer aux États-Unis. Il ne s’arrêtera pas là. Ces tarifs vont servir à la coercition des partenaires, afin qu’ils réévaluent leurs devises ou financent gratuitement la dette américaine, avec les fameuses obligations à coupon zéro prônées par l’un des inspirateurs de Trump, Stephen Miran. L’autre objectif est bien sûr budgétaire. Les taxes douanières vont remplir les coffres de Washington. Rien que l’accord avec l’Europe pourrait lui fournir une centaine de milliards de ressources annuelles supplémentaires. Il s’agit de financer le « Big and Beautiful Budget », les baisses d’impôts votées par le Congrès le mois dernier. Dans les deux cas, c’est la stratégie de la prédation : l’Amérique pompe les investissements pour arroser son sol, et les ressources financières des autres pour les redistribuer à ses entreprises sous forme de baisse d’impôt. Ne surestime-t-on pas la victoire de Trump ? Les engagements d’achats et d’investissements européens n’ont d’autre valeur que politique… C’est vrai que les chiffres sont tellement fous qu’ils ne sont pas crédibles. Ursula von der Leyen s’est engagée à 250 milliards d’achats de gaz liquéfié par an, alors que nous sommes, pour l’Europe entière, en dessous de 100 milliards aujourd’hui… Mais cela crée quand même une pression pour les années qui viennent, et c’est sans doute ce que cherchaient les négociateurs américains. Aussi déraisonnables qu’ils soient, ces montants ont été semble-t-il validés par l’Europe. Et, au-delà des considérations sur les montants, une leçon doit être retenue : l’accès aux marchés internationaux a un prix, car il a une valeur. Et ce prix est à la hausse, depuis l’élection de Trump. L’Europe ferait donc bien de réfléchir au prix de l’accès à son propre marché, l’un des plus grands du monde, et à la façon de négocier les prochains accords commerciaux. À quoi peut-on s’attendre, concrètement, sur le plan commercial ? Toute la question est de savoir qui va payer les tarifs. En bonne logique, c’est le consommateur américain, qui verra augmenter le prix des biens importés. Non pas de 15 %, car dans le prix final, les coûts de distribution comptent pour jusqu’à un tiers. En réalité, chacun des intervenants dans le circuit commercial, exportateur, transporteur, importateur, distributeur et consommateur va être mis sous pression pour réduire ses marges ou payer un peu plus. La répartition de ces efforts sera variable en fonction du rapport de force sur le marché, très différent selon les secteurs. Tout cela devrait contracter les flux commerciaux à destination de l’Amérique. Avec des conséquences sur la croissance, moins fortes en France qu’en Allemagne et en Italie, plus exportatrices, comme on le constate déjà sur les chiffres du deuxième trimestre 2025. Le commerce retourne à sa place, asservi à des objectifs politiques. De ce point de vue, Trump nous donne une leçon douloureuse, mais fort utile. François Lenglet Quels seront les secteurs les plus touchés ? Les entreprises de luxe peuvent supporter à la fois une augmentation de prix et une contraction de leurs marges, qui sont importantes. En revanche, pour les produits laitiers et fromage, c’est l’un de nos postes d’exportation importants, le consommateur sera moins enclin à payer. Ce seront les exportateurs qui vont devoir encaisser la moins-value, s’ils ne veulent pas perdre des parts de marché. Idem pour la cosmétique, également l’une de nos forces à l’export. Le haut de gamme s’en sortira, grâce à la puissance des marques et à l’image du « made in France », mais les produits grand public, plus sensibles au prix, devraient souffrir. L’automobile n’est concernée qu’indirectement, car nous n’exportons pas de voitures françaises outre-Atlantique. Les équipementiers français, sous-traitants des constructeurs européens, pourraient toutefois subir les conséquences de la pression sur les exportateurs allemands. Dans tous ces domaines, les industriels vont tenter de produire davantage aux États-Unis, pour échapper aux taxes. Il peut donc y avoir une nouvelle vague de délocalisations. Restent enfin des industries dans l’incertitude, car leur régime douanier n’a pas encore été défini, comme la pharmacie. Peut-on s’attendre désormais à une marginalisation de la Commission européenne ? Von der Leyen va-t-elle devenir l’amie que les États membres n’assument plus ? Les questions commerciales divisent l’Europe depuis toujours, à la fois entre États membres, qui n’ont pas les mêmes intérêts, et d’un secteur à l’autre au sein d’un même pays. Cette fois-ci, pourtant, le continent n’est pas vraiment divisé, il se partage entre les perdants résignés et les perdants soulagés. Soulagés parce qu’ils redoutaient pire - c’est la force de Trump que d’avoir attendri la viande pendant les négociations, en menaçant de taxes encore plus punitives. Au-delà des jérémiades, il n’y a donc pas de réelle volonté de remettre en cause l’accord avalisé par la présidente de la Commission. De plus, plusieurs partenaires commerciaux des États-Unis ont déjà avalé leur pilule, le Japon, la Corée du Sud, et tous ceux qui attendent dans le couloir de la Maison-Blanche… Il n’y a plus guère que la Chine qui tienne tête à l’Amérique. Il faut espérer que cette affaire aura au moins eu pour effet de révéler à l’Europe, à ses citoyens et ses dirigeants, l’ampleur des changements en cours dans les relations internationales. Dans la confrontation qui s’intensifie, tout est stratégique, y compris les questions commerciales. Tout a un prix. Tout est levier pour obtenir de l’influence ou des ressources. Cela exige de nous une révolution, dans l’idéologie et dans l’action, après quarante ans où le libre-échange était considéré comme l’état naturel des rapports internationaux, indépendant des questions politiques et profitables à tous. Le commerce retourne à sa place, asservi à des objectifs politiques. De ce point de vue, Trump nous donne une leçon douloureuse, mais fort utile. Pour reprendre un aphorisme de l’économiste Marc de Scitivaux, dans la longue histoire du coup de pied au derrière, ce n’est pas toujours le pied le plus coupable.
par Henri Guaino 4 août 2025
"Lettre ouverte à Jean-Luc Mélenchon à propos de la langue française et de quelques autres sujets" Une tribune d'Henri Guaino parue dans Le Figaro le 28 juillet 2025 : https://www.notrefrance.fr/index.php/medias/
par Louise Morice 26 juillet 2025
"Pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le solde naturel est négatif. Ce que l’on attendait pour 2027 est déjà là, en 2025. Trop tôt. Trop vite. Et pourtant, pas un sursaut. Pas un électrochoc. Le pays continue, imperturbable, comme sous anesthésie. Ce chiffre, pourtant fondamental, ne suscite ni débat national, ni mobilisation. On le constate, on le commente, puis on passe à autre chose. Comme toujours." https://www.frontieresmedia.fr/tribunes/tribune-louise-morice-le-silence-des-enfants-le-prix-du-renoncement
par Mathieu Bock-Côté 26 juillet 2025
Une tribune de Mathieu Bock-Côté dans FigaroVox (25/07/2025) https://www.lefigaro.fr/vox/politique/mathieu-bock-cote-de-la-fin-du-macronisme-20250724 CHRONIQUE - Le macronisme, dont Bruno Retailleau a prédit la fin une fois qu’Emmanuel Macron ne sera plus président de la République, a d’abord été le réflexe de survie d’un régime en panne, avant de se muer en une forme de centrisme autoritaire. C’est une des polémiques de l’été : sommes-nous témoins de la fin du macronisme ? La question peut se comprendre au premier degré : dans quelle mesure Emmanuel Macron peut-il encore peser jusqu’à l’élection présidentielle de 2027 ? Pour certains, elle relève de l’hérésie. La garde prétorienne du président accuse ainsi de lèse macronisme les figures du gouvernement qui n’ont pourtant jamais caché leur hostilité à son endroit. Voyons-y la joute politique ordinaire. À découvrir La question ne devient pourtant intéressante qu’en se détachant de la personnalité du président de la République pour faire plutôt le bilan de la synthèse qu’il a cherché à composer en 2017. Ce qui nous oblige à revenir à ses origines. Le macronisme fut d’abord le réflexe de survie d’un régime en panne, aux clivages devenus stériles, sentant monter une menace « populiste » et voulant se donner les moyens de la mater en ripolinant sa façade et en confiant la direction du pays à un jeune homme qu’on disait exceptionnel. Les élites politiques concurrentes qui, jusqu’alors, s’affrontaient selon la loi de l’alternance entre la gauche et la droite, se fédérèrent alors dans ce qu’on allait appeler un bloc central revendiquant le monopole de la République, de ses valeurs et de la légitimité démocratique, mobilisé contre des extrêmes, censées menacer la démocratie. L’alternative était posée : macronisme ou barbarie ! La rhétorique anti-extrêmes au cœur du macronisme masquait toutefois une fixation bien plus précise sur la droite nationale - alors qu’il convergeait culturellement avec la gauche radicale. Le macronisme n’a jamais cessé de proposer une offre politique conjuguant diversitarisme et mondialisme, auxquels s’est ajoutée la transition énergétique, sous le signe d’un empire européen à construire. L’homme européen auquel rêvent les macronistes a souvent eu les traits d’un l’homo sovieticus revampé. Le macronisme semblait faire du multiculturalisme une promesse. Il croyait les tensions dans les quartiers solubles dans la croissance, convaincu qu’il n’existe pas d’incompatibilité entre certaines civilisations, que l’islam est une religion comme une autre, et que le nombre, en matière migratoire, est une variable insignifiante. Il n’a pas vu et ne voit toujours pas la submersion migratoire, sauf pour la célébrer. Il se représente moins l’immigration comme une fatalité que comme un projet. Le macronisme s’est aussi rapidement dévoilé comme une forme de centrisme autoritaire qui préfère se faire appeler État de droit Mathieu Bock-Côté Le macronisme se voulait aussi un technocratisme : les meilleurs enfin rassemblés pourraient facilement résoudre les problèmes de la France, dégraisser l’État social, relancer l’économie et libérer les énergies du pays. La pensée unique trouvait sa traduction pratique et quiconque entendait gouverner à partir d’autres principes était accusé de se laisser emporter par des bouffées idéologiques délirantes. La situation financière de la France laisse croire que cette stratégie était moins performante que prévu. Le macronisme s’est aussi rapidement dévoilé comme une forme de centrisme autoritaire qui préfère se faire appeler État de droit. De 2017 à 2025, les initiatives se sont multipliées pour assurer une régulation publique de l’information, pour lutter contre les discours haineux, pour étendre la surveillance des pensées coupables au discours privé, sans oublier la dissolution de nombreux groupes identitaires, l’acharnement judiciaire et financier contre le RN et la fermeture d’une chaîne de télévision décrétée d’opposition. Le régime n’a plus de base populaire C’est ce qui a permis au macronisme de fédérer, l’an passé, les partis du système dans un front républicain allant de l’extrême gauche à la droite classique pour empêcher l’arrivée au pouvoir du RN. Le macronisme, à ce stade, abolissait le pluralisme politique authentique. Il n’y avait de diversité idéologique légitime qu’au sein du bloc central. L’extrême centre et la gauche radicale ont l’antifascisme en langage partagé. La droite classique, évidemment, s’est tue, de peur de déplaire. La seule opposition autorisée est celle qui se structure dans les paramètres du régime, et qui célèbre ses principes, avant de le contredire dans les détails. La révolte fiscale se fait entendre, la révolte identitaire et sécuritaire travaille la France depuis un bon moment, mais le macronisme est résolu à mater les gueux et les lépreux, qu’il se représente comme un peuple factieux, presque comme une meute de dégénérés dangereux. Le régime n’a plus vraiment de base populaire, mais ne s’en émeut guère. Le macronisme en est ainsi venu à confondre les palais de la République avec le maquis. Derrière les appels à répétition à sauver la démocratie, on trouve surtout une caste, qui est aussi une élite moins douée qu’elle ne le croit, résolue à prendre tous les moyens nécessaires pour conserver ses privilèges et ses avantages, effrayée devant la possibilité qu’une autre élite la congédie et la balaie. Les prébendes de la République valent bien la peine qu’on se batte pour elles.
par Julien Abbas (Valeurs Actuelles) 26 juillet 2025
Une tribune de Julien Abbas dans Valeurs Actuelles "La France, bercée par ses souvenirs de grandeur, se trouve aujourd’hui, après huit ans de présidence d’Emmanuel Macron, fragilisée sur l’échiquier mondial. L’action de Jean-Noël Barrot à la tête du ministère de l’Europe et des Affaires étrangères ne fait qu’accentuer cette dérive." https://www.valeursactuelles.com/politique/jean-noel-barrot-un-ministre-etranger-aux-affaires
par Eric Chol (L'Express) 26 juillet 2025
Un edito d'Eric Chol dans l'Express (16/07) Et si on appliquait le plan Pinay-Rueff à la France ? Arrivé à Matignon en 1958, le général de Gaulle trouve un pays au bord de la banqueroute, comparable à la situation actuelle. Le président de la République a eu beau appeler à « la force d’âme », le pays aura du mal à se défaire du bonnet d’âne qui désormais le caractérise en Europe. Car comment qualifier autrement l’abyssesse des finances publiques, rendue possible par une croissance moribonde et dix ans de promesses mensongères successifs pour l’intendance, de la démagogie d’un personnel politique plus soucieux des élections que de l’intérêt national, et de l’addiction incurable de nos compatriotes aux chèques et à l’Etat ? On connaît (depuis 1974) la chanson, mais n’y fait : la France, année après année, déchoit. Même le plan Bayrou ne lui ressemble qu’à une énième incantation qui nourrira une gêne ou elle sera vite oubliée. Et si l’on essayait vraiment un plan de redressement national ? C’est ce qu’avait fait l’un des ministres des Finances les plus brillants, Antoine Pinay, nommé en 1958 par le général de Gaulle. Un esprit comparable mentalement au plus lucide des conseillers de Gaulle, lorsqu’il arrive à Matignon, c’est d’avoir compris que la crise budgétaire de la France, anémique, asphyxiée par les dépenses, dissuadait le grand débiteur d’agir. Pinay demande donc l’aide d’un directeur général du FMI de l’époque, le Suédois Per Jacobsson, ni plus ni moins. Le plus fou est qu’à Paris, comme à Washington, ce fut le diagnostic économique qui fit l’unanimité : la France, dans sa totalité – Intérieur, Défense, Affaires étrangères… – devait rendre les comptes à l’Etat, dans les moindres détails. Et c’est à ce moment-là que le général de Gaulle, aidé par Jacques Rueff, inspecteur des finances, met le pied dans la fourmilière. L’événement économique déterminant de décembre 1958, pour assainir le pays, Car oui, c’était possible, et de Gaulle l’a fait. Comment ? Tout d’abord en misant sur Jacques Rueff, un inspecteur des finances habitué à voler au secours des économies fragiles : trente ans plus tôt, dépêché par la Société des nations, cet ancien du cabinet Poincaré avait testé l’efficacité de ses recettes en Bulgarie, en Grèce ou au Portugal. De ces sauvetages, le polytechnicien a tiré une devise : « Exigez l’ordre financier ou acceptez l’esclavage. » Le plan Pinay-Rueff, adopté en décembre 1958, n’a rien d’un chemin de roses : augmentation de taxes et des impôts, compression des dépenses publiques, fin de nombreuses subventions, dévaluation du franc… La purge a un goût amer. « Et bien, les Français crient. Et après ? », rétorque de Gaulle à ses ministres inquiets. Mais les Français n’ont pas crié, et les comptes de la nation ont été rétablis en six mois. « La force de ce programme, c’est qu’il touchait l’ensemble des classes sociales : agriculteurs, retraités, fonctionnaires, chefs d’entreprise… Tout le monde a dû mettre la main à la poche », analyse l’historienne Laure Quennouëlle-Corre. Le plan Pinay-Rueff avait d’autres atouts. La popularité de Pinay, pour faire passer la pilule auprès des Français. « Sa mise en œuvre a été faite par un homme fort qui disposait d’un ascendant et d’une majorité très importante dans le pays. Le plan a été accepté parce qu’il était porté par de Gaulle, » précise l’auteur du Dénî de la dette. Une histoire française (Flammarion). Sept décennies plus tard, on a la recette, mais incontestablement, on manque encore d’un chef !
par LD31 26 juillet 2025
On croyait que la suppression des 2 jours fériés, ce serait pour réduire le cout du travail ? Raté ... ce sera pour financer un impôt supplémentaire sur les entreprises !
par François Vannesson 17 juillet 2025
Un post Linkedin de François Vannesson, avocat au barreau des Hauts-de-Seine et fondateur du cabinet Morpheus Avocats Najat Vallaud-Belkacem, L’avatar capillaire du pédagogisme invertébré, vient d’être bombardée à la Cour des comptes. Une récompense bien méritée pour l’immense œuvre de destruction méthodique qu’elle a menée contre l’instruction publique : elle a vidé les cerveaux avec une cuillère en bois, puis repeint les murs de la salle de classe avec les restes. À l’époque, elle nous vendait l’école comme un espace d’auto-expression émotive où la syntaxe était fasciste, la chronologie raciste, la discipline patriarcale et l’excellence un attentat psychologique. Elle dirigeait le ministère comme on organise une orgie dans un hospice : sans scrupule, sans hygiène, sans témoin. Et maintenant elle va compter. Pas les fautes, non, ni les manques, ni les milliards égarés entre deux lubies. Elle va compter avec sa méthode : à la louche, au ressenti, à l’échelle du trauma perçu. Chaque déficit sera une blessure symbolique, chaque trou dans le budget une opportunité de réinvention inclusive. Mais la meilleure part, c’est le parrainage. François Bayrou, incarnation ambulante du compromis diarrhéique, l’a propulsée là. L’homme qui croit encore à son destin présidentiel comme un vieil ivrogne croit au retour de l’amour conjugal. Il négocie une nomination comme un souteneur distribue des faveurs : contre une abstention PS sur la censure. République mon amour, tu n’es plus qu’un kiosque à prostitutions morales. La scène est si grotesque qu’on en pleurerait de rage : l’ancienne démolisseuse de la langue française promue gardienne des comptes. L’incompétence sanctifiée, l’idéologie élevée au rang de compétence, l’erreur transformée en critère de sélection. Bientôt viendra son premier rapport : « Vers une comptabilité intersectionnelle : décoloniser les bilans, racialiser les soldes ». Elle y ajoutera une bibliographie lacrymale, quelques verbes en inclusif approximatif, et un graphique en arc-en-ciel pour masquer l’effondrement. La France, pendant ce temps, crève à petit feu. On supprime les jours fériés, on broie les actifs, on appuie sur la gorge des classes moyennes jusqu’à ce qu’elles n’aient plus que l’impôt pour respirer. Mais au sommet de la pyramide invertie, les fossoyeurs se félicitent. On ne leur demande plus d’être bons. Juste d’avoir bien nui. Et là, Najat coche toutes les cases. Avec application. Et un très joli stylo.
par Interview du philosoque Pierre-Henri Tavoillot par Eugénie Boilait dans FigaroVox 16 juillet 2025
ENTRETIEN - Le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, a contesté sur LCP l’existence d’un quelconque « islamo-gauchisme » au sein de l’université française, arguant que le terme n’existait pas « en tant que terme universitaire ». Pour le philosophe Pierre-Henri Tavoillot*, cette affirmation est doublement erronée. * Maître de conférences à Sorbonne Université et président du Collège de philosophie, Pierre-Henri Tavoillot est aussi le référent laïcité de la région Île-de-France. https://www.lefigaro.fr/vox/societe/quoi-qu-en-dise-le-ministre-la-realite-du-terrain-confirme-l-existence-d-un-islamo-gauchisme-dans-les-universites-20250709 LE FIGARO. – Le ministre de l’Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, a contesté le 7 juillet sur LCP l’existence d’un quelconque « islamo-gauchisme » au sein de l’université française, arguant que le terme n’existait pas « en tant que terme universitaire ». « Il n’est même pas bien défini, donc cette notion n’existe pas », a-t-il assuré. Selon vous, cet argumentaire tient-il la route ? Passer la publicité Pierre-Henri TAVOILLOT. - À vrai dire, ce propos est doublement erroné : d’abord parce que le concept d’« islamo-gauchisme » est clairement identifié, et ensuite parce que, comme toute idéologie, il est évidemment présent à l’université, réceptacle naturel de toutes les idéologies existantes. Mais chaque chose en son temps. Revenons au concept qui a été construit par Pierre-André Taguieff dans les années 2000 et dont l’histoire est parfaitement connue. L’historien des idées l’évoque notamment dans son ouvrage Liaisons dangereuses. Islamo-nazisme, islamo-gauchisme (Hermann, 2021). À partir de là, la définition de l’idéal-type est simple à établir, avec trois points fondamentaux qui le caractérisent. Il y a d’abord l’idée que l’islam est la religion des « opprimés » - ce qui permet aux révolutionnaires de gauche d’abjurer leur aversion du religieux, la religion étant traditionnellement perçue comme l’« opium du peuple ». Et la révolte islamiste est, pour le révolutionnaire en herbe, une « divine surprise » qui permet de pallier la tendance conservatrice, voire réactionnaire, du prolétariat européen. En effet celui-ci se contente dorénavant de « défendre les acquis sociaux » ou de voter pour le Rassemblement national. Dans ces conditions, la révolution n’est plus envisageable avec lui, d’où la deuxième idée structurante qui réside dans l’urgence de faire venir un prolétariat actif et révolutionnaire. L’islamo-gauchisme soutient donc l’ouverture sans limite des frontières et l’accueil de ceux qu’ils pointent comme les « damnés de la terre ». Avec ces derniers, il redevient possible d’envisager la destruction de la pseudo-social-démocratie libérale et du système capitaliste. La troisième idée est que l’islamisme est lui-même une simple réaction de défense, légitime donc, face à un impérialisme occidental et néocolonial qui veut imposer à coups de canon son « idéologie des droits de l’homme » dans le monde entier. De ce point de vue, les plus à l’extrême vont percevoir les attentats comme des réactions, à l’instar du pogrom du 7 Octobre en Israël, que certains ont qualifié d’« acte de résistance ». D’ailleurs, la judéophobie est l’une des dernières composantes, et non des moindres, de cette idéologie. On a là un raisonnement qui donne sa cohérence à bien des prises de position étranges de la part de La France insoumise, notamment. Dire que le concept n’existe pas, c’est se priver du moyen de comprendre l’extrême gauche, et même une partie de la gauche, qui met par exemple Gaza et le drapeau palestinien en tête de toutes ses revendications. D’après le ministre, tous les atermoiements des dernières années à l’université témoignent donc simplement d’une tradition française bien ancrée, celle de la forte politisation des universités. Sur ce point, il n’a pas tort : qu’est-ce qui différencie vraiment la période actuelle ? Il existe tout de même une inquiétude supplémentaire par rapport au passé : on a affaire là, potentiellement, à de la violence. Ce ne sont pas seulement des débats d’idées. On a vu ce qui s’est passé à l’école avec Samuel Paty et Dominique Bernard quand la haine est attisée. Ces choses sont à prendre au sérieux. Ce n’est pas majoritaire, mais c’est une minorité fanatique. Entre les débats même violents que l’on a pu connaître par le passé à l’université et ceux d’aujourd’hui, il y a un potentiel changement de nature. Cette idéologie existe donc à l’université ? Elle n’est pas majoritaire ni structurelle, mais elle est bien présente. Et cela dépend largement des secteurs. On peut en donner bien des exemples : il n’a par exemple échappé à personne qu’un certain nombre de blocages qui avaient eu lieu ces derniers mois devant ou dans nos universités se justifiaient par l’hostilité envers la guerre à Gaza. De prime abord, on peut se demander pourquoi, dans une université française, on bloque les cours du fait de la guerre au Moyen-Orient ? En effet, la France n’est pas cobelligérante : sur le strict plan universitaire, ça n’a pas de sens. Il a donc fallu trouver des justifications et on les a trouvées au cœur de ce qu’on appelle l’islamo-gauchisme. Il faut arrêter ce déni qui, en plus d’être agaçant, donne l’impression que c’est l’ignorance qui prime Pierre-Henri Tavoillot Plus personnellement, en tant que référent laïcité de la région Île-de-France, j’ai de nombreuses remontées de terrain qui témoignent de ce que l’on appelle l’« entrisme islamiste ». Ce n’est pas un fantasme. Il y a quelques mois, notre collègue Fabrice Balanche a été interrompu dans son propre cours par des activistes. À Lyon, on sait aussi qu’il existe des salles de prière au sein des établissements. Il y a le spectacle de l’Unef dont la dimension de gauche laïque cède la place aujourd’hui à une dimension « frériste » - cela laisse d’ailleurs dans la stupéfaction ceux qui furent ses anciens militants. Les étudiants sont-ils les seuls concernés ? Les professeurs le sont également. J’ai de nombreux collègues proches de La France insoumise, et ils sont d’ailleurs dans leur bon droit. Certains, comme François Burgat, se revendiquent même de l’islamo-gauchisme. Preuve, s’il en fallait, que, si, aujourd’hui, pour nombre de gens, ce terme est péjoratif, il est en premier lieu descriptif et renvoie à des idées et à un raisonnement. Je ne suis pas d’accord avec cette position, mais elle a de la cohérence : ainsi, dire que ça n’existe pas n’a absolument aucun sens… C’est une grille incontestable qui explique une partie des débats aujourd’hui en France. Dans la classification de la gauche selon Jacques Julliard, il y a la gauche collectiviste, la gauche libertaire, la gauche libérale et la gauche jacobine. Il y a beaucoup d’antagonismes entre elles, mais ce qui réunit les gauches libertaire et collectiviste, c’est précisément l’islamo-gauchisme. Elles vont se retrouver ensemble comme à la manifestation contre l’islamophobie du 10 novembre 2019. Cette dernière avait réuni la CGT, l’Unef, le Parti communiste, Les Verts, Lutte ouvrière, LFI, le NPA. Il y avait une unification des deux gauches radicales qui s’opposaient, de ce point de vue, aux deux autres gauches, laïcardes. Il faut donc arrêter ce déni qui, en plus d’être agaçant, donne l’impression que c’est l’ignorance qui prime. D’autant qu’il est de plus en plus marginal. Il faut être clair pour établir un diagnostic fiable. Ce serait d’ailleurs bienheureux pour tout le monde, car cela nous empêcherait à la fois de sous-réagir et de surréagir. Il faut plutôt accepter le réel, pour, ensuite, voir ce qui relève de la liberté d’expression politique et ce qui relève des attitudes et des actions contraires à l’esprit et à la lettre des universités. Là est le véritable enjeu. D’autant que la prise de parole du ministre s’oppose à ce que disaient certains de ses prédécesseurs… Cet effet yoyo est une constante depuis que Jean-Michel Blanquer a cessé d’être ministre. Lui a eu l’immense mérite d’avoir une politique claire et de long terme sur le sujet. Maintenant, les allers-retours sont permanents, alors même que la réalité commence à apparaître au grand jour.
par Stéphane Loignon et Solenn Poullennec (Les Echos) 14 juillet 2025
Les propositions pour réformer les dépenses publiques ne manquent pas et le Sénat a rendu récemment une nouvelle copie. Mais François Bayrou aura t'il ne courage de n'en retenir ne serait ce que quelques unes plutôt que de tomber dans la lâcheté habituelle des augmentations d’impôts ... https://www.lesechos.fr/economie-france/budget-fiscalite/budget-les-propositions-chocs-du-senat-pour-redresser-les-comptes-publics-2175473 Budget : les propositions chocs du Sénat pour redresser les comptes publics Gel des crédits, non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, jours de carence des fonctionnaires, « année blanche » sur les prestations sociales… La majorité sénatoriale a livré des recommandations drastiques pour redresser les comptes.Par Stéphane Loignon, Solenn Poullennec Le Sénat a rendu sa copie budgétaire au Premier ministre. Son contenu donne une idée de l'ampleur des sacrifices qui pourraient être demandés. Lundi, le président de la Chambre haute, Gérard Larcher, s'est rendu à Matignon pour dévoiler la contribution de la majorité sénatoriale au prochain budget, à une semaine de l'annonce par François Bayrou de son plan de redressement des finances publiques. « Les Echos » ont pu se procurer ce document révélé par Contexte. Sans prétendre remplacer le gouvernement, les sénateurs de la majorité du centre et de droite ont souhaité apporter leur pierre à l'édifice, en compilant des pistes d'économies pour ramener le déficit à 4,6 % du PIB l'an prochain, contre 5,4 % visés cette année. « Il y a une voie, qui est exigeante, mais c'est maintenant qu'il faut le faire », insiste le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR), à l'issue de ce travail collégial entamé mi-mai. « On a essayé d'équilibrer entre les entreprises, les retraités, les actifs. Que chacun puisse considérer qu'il est soumis au même régime d'effort… », témoigne la sénatrice centriste Elisabeth Doineau, rapporteure générale de la commission des Affaires sociales. Selon elle, « ce n'est pas la copie définitive » mais plutôt « des options ». Baisse des dépenses Alors que le gouvernement a estimé l'effort nécessaire à 40 milliards d'euros en 2026, les propositions sénatoriales aboutissent à une fourchette comprise entre 30 à 50 milliards d'euros. « Sur les presque 50 milliards, environ 45 milliards concernent la baisse de la dépense publique, ça ne s'est jamais fait », souligne Jean-François Husson. Le recours à la fiscalité se limite à un éventuel gel du barème de l'impôt sur le revenu, dans le cadre d'une « année blanche » si les baisses de dépenses ne suffisent pas, et à la pleine application du dispositif contre la fraude CumCum (1,5 à 2 milliards d'euros à la clé), prévu au budget 2025 et que les sénateurs jugent bridé par un texte d'application de Bercy. Tout le reste repose sur la baisse des dépenses, en premier lieu de l'Etat. A minima, le Sénat recommande le gel en valeur des crédits budgétaires - hors défense, charge de la dette et contribution à l'Union européenne -, qui produirait 10 milliards d'euros d'économies par rapport à l'évolution spontanée des dépenses. Chaque baisse de 1 % des crédits hors loi de programmation rapporterait 2,4 milliards d'euros supplémentaires. Non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux Sauf pour les Armées, le Sénat propose même de « réinterroger » les lois de programmation qui encadrent les budgets du ministère de l'Intérieur, de la Justice et de la Recherche. Au maximum, ramener les crédits au niveau du dernier budget avant Covid (soit celui de 2019), en tenant compte de l'inflation, rapporterait carrément 22 milliards d'euros (un objectif qui ne pourrait être atteint que progressivement). Pour réaliser des économies dans la durée, les sénateurs veulent aussi que l'Etat reprenne le contrôle de sa masse salariale, qui a grimpé de 6,7 % l'an passé. Ils remettent sur la table le principe du non-remplacement d'un fonctionnaire sur deux, mis en place sous le mandat de Nicolas Sarkozy puis abandonné sous François Hollande. La mesure rapporterait 500 millions d'euros l'an prochain. Ils réclament également l'harmonisation du régime des jours de carence dans la fonction publique (un jour actuellement) avec celui du privé (trois jours), avec 200 millions d'euros à la clé en 2026. La rationalisation des agences et opérateurs apporterait 540 millions d'euros d'économies sur leur fonctionnement, en suivant les recommandations du rapport de la sénatrice LR Christine Lavarde. « Année blanche » notamment sur les retraites. Les collectivités apporteraient un écot modeste au redressement des comptes, à hauteur d'un « maximum de 2 milliards d'euros », comme cette année. Celles-ci ne sont que « de manière anecdotique responsable de l'aggravation de la dette publique depuis 2019 », juge le Sénat, contrairement à la Cour des comptes. Les sénateurs voient en revanche de gros gains potentiels dans la lutte contre l'enchevêtrement des compétences entre Etat et collectivités. L'application des recommandations du rapport Ravignon rapporterait jusqu'à 7,5 milliards d'euros, éventuellement au bout de deux ans (3,8 milliards la première année). Une réforme des décrets tertiaires, dont le coût qui pèse sur les collectivités aurait atteint 3,3 milliards d'euros en 2023, permettrait de récupérer cette somme, potentiellement en deux ans. Enfin, la Sécurité sociale fournirait environ 10 milliards d'euros d'économies en 2026 dans le plan des sénateurs, notamment via une « année blanche » (non-indexation) des prestations sociales (5 milliards d'euros dont 3 milliards d'euros pour les retraites). L'Assurance Maladie apporterait aussi 5 milliards d'euros, par différentes mesures concernant entre autres la prise en charge des affections de longue durée, les médicaments et les dispositifs médicaux. Les assureurs santé pourraient se voir confier des missions de prévention, aujourd'hui assumées par la « Sécu ». Reste à savoir dans quelle mesure le gouvernement s'inspirera de ces nombreuses propositions.