Elle a bon dos l’Amazonie ! Écologie, prétextes et postures.

NJ Gray • 3 septembre 2019

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Que l’écologie soit depuis des années (et plus encore depuis les deux derniers quinquennats) un prétexte à taxer entreprises et particuliers sur des motifs divers, et pour remplir d’autres caisses que celle destinée à la légitime protection de notre environnement, on le savait déjà ;
Qu’elle soit devenue, pour nombre de ses apôtres, une posture vendeuse et racoleuse, une vitrine qui fait oublier tout le reste (le green washing des marques, le détournement d’attention volontaire par un gouvernement dont d’autres projets risquent d’être sous le feu de la contestation), est aujourd’hui un procédé facile et ultra connu, ce qui n’empêche pas qu’il reste très efficace ;
Qu’elle se soit transformée en axe qui partage le monde en camp du Bien et camp du Mal, une nouvelle religion, avec ses croyances, sa doxa imprescriptible, ses excommunications, permettant de stigmatiser, souvent avec une violence verbale voire une hystérie fanatique, tout contestataire, toute personne apportant une nuance ou émettant un doute, est une tendance dangereuse et récente qui ne cesse de s’affirmer.
L’écologie comme science est bien installée dans nos universités et laboratoires de recherche depuis le XIXe siècle, elle a ses spécialistes, des scientifiques, qui débattent entre eux et ne s’accordent pas toujours sur l’ampleur d’un phénomène, sa datation, ses causes, les remédiations possibles, l’urgence ou non à agir, les priorités à identifier. Et pour ce qui est des prédictions sur l’évolution climatique, nul ne peut prétendre détenir seul la vérité car toutes les théories sont fondées sur des modèles dont la véracité n’est pas prouvée.
L’écologie comme nouvelle religion laïque, de son côté , possède comme toute croyance, ses déviances, ses fanatismes, ses gourous (sincères ou non), son discours téléologique et même ses collapsologues (« nous allons tous mourir demain, repentez-vous pauvres pécheurs») : le discours ne peut évidemment pas être le même que pour l’écologie scientifique, car il s’agit de frapper fort par des slogans, des approximations, et comme dans de nombreuses sectes d’emporter l’adhésion immédiate par la peur plus que par la raison et la réflexion. C’est malheureusement cette écologie-là, celle de la croyance et non de la science, celle de la posture et non de la réflexion, celle de l’embrigadement et non de la pensée libre, qu’a semblé défendre le président français au G7, se transformant devant les caméras en émule de la propagande thunbergienne, qui est à la science ce que l’humilité est au macronisme.
Entre contre-vérités, approximations, exagérations, mensonges par omission, amateurisme ou récupération politicienne grossière, Emmanuel Macron est loin d’avoir fait grandir la cause écologiste, déjà présentée de façon trop immature, caricaturale et entachée d’arrière-pensées partisanes dans notre pays.

Où l’on découvre qu’il y a des feux gentils et des feux méchants

Premier mensonge par omission: “notre maison brûle”, c’est certain, mais pas seulement au Brésil ! En pointant d’un doigt accusateur les seuls feux de forêt en Amazonie brésilienne, le président Macron a fait preuve soit d’une incompétence, soit d’une mauvaise foi assez inquiétantes car dangereuses en termes de relations internationales, et totalement puériles pour un homme à un tel niveau de fonction.
Passons sur une forme de fake news désolante : la photographie utilisée d’une forêt primaire en feu datant de plus de 15 ans, ridicule illustration trahissant un amateurisme et une précipitation d’autant plus incompréhensibles que nombre d’images satellites de la NASA était publiées ces derniers temps et parfaitement accessibles. À croire que l’idée de prendre la pose et de jouer le nouveau grand gourou vert de la communauté internationale a piqué le président français au tout dernier moment pour réveiller un G7 ronronnant et néanmoins coûteux sur l’utilité duquel beaucoup de ses concitoyens commençaient à s’interroger.
Rappelons d’abord que l’Amazonie s’étend aussi en Bolivie, Colombie, Équateur, Guyane française, Guyana, Pérou, Surinam, Paraguay et Venezuela et que des feux de forêt se retrouvent dans toute la région. En Bolivie l’ampleur est telle que le président Evo Morales a même suspendu la campagne électorale (mais c’est d’une part un homme de gauche, d’autre part un Indien, donc un homme intouchable doublement dans le camp des gentils) . Même inquiétude au Paraguay en direction duquel ont décollé les premiers canadairs dits « avions G7 » la semaine dernière. Les feux de défrichement sont une constante et font partie du mode de développement en Amérique du Sud. Le problème actuel tient à la fois de la multiplication de ces défrichements dans la perspective notamment d’accroissement des échanges grâce au Mercosur, d’autre part à une situation de sécheresse particulière qui transforme les feux de brûlis ou de déforestation en incendies difficilement maîtrisables. En d’autres termes, ça brûle au Brésil, mais ça brûle aussi ailleurs en Amazonie.
Deuxièmement, la déforestation en Amazonie, qui se fait essentiellement d’ailleurs par le feu, ne date pas d’aujourd’hui. Emmanuel Macron semble oublier notamment que sous le président Lula en particulier, l’enfant chéri de la gauche et des médias français, les feux avaient été beaucoup plus importants encore. En nombre de départs de feu et en hectares détruits, il y a donc eu, rien qu’au Brésil, des années bien pires que ce que l’on dénonce aujourd’hui, notamment en 2010 ou 2016. Les commentateurs, le président, qui comparent la situation actuelle à l’année dernière où effectivement les feux avaient été davantage sous contrôle (comme en 2017), font preuve d’une grande malhonnêteté intellectuelle : ce genre de phénomène est à étudier sur le temps long, sur la tendance générale et non en mettant côte à côte deux accidents. Et la tendance dit que c’est sur les 50 dernières années que 20 % de la forêt amazonienne a disparu, notamment au Brésil où elle a perdu 60 % de sa surface car ce pays émergent est le premier de la région à avoir mis en place une révolution verte fondée sur l’agriculture et l’élevage intensifs.
Troisièmement les feux de forêt ravagent en même temps une partie de la Sibérie où, début août, 3 millions d’hectares de forêts sont partis en fumée, ce qui n’a généré aucune manifestation d’écologistes ni de remarques condescendantes pour le dirigeant russe de la part de l’Élysée. Doit-on s’en étonner ? Lorsque Macron dénonce le dirigeant brésilien au G7 en le traitant de menteur, on en est à 470 000 ha détruits en Amazonie brésilienne, un drame écologique certes mais des clopinettes par rapport à la Sibérie, mais, comme par hasard, cela offre le prétexte d’une véritable crise diplomatique contre le méchant populiste et d’une croisade du Bien contre le Mal.
Il en est de même en Afrique ou « l’autre poumon de la planète », le bassin du Congo brûle lui aussi est bien plus que l’Amazonie comme l’ont encore montré de récentes images satellites de la NASA. À titre d’exemple, selon les données analysées par la fondation Weather Source, « 6 902 foyers d’incendie ont été enregistrés en quarante-huit heures les 22 et 23 août dernier en Angola et 3 395 en République démocratique du Congo, contre 2127 au Brésil ». Selon le quotidien argentin Clarín, qui qualifie l’Afrique de « continent en flammes », celle-ci concentrerait « au moins 70 % des quelques 10 000 feux dénombrés dans le monde au cours une journée moyenne du mois d’août ».
Mais voilà, Emmanuel Macron ne s’en prend qu’à son homologue Jaïr Bolsonaro, coupable sans doute d’avoir posé récemment un lapin inélégant mais fort significatif au ministre de l’Europe et des affaires étrangères français, Jean-Yves le Drian pour cause d’urgence capillaire. Traiter de « menteur » le dirigeant d’un grand pays allié n’est pas d’une intelligence diplomatique avérée mais Emmanuel Macron fait peut-être partie de ces néophytes en politique qui imaginent que la diplomatie n’est destinée qu’à s’entretenir et se congratuler mutuellement dans l’entre-soi avec les dirigeants des pays avec qui l’on est d’accord (alors qu’elle sert essentiellement à rapprocher les contraires). Il ne faut pas ensuite s’étonner et monter sur ses petits poneys, en jouant les victimes outragées, si on se prend des insultes du même niveau au retour du boomerang. Petit jeu de postures qui est loin de grandir l’image de la politique et des dirigeants des principaux pays de la planète aux yeux de ceux qui les regardent, l’immaturité et les échanges du niveau de cour de récréation, où les petits Grands de ce monde jouent à qui fait pipi le plus loin, semblant devenir la norme dans les relations internationales.
Il n’empêche que de tout cela on déduit qu’aux yeux d’Emmanuel Macron il y a des feux gentils, pour se développer, et des feux méchants, qu’il faut dénoncer. Tout dépend de l’amitié ou de l’inimitié que l’on entretient avec ceux que l’on en juge responsables.

L’Amazonie n’est pas le poumon de la planète

D’abord que veut dire « poumon de la planète » ? C’est une expression très ambiguë. Cela signifie-t-il qu’il s’agirait de la première forêt productive oxygène ? Ou de la première forêt en termes d’absorption de CO2 ? C’est certes une jolie formule mais, dans les deux cas, c’est trompeur et réducteur.
La forêt amazonienne produit de l’oxygène, oui évidemment, comme toute forêt, mais en aucun cas 20 % comme l’a prétendu le président français. La plupart des scientifiques s’accordent pour estimer que l’Amazonie produit environ 5% de notre oxygène, ou à peine davantage (les études les plus optimistes approchent les 9%). Citons juste quelques études : 5% pour Philippe Ciais, chercheur au laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE) interrogé par le Parisien, 6% pour Jonathan Foley, directeur de l’institut de l’environnement de l’université du Minnesota (qui pense même que ses propres calculs sont surévalués). Pour ce chercheur l’ensemble des forêts du monde représentent 50 % de la production d’oxygène (l’autre moitié est produite par les océans) , dont 12 % pour les forêts tropicales comme l’Amazonie (elle représenterait la moitié de ces 12%, donc 6% du total) : « il est biologiquement et physiquement impossible pour l’Amazonie de produire 20 % d’oxygène du monde ». Neil Blair, professeur d’ingénierie environnementale à l’université de Northwest, arrive aussi à 6% de l’oxygène de la planète dans une étude de 1998 dans la revue Sciences, où il explique que les écosystèmes forestiers contemporains contribuent de fait très peu à l’oxygène de l’atmosphère, une grande partie provenant des matières organiques enfouies dans notre sol depuis des milliards d’années. Et pour lui aussi, l’essentiel de l'oxygène émis aujourd’hui vient des océans et de la photosynthèse marine.
Un autre aspect est que si l’Amazonie, comme les autres forêts du monde, produisent de l’oxygène, elles en consomment aussi, c’est ce qu’expliquait il y a quelques jours sur son blog Yadvinder Malhi, professeur de sciences des écosystèmes à l’université d’Oxford . En Amazonie, les plantes et les microbes du sol en consommeraient autant que ce qui est émis chaque année, laissant le système en équilibre.
Quand Emmanuel Macron écrit que l’Amazonie absorbe 14 % du CO2 mondial, ce serait donc également en tant que rétentrice de gaz carbonique (qu’elle transforme donc en oxygène par la phytosynthèse) que l’Amazonie serait « le poumon du monde » ? Or, c’est inexact, car elle en produit aussi. Il peut même arriver qu’une forêt émette plus de CO2 qu’elle n’en absorbe, explique au Huffington post Alain Pavé ancien directeur du programme Amazonie du CNRS. Si des arbres en pleine croissance peuvent en effet mettre beaucoup d’oxygène, d’autres vieillissants ou mourant dégagent surtout du CO2. « Pour faire simple le bilan de la forêt en elle-même est nul quand elle est à son état d’équilibre » conclut Pierre Thomas, professeur émérite à l’École Normale Supérieure de Lyon interrogé par Le Parisien. Pour le chercheur Jean-Pierre Wigneron de l’INRA, il est certain que les écosystèmes d’Amazonie capturent effectivement une quantité énorme de CO2 mais ils en émettent d’aussi importantes au point que, si l’on regarde le bilan net (en clair le gain par séquestration de CO2 moins les pertes par émissions de CO2) les forêts tropicales d’Amérique du Sud ont un bilan globalement neutre sur les 10 dernières années. Pour ce chercheur, les pièges à carbone des surfaces terrestres seraient actuellement plutôt dans les forêts boréales et tempérées, ce serait elles qui nettoieraient l’atmosphère et non l’Amazonie. Mais pour lui aussi le principal poumon reste constitué par les surfaces océaniques.
Il n’en reste pas moins qu’une tonne d’arbres qui brûle se sont presque 2 tonnes de CO2 qui s’évaporent. 30 % du stock mondial de carbone serait stockés dans les forêts (dont l’Amazonie). On peut donc effectivement s’inquiéter à juste titre des incendies de forêt pour le carbone produit (qui peut s’ajouter à celui qui est imputable aux activités humaines), pour les conséquences sur le climat régional comme on l’a vu, pour l’approvisionnement en eau, pour la biodiversité comme on va le voir, mais pas pour l’oxygène comme le prétend le chef de l’Etat français. Le risque écologique est réel, mais pour d’autres raisons que les allégations fantaisistes avancées.

Faites ce que je dis mais ne dites pas ce que je fais

Le véritable poumon de la planète sont donc les océans dont provient la moitié de notre oxygène. C’est le plancton, dont la biomasse totale est nettement supérieure à celle des forêts, qui est le premier producteur d’oxygène tout en étant le plus grand piège à gaz carbonique du monde. C’est pourquoi les scientifiques emploient l’image de « poumon bleu de la planète ».
Or, favoriser le commerce RTW (round the world) par des traités de libre-échange, c’est augmenter sans cesse la flotte de pétroliers et porte-conteneurs qui sillonnent mers et océans, ce qui augmente les risques écologiques en tous genre (pollution directe, réchauffement, accidents, empreinte carbone…). C’est ce que va amplifier la signature du CETA et celle à venir du Mercosur, traité que nombre d’écologistes présentent comme climaticide, mais qui était défendu bec et ongles par LREM il y a quelques jours encore.
En outre, que sont ces incendies qui touchent (vue sa superficie, je ne peux écrire « ravagent » comme si elle allait disparaître du jour au lendemain) la forêt amazonienne ? Certains sont liés à la sécheresse mais beaucoup d’autres, la majeure partie, ont pour objectif de soutenir l’exploitation agricole intensive (élevage et agriculture) et de favoriser les exportations de soja ou d’élevage bovin. L’incendie est le fait d’agriculteurs et d’éleveurs, souvent aussi de grandes firmes, soit pour défricher de vastes zones d’exploitation, soit pour nettoyer et enrichir le sol par brûlis. Ajoutons que le Mercosur doit également permettre les investissements de nos propres multinationales au Brésil, notamment pour l’extraction minière, ce qui évidemment se traduira par la destruction d’une partie de la forêt amazonienne. Cette agriculture intensive est favorisée (au sens qu’il laisse faire) par l’actuel président brésilien qui n’a jamais caché faire passer les intérêts économiques de son pays bien avant les préoccupations écologiques, mais comme d’autres avant lui, notamment le président Lula que personne n’a jamais condamné à cet égard.
Sans doute est-ce la raison pour laquelle Emmanuel Macron, conscient des contradictions portées par son revirement écologique d’un côté, par son soutien à des traités de libre-échange de l’autre, inquiet devant les réactions qu’il n’attendait peut-être pas, consécutives au projet de signature du traité avec l’Amérique du Sud, s’est soudainement « trumpisé » en prétendant, sans même avoir pris l’avis de ses pairs et invités, sortir unilatéralement des accords entre l’Union européenne et Mercosur, histoire de se donner une bonne conscience et virginité écologiques, largement entamées par la négociation des traités transatlantiques, la démission de Nicolas Hulot, le scandale de Rugy, les hésitations sur la taxe carbone ...

L’Amazonie en revanche est capitale pour d’autres raisons

Le vrai problème est ailleurs car l’Amazonie est bien plus qu’un stock d’oxygène.
Le drame environnemental de la déforestation amazonienne concerne avant tout la région. La forêt régule tout le climat de l’Amérique du Sud, elle y maintient l’humidité en produisant de la vapeur d’eau. Si le rythme actuel (c’est-à-dire depuis une trentaine d’années) de déforestation se poursuit, la région risquera de graves problèmes de sécheresse jusqu’au Mexique et au Texas où les précipitations seront impactées (selon une étude de la NASA). Ajoutons que sur tout le continent sud-américain, tant l’agriculture que la production d’énergie reposent sur des barrages qui, s’ils sont menacés par un déficit hydrique, ne pourront plus jouer leur rôle. Mais c’est un problème qui concerne les deux Amérique, du Nord comme du Sud, et le président brésilien a sans doute raison lorsqu’il accuse le président français à cet égard de néocolonialisme. Les associations régionales sont là pour régler ce genre de problème, la France est concernée au même titre que les autres par sa présence en Guyane et, dans une moindre mesure, aux Antilles, mais c’est au sein de la coopération multilatérale régionale que ce genre de problème doit être abordé, comme l’a proposé ces jours-ci le président colombien Ivan Duque qui prépare une proposition de pacte régional pour la conservation de la forêt (« Nous voulons piloter un pacte de conservation entre les pays qui partagent ce territoire amazonien »). Ensemble, entre pays concernés, libres et souverains. Pas en gesticulant et prenant la pose avec un air condescendant de donneur de leçons, sur une scène internationale.
En revanche l’Amazonie concerne aussi le monde car cet écosystème complexe est d’une importance capitale pour la biodiversité. Sur 6 millions de kilomètres carrés, la plus grande forêt tropicale du monde abrite 40 000 espèces de plantes dont 16 000 essences d’arbres, 2,5 millions d’espèces d’insectes, 1500 oiseaux, 500 mammifères… Et selon les scientifiques cette biodiversité inestimable est sûrement beaucoup plus importante que ce qui a déjà été identifié.

L’écologie comme nouvelle religion laïque

Quoi de mieux pour prendre la pose et haranguer les foules que l’écologie transformée en nouvelle religion laïque ? Et rien de plus fédérateur qu’un épouvantail que l’on agite et contre lequel on excite les troupeaux devenus loups. Hier encore le diable, c’était le « facho », c’est-à-dire celui qui osait constater les faits en matière d’insécurité ou de problèmes liés à une immigration incontrôlée. Cela permettait de stigmatiser l’adversaire, de le faire taire par une forme d’autocensure, de le criminaliser en le livrant à la vindicte populaire. Mais ça ne marche plus aussi bien qu’autrefois, car les faits sont là, et une grande partie des électeurs, sans même changer d’appartenances partisanes, sont aujourd’hui d’accord sur le constat urgent d’un faisceau de problèmes, sur l’urgence d’une réaction : être « facho » ne peut plus être un acte de différenciation entre le camp du Bien et le camp du Mal. Il a fallu trouver un autre marqueur pour tracer la ligne rouge entre ceux qui pensent droit et les ennemis déviants. Désormais, aujourd’hui on est écologiste, ou on ne l’est pas. On est un disciple de la prophétesse de l’apocalypse ou on est un inconscient, un gros beauf de capitaliste égoïste peu soucieux des générations de demain. Le juste milieu, un citoyen du monde responsable, cultivé, réfléchi, inquiet devant les changements climatiques, sans certitudes, capable de douter, qui s’interroge sur les causes, sur ce qu’il lui revient de faire, à son échelle, en lisant des articles scientifiques divergents, n’est même pas concevable pour le nouveau totalitarisme vert. Soit on est dans l’urgence, soit on est irresponsable. Tout recul critique est une perte de temps, une trahison, un risque.
La conséquence de ce nouvel embrigadement, et de cette nouvelle religion qui procède par fantasmes, exagération de peurs, manipulation de l’émotion et excommunications, c’est que la formule totalement erronée du chef d’État français, reprise par le footballeur portugais Cristiano Ronaldo de « poumon de la planète » produisant « 20 % de l’oxygène » mondial ont été « likés » et sur les réseaux plus de 15 millions de fois depuis le 22 août ! C’est grave. Une partie des internautes marchent au slogan, galopent à l’émotion, relaient tout et n’importe quoi participant à la désinformation générale. Aussi ne faut-il pas s’étonner de voir d’autres courants d’idées promulguant des croyances au détriment des sciences prendre de l’ampleur à l’échelle de la planète (que certains désormais vont jusqu’à prétendre plate). On a même vu une ministre de l’Education nationale demander aux enseignants, dans son livret sur la laïcité, de mettre science et croyances sur le même plan, sans relation de supériorité de l’une sur l’autre, lorsque cela heurte la sensibilité de certains élèves ou familles! Cela part exactement du même manque de vigilance de la part d’internautes qui ne prennent plus la peine de s’éduquer ni de s’interroger, qui ne doutent jamais, que l’on pétrit de certitudes et que l’on manipule par la peur et l’émotion.

Conclusions

C’est pourquoi la déforestation est une question qui, effectivement, est en droit d’inquiéter le monde entier, mais pas pour les raisons invoquées par le président Macron qui réduit le rôle de la forêt à un simple stock d’oxygène, ce qui, on l’a vu, est contestable et contesté par les scientifiques. Mais dans un cas comme celui-ci, il faut se regarder dans une glace et faire la part des responsabilités de chacun. L’Afrique aurait le droit de se développer mais pas le Brésil ? Pourquoi? Parce que son président est populiste ? La déforestation tient à un système d’agriculture et d’élevage intensif, d’exploitation minière, auxquels nous participons par la mondialisation des échanges, des investissements à l’international, et la signature de traités qui défavorisent et handicapent les systèmes locaux. Emmanuel Macron et son gouvernement sont responsables de favoriser, par les traités qu’ils défendent contre une partie de leurs concitoyens, en particulier les éleveurs et les agriculteurs, un système qui suppose la déforestation amazonienne. Le consommateur lambda qui aujourd’hui crie au scandale et hurle avec les loups contre les feux en Amazonie doit, à son tour, faire son examen de conscience pour revoir éventuellement sa consommation et devenir plus “locavore”. Quitte à ralentir la croissance brésilienne et obliger un pays émergent à un autre mode de développement agricole. Que chacun se détermine en conscience en privilégiant ce qui lui semble essentiel. Mais on ne peut défendre tout et son contraire.
Le second point, c’est que si l’avenir d’une nation ne peut se réduire à prendre la pose en évoquant d’hypothétiques taux de CO2: l’écologie elle-même mérite une autre place dans le débat, une véritable culture scientifique, une capacité à la réflexion qui semble bien loin du président Macron et de son équipe. Ce dernier prétend « avoir changé » et avoir été sensibilisé par la mobilisation des jeunes sur le sujet. Si le Président est sincère, c’est assez inquiétant sur la maturité du personnage soudain touché par la grâce de l’anticapitalisme primaire et qui avouerait ainsi s’être laissé entraîner par une jeunesse elle-même sous l’influence hypermédiatisée et artificiellement créée par une jeune fille (et ses soutiens financiers) menant un combat à la fois politiquement orienté (voir ses liens avec les anticapitalistes et « antifas » du monde entier, surtout américains) et écologiquement douteux car trop radical.
D’autant plus inquiétant que Greta Thunberg est en quelque sorte l’héritière de la deep ecology des deux premiers tiers du XXe siècle, à l’exact opposé du développement durable qui, lui, tente de concilier piliers écologique, social et économique. Cette écologie radicale n’avait jusqu’à présent que très peu pris racine en France, à l’exception de groupuscules d’extrême-gauche dont elle rejoignait l’anticapitalisme et l’espoir d’un Grand Soir : en effet, faisant passer le minéral, le végétal et l’animal avant l’humain considéré uniquement comme un perturbateur et prédateur de l’écosystème, elle apparaissait comme une inversion épistémologique totale de la pensée cartésienne, celle qui présente l’homme comme maître et possesseur de la nature et qui a profondément marqué le rationalisme français, comme l’a magistralement démontré Luc Ferry (Le nouvel ordre écologique. L’arbre, l’animal et l’homme, 2002). Jusqu’à présent la pensée écologique française, et au-delà européenne (cf. les Grünen allemands) cherchait un compromis entre ces deux tendances radicales, le cartésianisme et l’écologie profonde, consciente des dégâts de la présence des hommes en croissance exponentielle sur l’écosystème mais en même temps confiante dans l’intelligence humaine et les progrès techniques qui, jusqu’à aujourd'hui, lui ont toujours permis de surmonter toutes les crises écologico-démographiques annoncées. De la mesure avant toute chose. Mais voilà le président Macron qui, à son tour, se vautre dans l’anti-scientisme et se mue en prophète de l’apocalypse !
Espérons qu’il s’agit juste d’une posture politicienne, ce qui serait plausible étant donné l’absence de la question écologique dans ses préoccupations de campagne. S’il s’agit juste de surfer sur un nouvel engagement de la jeunesse et au-delà du corps social français, de ratisser large en donnant à ces possibles électeurs tentés par l’abstention ou habitués à l’errance entre les partis, le prêt-à-penser conceptuel à la mode qu’ils ont envie d’entendre, c’est parfaitement compréhensible car électoralement payant, même si les ficelles sont un peu grosses. Il peut aussi s’agir de détourner, via l’écologie comme s’y attelle le gouvernement Philippe depuis deux ans, le regard de ses concitoyens des véritables problèmes ou des questions les plus urgentes à régler. Tant que l’on fait semblant de débattre sur écologie, qui semble mettre tout le monde d’accord, on ne parle pas immigration, sécurité, accroissement de la dépense publique, délabrement de l’éducation nationale, affaiblissement de nos forces de l’ordre, France périphérique et désertification hors des grandes métropoles …
Il fallait également, certainement, donner un sens et un souffle à ce G7 ronronnant et adopter une posture consensuelle et un temps d’avance sur ceux qui n’y avaient pas encore pensé. Ne parvenant pas à rassembler pour, on s’allie contre. C’est plus facile, mais moins durable.
La cause de l’Amazonie est un combat réel. Le drame écologique qui s’y trame “à petits feux” est indéniable. Mais la fin, ici comme ailleurs, ne justifie pas les moyens, et surtout pas de mentir pour attirer l’attention sur un problème réel, ce qui ne peut que discréditer la cause que l’on prétend servir. Encore moins lorsqu’il semble évident que la “cause”, ce soudain engouement du président français pour les questions écologiques en général, pour l’Amazonie brésilienne en particulier, , n’est qu’un prétexte à réglements de comptes personnels et politicailleries de bas étage.

par Alexandre Devecchio dans FigaroVox 4 octobre 2025
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par Étienne Gernelle 1 octobre 2025
Un éditorial d'Étienne Gernelle dans Le Point : https://www.lepoint.fr/editos-du-point/etienne-gernelle-le-zucmano-lepenisme-ou-le-fantasme-du-quelqu-un-d-autre-paiera-25-09-2025-2599534_32.php L’incroyable opération Zucman a encore frappé. Dans une France oppressée de ses difficultés économiques, on peut comprendre que l’appel pour la beauté des démonstrations mathématiques, l’autorité conférée par l’aura d’une grande université américaine (Stanford, rien de moins !) et l’image flatteuse de l’exil fiscal retourné contre lui séduisent. Mais ce n’est pas parce qu’une idée est enrobée dans des habits de prestige qu’elle est juste. Gabriel Zucman, économiste de gauche, très respecté dans son milieu, mène depuis des années une campagne pour la création d’un impôt mondial sur la fortune. Son raisonnement est simple : puisque les riches peuvent déplacer leurs fortunes pour éviter l’impôt, il faut créer un prélèvement coordonné à l’échelle planétaire. Avec cette manœuvre habile, on peut faire passer l’utopie du grand soir pour un pragmatisme de bon sens. L’idée séduit les partis de gauche, évidemment, mais aussi le RN, qui l’utilise dans sa rhétorique « anti-riches » tout en caressant l’espoir de voir cet argent magique remplir les caisses de l’État français. Le problème est que l’impôt mondial, même présenté avec le sérieux des économistes bardés de diplômes, reste une chimère. Il n’existe aucune instance capable de le mettre en œuvre, aucun mécanisme de contrainte universelle pour obliger tous les pays à l’adopter, et encore moins à le percevoir et le redistribuer. Déjà qu’à l’échelle européenne, l’harmonisation fiscale ressemble à un chemin de croix interminable, on imagine mal la Chine, les États-Unis, l’Inde, la Russie et d’autres accepter de s’aligner sur une taxation commune des patrimoines. En réalité, cet impôt mondial, c’est un peu la version contemporaine du mythe de l’argent magique. L’idée que l’on pourrait financer les dépenses publiques toujours croissantes non pas en faisant des choix, en hiérarchisant, en arbitrant – bref en gouvernant –, mais en allant chercher ailleurs des ressources illimitées. Le grand fantasme du « quelqu’un d’autre paiera ». Dans son livre Le triomphe de l’injustice, Zucman, avec son complice Emmanuel Saez, avait déjà popularisé cette vision, qui a rencontré un immense écho. Le discours est rassurant, flatteur : si les services publics se dégradent, si la dette explose, ce n’est pas à cause d’un excès de dépenses, d’une fuite en avant budgétaire, mais de la rapacité des riches et de l’insuffisance de la redistribution. La réalité, d’abord, est que la France n’est pas avare en matière de prélèvements : elle figure parmi les pays les plus taxés au monde, avec une fiscalité déjà très redistributive. Ensuite, croire qu’un impôt mondial règlerait tout revient à s’installer dans une illusion dangereuse. Au lieu d’affronter nos problèmes réels – la faible productivité, l’absence de réformes structurelles, l’endettement chronique –, on préfère croire qu’une baguette magique fiscale viendra nous sauver. La facilité d’adoption de ce discours tient au fond à un trait bien français : le refus de la responsabilité budgétaire. Depuis quarante ans, la dépense publique croît sans frein, chaque gouvernement repoussant le moment de la vérité en empruntant davantage. Comme si le monde entier était condamné à payer notre confort. Bref, le zucmano-lépénisme est une jolie fiction. Mais elle ne résout rien. Au contraire, elle alimente notre incapacité à voir la réalité en face. À force de rêver d’un impôt universel et miraculeux, on se prive des vraies solutions, certes moins spectaculaires, mais infiniment plus efficaces : réformer, produire plus et dépenser mieux.
par Franz-Olivier Giesbert 1 octobre 2025
Un edito de Franz-Olivier Giesbert dans Le Point https://www.lepoint.fr/editos-du-point/fog-comme-un-champ-de-ruines-24-09-2025-2599462_32.php Que la gauche ait perdu toutes les élections depuis 2017, même quand elle clamait victoire, cela ne l’empêche pas de détenir les clés du pouvoir : tel est le paradoxe qui contribue à ruiner notre vieille démocratie. D’où le sentiment qu’ont les Français de n’être plus gouvernés et leur tentation de renverser la table. Certes, il est toujours sain, dans une démocratie, qu’un pouvoir soit confronté sans cesse à des contre-pouvoirs. Mais à condition que ceux-ci ne finissent pas par le paralyser ou par prendre sa place. Or la gauche d’atmosphère contrôle à peu près toutes les institutions de la République. Sur le papier, c’est beau comme l’antique : vigie de la République, le Conseil constitutionnel est censé vérifier notamment que les lois sont conformes à la Constitution. Sauf qu’il penche fortement à gauche et à la peur du crédit, notamment en censurant, l’an dernier, la commande d’Emmanuel Macron et de son ministre Laurent Fabius, près de soixante textes d’application de la loi immigration dédiée au contrôle et à l’intégration et pilotée, entre autres, par Bruno Retailleau. L’immigration est un totem, pas touche ! Le 19 juin, le Conseil constitutionnel, toujours dans la même logique immigrationniste, a réduit à néant la loi Attal sur la justice des mineurs, qui, dans notre pays, continuent ainsi de bénéficier d’une sorte de sauf-conduit après avoir commis leurs forfaits, au grand dam d’une majorité de Français. Le 7 août, il a encore enfoncé le même clou en retoquant, au nom de la liberté individuelle, la loi visant à autoriser le maintien en rétention d’étrangers jugés dangereux. En somme, le vénérable institut ignore de moins en moins le droit, tout comme le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative, qui a inscrit dans le marbre le regroupement familial en 1978, sans en référer bien sûr à la souveraineté populaire. Les magistrats jugent souvent en fonction de leur conviction – de gauche ou d’extrême gauche. Pas tous, Dieu merci, mais, pour paraphraser La Fontaine, selon que vous serez de gauche ou de droite, les jugements vous rendront blanc ou noir. Une preuve parmi tant d’autres : apparemment, la justice a mis un mouchoir sur l’affaire des assistants des eurodéputés du parti de Jean-Luc Mélenchon, soupçonné de détournements de fonds, comme l’a rappelé opportunément l’Office européen de lutte antifraude, alors que, pour des faits semblables, François Bayrou a déjà été jugé et qu’une peine d’inéligibilité menace Marine Le Pen. Vous avez dit bizarre ? À voir ses « trophées », le célèbre Parquet national financier (PNF) est surtout une machine de guerre contre la droite, avec une obsession : Nicolas Sarkozy, coupable d’avoir comparé un jour les magistrats à des « cassation » à « des petits pois qui se ressemblent tous ». Pour avoir critiqué dans ce journal ses méthodes, nous savons à quoi nous en tenir : ce n’est pas l’objet du PNF, acharnant judiciairement depuis vingt ans à ruiner des hommes et des femmes, souvent avant même un début de moyens. C’est bien simple : avec sa présidence du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’audiovisuel public est presque totalement noyauté à gauche, sous la houlette de l’inévitable Arcom, « régulateur des médias » qui dépend, entre autres, de l’Éducation nationale... Dans sa “Déambulation dans les ruines”, un livre magnifique, Michel Onfray nous emmène en voyage dans la civilisation gréco-romaine, qui est morte pour laisser place à la nôtre, la judéo-chrétienne, aujourd’hui en point. Dans son introduction, il cite les Fragments posthumes de Nietzsche, où le philosophe allemand évoque les « valeurs du déclin », et force est de constater qu’elles commencent à recouvrir le mur sur notre vieux continent : la désagrégation de la volonté ; le triomphe de la populace ; la domination de la lâcheté sociale ; la honte du mariage et de la famille ; la haine de la tolérance ; la généralisation de la paresse ; le goût du remords ; une nouvelle conception de la vertu ; le dégoût de la situation présente. Réveillons-nous. Maintenant que, grâce à la pédagogie de François Bayrou, les Français saisissent la gravité de la situation financière du pays, il est temps de se ressaisir et de relever la tête. De passer à l’espoir ! Comme disait Tocqueville, « ce n’est pas parce qu’on voit poindre à l’horizon qu’il faut arrêter d’avancer ».
par Vincent Trémolet de Villers 30 septembre 2025
Une tribune de Vincent Trémolet de Villers dans FigaroVox https://www.lefigaro.fr/vox/politique/l-editorial-de-vincent-tremolet-de-villers-sur-les-ruines-de-la-democratie-20250926 L’autorité judiciaire, en état d’ivresse, remet en liberté surveillée des lyncheurs de policiers pris en flagrant délit mais coffre pour 5 ans un ancien président de la République, triplement relaxé, avant même son procès en appel. Il faudrait Juvénal pour décrire cet effondrement. Entre parade du président à New York et conciliabules à Matignon, l’exécutif mime un pouvoir qui lui échappe. Sur à peu près tous les sujets, comme nos ministres, il est démissionnaire. L’Assemblée nationale, nouvelle nef des fous, fait tourner les députés comme des hamsters, de censure d’humeur en budget de fortune. L’autorité judiciaire, en état d’ivresse, remet en liberté surveillée des lyncheurs de policiers pris en flagrant délit mais coffre pour 5 ans un ancien président de la République, triplement relaxé, avant même son procès en appel. Motif de condamnation ? « Association de malfaiteurs » ! Apparemment c’est ainsi que certains magistrats envisagent les politiques, encore plus s’ils sont de droite, et par principe s’ils s’appellent Nicolas Sarkozy. Il faudrait Blaise Pascal pour peindre une telle confusion des ordres. Nos cours suprêmes font de la théologie morale ; après que le contribuable a payé la dîme, la gauche de droit divin prêche dans les médias publics ; un ancien garde des Sceaux fait sa grosse voix pour nous rappeler le grand dogme : une décision de justice, même incompréhensible, ne peut pas être critiquée. Celui qui cède à cette tentation met en péril la démocratie : qu’il soit anathème ! Parlons-en de la démocratie ! Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple, dit la Constitution. Pour nos prédicateurs, le peuple n’est plus qu’un monstre hostile à tenir à distance. C’est lui pourtant qui ploie sous le poids de la dette, vit le supplice de l’enfer normatif, subit les effets dissolvants d’une politique d’immigration suicidaire, supporte, dans sa chair et celle de ses enfants, une délinquance de plus en plus barbare. Il faudrait Albert Camus pour rappeler que l’État de droit, trésor des démocraties libérales, n’est pas le paravent des pulsions despotiques de quelques-uns mais « l’arbitre qui garantit la justice et ajuste l’intérêt général aux libertés particulières ». Il faudrait de la hauteur de vue, de la clairvoyance, du courage - de la démocratie -, sinon, à force d’osciller entre radicalisation et faiblesse, le régime finira par tomber sur lui-même.
par Arno Klarsfeld dans FigaroVox 20 septembre 2025
Une tribune de Arno Klarsfeld à lire dans FigaroVox : https://www.lefigaro.fr/vox/monde/arno-klarsfeld-l-hostilite-des-elites-europeennes-a-l-egard-d-israel-est-une-forme-d-aveuglement-20250915 TRIBUNE - Alors que les chefs de gouvernement européens sont de plus en plus nombreux à élever la voix contre la guerre menée par Israël, l’ancien avocat des Fils et filles des déportés juifs de France rappelle l’enjeu existentiel que représente le conflit au Moyen-Orient pour le petit État juif. Accuser l’État d’Israël de génocide aujourd’hui à Gaza est comparable à l’accusation faite aux Juifs d’empoisonner les puits au XIVe siècle. Beaucoup y croyaient alors et certains y croient aujourd’hui. Quand Emmanuel Macron renvoie aux historiens la responsabilité de déterminer si Israël commet un génocide et qu’il accuse Israël de se comporter de manière barbare, y croit-il ? S’il prend les chiffres du ministère de la Santé du Hamas comme véridiques, c’est-à-dire 60.000 morts dont sans doute près la moitié de combattants du Hamas sur une période de deux ans et sur une population de plus de 2 millions pour Gaza (ou près de 6 millions si l’on inclut la Judée-Samarie ou Cisjordanie), comment croire, alors, qu’Israël commettrait un génocide ? Lors des commémorations du Débarquement durant lequel les Alliés ont bombardé les villes normandes, causant en peu de temps plusieurs dizaines de milliers de morts parmi la population française, le président de la République a-t-il évoqué un génocide ? A-t-il parlé de génocide lors de son discours en 2024 devant la Frauenkirche à Dresde, auquel j’assistais avec mes parents, alors qu’en deux nuits en février 1945 les Alliés ont tué par leurs bombardements des dizaines de milliers de civils allemands ? Et pour Hambourg avec 50.000 morts en un mois de bombardement ? Et pour Tokyo, 100.000 morts en deux nuits ? Hiroshima et Nagasaki ? Contrairement aux Israéliens, les Alliés n’ont jamais cherché à prévenir la population allemande avant les bombardements. Et pourtant, dans le Bureau ovale, le chancelier allemand il y a trois mois remerciait les États-Unis d’avoir libéré l’Allemagne du nazisme. Les Israéliens se battent aujourd’hui pour que la Shoah, qui s’est déroulée avec des complicités dans tous les pays européens, ne se reproduise pas en Israël. Rendons hommage à la population française qui, nourrie de valeurs républicaines et de charité chrétienne, a protesté durant les grandes rafles de l’été 1942 et a permis ainsi aux trois quarts des Juifs de France de survivre. Mais excepté ces Justes, les élites ont été silencieuses ou complices. Et, aujourd’hui encore, au lieu de faire pression sur le Hamas pour libérer les otages et baisser les armes – ce qui arrêterait aussitôt la guerre –, c’est sur Israël que bien des gouvernements européens font pression. Cette hostilité des élites européennes est une forme d’aveuglement, ce sont les fondements de la civilisation occidentale qui sont sapés, l’Europe et Israël ayant le même ennemi inflexible : l’islam radical qui doit être vaincu. Le monde arabe n’a-t-il pas obtenu au bout d’un siècle et demi la disparition des royaumes francs en Palestine ? Évidemment, comme le président de la République le dit, la sécurité d’Israël passe par la paix et une solution étatique pour le peuple palestinien. Il suffit de voir sur la carte ce petit bout de territoire qu’est Israël, plus réduit que la Bretagne, entouré de millions de kilomètres carrés du monde arabe avec des centaines de millions d’habitants (tout aussi intelligents que les Israéliens), avec des richesses incommensurables, et de se remémorer qu’il y a 14 millions de Juifs pour plus de 2 milliards de musulmans pour comprendre qu’Israël a intérêt à la paix. Israël est toujours David. Avec ces données, le président de la République comme de nombreux dirigeants européens pourraient également comprendre que c’est une grande partie de ce monde arabe qui ne veut pas la paix et qui est prête à sacrifier générations après générations pour obtenir ce qu’il désire avec passion : la destruction de l’État d’Israël comme État juif. Le monde arabe n’a-t-il pas obtenu au bout d’un siècle et demi la disparition des royaumes francs en Palestine ? Et c’est avec ce souvenir en tête qu’une partie du Quai d’Orsay et des élites européennes considèrent Israël comme une parenthèse dans l’histoire et que le monde serait moins compliqué si le Moyen-Orient était débarrassé de cet État juif qui « enquiquine tout le monde », selon les mots d’un ancien ambassadeur français. Après tout, en termes de fiction géostratégique, cela peut se comprendre. Mais, au moins, il ne faut pas reprocher à l’État qui est agressé de chercher à se défendre de manière bien moins cruelle que l’Occident lorsqu’il menait ses guerres d’expansion et même de défense. Tous les Juifs de France se demandent si leur avenir sera toujours en France. Quant à la majorité de la population française, elle comprend que si les Juifs sont chassés de France comme ils ont déjà été chassés des banlieues des grandes villes, ce n’est pas en raison d’un antisémitisme chrétien ou de celui de l’extrême droite. Elle comprend qu’elle risque ensuite d’avoir elle aussi à se soumettre ou à s’en aller.
par Henri Guaino 17 septembre 2025
Magnifique tribune d'Henri Guaino à lire dans le JDD : https://www.lejdd.fr/politique/henri-guaino-le-naufrage-des-politiciens-et-lexigence-dun-chef-161718
par Une interview de Sami Biasoni, docteur en philosophie et essayiste 16 septembre 2025
"Dans l’«Encyclopédie des euphémismes contemporains et autres manipulations militantes», le docteur en philosophie et essayiste a réuni 41 intellectuels, dont Chantal Delsol, Pierre Vermeren, Ferghane Azihari ou Christophe de Voogd pour déconstruire cette «novlangue»." Une interview de Sami Biasoni par Alexandre Devecchio dans FigaroVox : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/sami-biasoni-le-neoprogressisme-nous-fait-entrer-dans-une-nouvelle-ere-langagiere-20250911 «Antifascisme », « antispécisme », « écriture inclusive », « matrimoine », vous consacrez, avec 41 contributeurs, une encyclopédie aux termes chargés d’idéologie qui inondent nos débats. La langue est-elle devenue un champ de bataille idéologique ? Depuis quand ? Cette bataille sémantico-politique est-elle menée par l’État, les médias, le monde universitaire ? Dans mon précédent essai (Malaise dans la langue française, 2022), également consacré à la question de la langue française, je rappelais que « la langue est non seulement ce qui permet de dire, mais aussi le matériau premier de la pensée construite. Les idéologies, de quelque nature qu’elles soient, sont éprouvées par et dans la langue, mère de toutes les causes politiques ». Les manipulations militantes de la langue que nous analysons dans l’ouvrage s’inscrivent quant à elles dans une histoire plus récente : celle du « politiquement correct », dont on peut dater l’origine au tournant des années 1970. Il s’agit d’un phénomène nouveau car il n’est pas imposé par un régime totalitaire, mais émane surtout de normes culturelles et d’usages institutionnels « démocratiques ». Son vecteur de diffusion a trait à un conformisme moral qui se répand à mesure que nos sociétés se fragmentent. Comme l’a montré George Orwell , n’est-ce pas le propre des régimes totalitaires de vouloir transformer la langue ? Sommes-nous face à une nouvelle novlangue ? Les révolutionnaires de 1789 ont promu le « salut public », terrible antiphrase qui masquait l’horreur des exécutions arbitraires pendant la Terreur ; les bolcheviks ont imposé l’usage d’antinomies simplificatrices et manichéennes (par exemple, camarades contre ennemis du peuple) ; le nazisme avait instauré un système langagier complet qualifié de « langue du IIIe Reich » par Klemperer. Nous avons affaire en Occident à une novlangue soft, ce qui la rend d’autant plus pernicieuse. Toutefois, il ne faut pas négliger les forces militantes à l’œuvre : les x-studies (études de genre, de race, de subalternités, etc.), nées sur les campus américains en même temps que s’est diffusée la pratique du politiquement correct dans les milieux dits progressistes outre-Atlantique, ont proactivement et méthodiquement promu ce que je nomme le « foisonnement (pseudo) conceptuel ». En outre, la pensée de la déconstruction est intrinsèquement narrativiste : elle valorise le récit, la subjectivité et l’hyperbole. C’est pourquoi le néoprogressisme et son avatar radicalisé woke nous ont fait entrer dans une nouvelle ère langagière, celle de la saturation de l’espace par ces euphémismes contemporains et autres manipulations sémantiques qui sont l’objet de notre ouvrage. Il est bien plus aisé de vilipender un mauvais usage du mot « femme » que d’aller défendre physiquement celles que l’on opprime dans certaines de nos villes… Paradoxalement, vous montrez aussi que le politiquement correct langagier, souvent porté par une certaine gauche, est loin de favoriser concrètement le progrès social. Les conquêtes langagières symboliques remplacent les réelles avancées sociales… Cette manipulation du langage est-elle le fruit de l’impuissance du politique et en particulier de la gauche progressiste ? La situation actuelle me paraît résulter de la conjonction de deux phénomènes : d’une part celui que l’on nomme usuellement « paradoxe de Tocqueville », en vertu duquel « quand l’inégalité est la loi commune d’une société, les plus fortes inégalités ne frappent point l’œil ; quand tout est à peu près de niveau, les moindres le blessent » ; autrement dit, à mesure que nous approchons de l’égalité de facto, toute inégalité résiduelle, même infime, nous semble insupportable. D’autre part, il est effectivement probable que l’affaissement du pouvoir politique au sein des démocraties libérales contribue à une survalorisation des causes « symboliques ». Je crois qu’il ne faut pas non plus négliger le confort moral de l’indignation de salon : il est bien plus aisé de vilipender un mauvais usage du mot « femme » que d’aller défendre physiquement celles que l’on opprime dans certaines de nos villes, au Moyen-Orient ou ailleurs. Mais je crois que le sens commun continuera de résister à la rééducation forcée de ceux qui refusent le débat serein, je crois que l’humanisme sincère l’emportera au détriment de l’intolérance de ceux qui préfèrent la forme du discours au discours lui-même. À terme, quelles peuvent être les conséquences en matière d’éducation ? Nos enfants ne sauront-ils plus définir des mots aussi usuels qu’un « homme » et une « femme » ? Posez la question aux militants les plus radicaux : ils ne le peuvent plus ! Certaines définitions qui leur sont imposées relèvent de tautologies dangereuses (une femme est une femme parce qu’elle se sent femme), qui contreviennent à la fois à ce qu’énonce la science (l’existence du fait biologique, sans que soit niée la possibilité de vécus de genre différents de la norme statistique) et à ce que révèle le bon sens. Dans une perspective plus large, il faut comprendre que la langue est tout aussi organique que mécanique : on peut tolérer son évolution – c’est même nécessaire – mais elle ne doit pas être forcée. La brusquer revient à troubler non seulement la pensée des individus, mais aussi leur capacité à constituer un corps social stable. Selon vous, le politiquement correct langagier est également à l’origine de la montée des « populismes », en particulier du trumpisme. Pourquoi ? Ce que vous appelez le « populisme » est-il une réaction démagogique ou simplement une réponse salutaire ? Il s’agit de l’une des causes majeures de la montée des « populismes » dans la mesure où ces derniers prennent essor sur le décalage entre le réel perçu et vécu par les citoyens et la manière dont on décrit le monde. Le trumpisme substitue aux ratiocinations du néoprogressisme une proposition antithétique radicale : celle d’un langage dépouillé, rudimentaire et pragmatique. Or, la simplification outrancière du langage est un autre procédé que les totalitarismes ont toujours encouragé. En matière d’usage de la langue, le pouvoir américain tombe, à mon sens, de Charybde en Scylla. La France, heureusement, résiste. C’est pour cela que nous avons écrit cette Encyclopédie des euphémismes contemporains. Quant au populisme, il est à la fois salut, parce qu’il en revient au sens commun et au souci du corps social dans sa globalité, et un péril, dans la mesure où l’on sait les tentations de contrôle politique démagogique qu’il engendre. Votre livre s’attaque principalement à la novlangue néoprogressiste. Existe-t-il aussi une novlangue de droite ? Par exemple, le mot « woke » est-il employé de manière trop systématique et parfois dans le seul but de discréditer une pensée de gauche ? J’ai relevé près de 300 termes que l’on pourrait qualifier de « manipulations militantes de la langue » : la plupart sont promues par les tenants du néoprogressisme. Il existe bien sûr des néologismes de droite, mais ils sont moins nombreux et fonctionnent différemment. Il s’agit généralement, pour la droite, de résister ou de contre-attaquer. C’est ainsi que des termes comme politiquement correct ou woke ont servi à dénoncer des doléances excessives émanant de la gauche. Parfois, les néologismes issus des rangs de la droite servent à qualifier avec emphase des fantasmes ou des phénomènes émergents indûment présentés comme massifs : les expressions « zone de non-droit », « État profond », « submersion migratoire » sont de cet ordre. S’il est initialement destiné à mettre en lumière les personnes noires victimes de confrontations avec les forces de l’ordre, le terme « woke » se voit rapidement repris et amplifié par d’autres activistes des mouvements identitaristes Le mot woke a une histoire intéressante : il prend racine dans les années 1930 aux États-Unis, sous la forme de l’injonction « stay woke » (littéralement « restez éveillés ») reprise par divers auteurs et artistes noirs victimes du régime de ségrégation raciale prévalant alors. Il reste néanmoins peu usité durant plusieurs décennies, jusqu’à sa reprise par le mouvement Black Lives Matter en 2012. S’il est initialement destiné à mettre en lumière les personnes noires victimes de confrontations avec les forces de l’ordre, le terme se voit rapidement repris et amplifié par d’autres activistes des mouvements identitaristes pour progressivement prendre le sens plus large qu’on lui connaît aujourd’hui. Au gré du temps, comme dans le cas de la locution « politiquement correct », ce mot a servi à désigner les excès et dérives de la radicalité néoprogressiste, c’est pourquoi peu se réclament aujourd’hui ouvertement du wokisme. Il s’agit là d’une des rares victoires sémantiques dont peut se targuer la droite. Toutefois, il convient de constater que cela s’est produit au détriment de la rigueur, voire de l’honnêteté intellectuelle : nombreux sont ceux qui utilisent désormais ce terme pour qualifier des comportements qui n’en relèvent pas. C’est un abus malheureux. C’est pourquoi Sylvie Perez et moi-même consacrons deux entrées à ce mot central au sein de l’Encyclopédie. Aucune manipulation n’est souhaitable, quel que soit le dessein poursuivi.
par Jean-Baptiste Michau, professeur de macroéconomie à l’Ecole polytechnique 14 septembre 2025
Une tribune de Jean-Baptiste Michau, professeur de macroéconomie à l’Ecole polytechnique, dans les Echos à propos de la taxe Zucman https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/pourquoi-la-taxe-zucman-appauvrirait-la-france-2185537 "L’économiste Gabriel Zucman soutient l’instauration d’une taxe plancher de 2 % sur le patrimoine au-delà de 100 millions d’euros. L’adoption de cette taxe, qui est envisagée pour le budget 2026, serait profondément nuisible pour l’économie française. Un impôt sur la richesse soulève d’abord un problème de valorisation : la base taxable est fluctuante pour les entreprises cotées en Bourse et difficile à établir pour les entreprises non cotées. Il pose ensuite un problème de liquidité pour les propriétaires d’entreprises en croissance ne versant pas encore de dividendes. Cela pose la question de l’exil fiscal, dont l’ampleur est incertaine. D’un côté, les études empiriques suggèrent que le flux de départs serait limité. D’un autre côté, jamais une taxe aussi massive n’a été mise en œuvre. En outre, si les flux sont limités, le stock de Français fortunés installés à l’étranger est déjà substantiel. L’objectif devrait plutôt être de les faire revenir en France. Frein à l’innovation Outre ces effets, la taxation de la richesse poserait un problème de mécanicité à la croissance. Rappelons que la valorisation d’une entreprise est déterminée par les gains futurs escomptés. La taxation de la richesse diminue donc les perspectives de gains futurs en rendant plus difficile le financement des entreprises innovantes. De même, l’action d’une entreprise innovante valant essentiellement par ses perspectives de croissance future, une taxe sur la richesse lui est particulièrement nuisible. La taxe Zucman aurait donc un effet très négatif sur l’innovation et sur la croissance. La taxation de la richesse affaiblirait certainement notre potentiel de croissance à long terme. Une caractéristique des milliardaires est que leur taux d’épargne est particulièrement élevé, avec une consommation souvent négligeable au regard de leurs revenus. Par conséquent, une taxe sur leur richesse consiste pour l’Etat à prélever puis à dépenser des revenus du capital qui auraient sinon été épargnés et réinvestis. Ainsi, cette taxe réduit mécaniquement l’épargne et donc l’investissement. Plus précisément, l’Etat consacre environ 10 % de ses dépenses à l’investissement public et ses dépenses supplémentaires transférées aux Français, qui en consomment une large fraction. Or notamment aux Etats-Unis, l’investissement des entreprises représente environ 80 % des sommes investies, celui de l’Etat environ 20 %. L’investissement public étant en outre moins productif que l’investissement privé, une substitution de ce dernier par le premier réduit le potentiel de croissance. Ainsi, si la taxe Zucman rapportait 16 milliards d’euros par an (0,6 point de produit intérieur brut – PIB – privé), on devrait en conclure que l’investissement privé diminuerait d’autant et que l’investissement public augmenterait au mieux de 0,1 point de produit intérieur brut (PIB) – soit un manque à gagner net de 0,5 point de PIB d’investissement. En finançant l’investissement public par un impôt sur la richesse, on substitue de l’investissement public peu productif à de l’investissement privé productif, et on suscite une dégradation du solde de la balance commerciale. Donc, à PIB inchangé : soit l’investissement diminue de 16 milliards d’euros ; soit ils seraient financés par l’étranger et le déficit commercial se creuse alors de 16 milliards ; soit, plus vraisemblablement, on a une combinaison de ces deux possibilités. Pire : en France, les entreprises innovantes rencontrent souvent des difficultés à se financer. Or, les milliardaires sont précisément les investisseurs les plus à même d’effectuer des placements risqués au service des entreprises en croissance, avec à la clé des rendements élevés. La taxe Zucman entraverait ce vecteur de croissance. Mesure idéologique Bref, en appauvrissant les riches, et en empêchant les grandes fortunes de se constituer, c’est la France qu’on appauvrirait. D’ailleurs, peu après l’instauration de l’impôt sur les grandes fortunes au début des années 1980, les sociétaires ont été conduits à s’expatrier dans des Etats exonérés de l’impôt sur la fortune. La taxe Zucman affaiblirait certainement notre potentiel de croissance à long terme en réduisant l’investissement, en pesant sur l’innovation et en aggravant les déséquilibres extérieurs. En réduisant les recettes fiscales futures, elle pèserait en outre sur le financement des dépenses publiques, dont les principales sont : TVA, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, etc. Cette taxe s’inscrit donc dans une logique purement idéologique et non pragmatique. En instaurant la taxe Zucman, la France serait probablement le seul pays à se l’imposer à elle-même, puisque d’autres pays refusent d’adopter une telle mesure d’idéologie purement idéologique et sans aucune pertinence économique."
par Alexandre Devecchio dans Le Figaro 14 septembre 2025
Une tribune très instructive d'Alexandre Devecchio dans FigaroVox sur la perception par les Français de notre nouveau Premier Ministre: https://www.lefigaro.fr/vox/politique/alexandre-devecchio-pourquoi-la-majorite-des-francais-n-attendent-rien-de-sebastien-lecornu-20250911 LA BATAILLE DES IDÉES - L’enquête Odoxa-Backbone pour Le Figaro révèle que 69% des Français jugent que le choix du nouveau premier ministre ne correspond pas à leurs attentes. Plus que son manque de notoriété, cela traduit la grande fatigue démocratique des Français. Au suivant ! La valse des locataires de Matignon continue. Moins de vingt-quatre heures après la chute de François Bayrou, l’Élysée a annoncé la nomination de Sébastien Lecornu en tant que nouveau premier ministre. Le troisième en moins d’un an. Le cinquième depuis la réélection d’Emmanuel Macron. Compte tenu du fait que le président de la République a exclu toute dissolution ou démission, le choix d’un homme politique connu pour sa souplesse (il va lui en falloir !) et son humilité (qualité rare en Macronie !) était plutôt judicieux. Mais cela intéresse-t-il encore vraiment les Français ? « La vie politique est une pièce de théâtre totalement décalée se jouant devant une salle vide », observait le politologue Jérôme Fourquet dans Le Figaro après la chute de François Bayrou. Les sondages semblent lui donner raison. Une majorité de Français n’attend rien de Sébastien Lecornu. L’enquête Odoxa-Backbone pour Le Figaro révèle que 69% d’entre eux jugent que ce choix ne correspond pas à leurs attentes. Il est même moins bien accueilli que ses deux derniers prédécesseurs François Bayrou et Michel Barnier. Cela tient moins à son déficit de notoriété ou à ses qualités propres qu’à la grande fatigue démocratique des Français. Celle-ci est accentuée par le contexte politique lié à la dissolution : sans majorité claire et dans une situation budgétaire contrainte, les marges de manœuvre du nouveau locataire de Matignon seront très réduites. "Aucune institution ne peut être vraiment réformée si ses membres n’y consentent pas, à moins de faire table rase par la dictature ou la révolution" Le général de Gaulle à propos du ministère de l’Éducation nationale Mais elle vient de beaucoup plus loin. Depuis des décennies, les majorités politiques et les premiers ministres se succèdent, ce qui n’empêche pas la politique menée de s’inscrire dans une certaine continuité : les impôts augmentent en même temps que l’immigration avec les résultats que l’on connaît ! Sous la Ve République, le vrai pouvoir se situe à l’Élysée, non à Matignon, mais aussi au sein de l’administration. Celle-ci reste inamovible. Loin de se contenter d’exécuter les décisions des gouvernements, elle agit comme un État dans l’État, autonome et guidée par une idéologie progressiste en décalage croissant avec l’opinion publique. «Le désintérêt des Français pour la valse ministérielle actuelle» « Aucune institution ne peut être vraiment réformée si ses membres n’y consentent pas, à moins de faire table rase par la dictature ou la révolution », constatait déjà le général de Gaulle à propos du ministère de l’Éducation nationale. En vérité, aujourd’hui, ce constat s’étend bien au-delà de la Rue de Grenelle. Jusqu’au sein même de l’audiovisuel public, comme l’a montré la récente affaire France Inter. L’État profond, notamment par le biais de la justice administrative et constitutionnelle, décide du destin du pays au mépris de la souveraineté populaire. Le tournant a eu lieu en 1981 avec l’élection de François Mitterrand. À défaut de changer la vie, les socialistes se sont emparés de tous les postes clés de l’État faisant de la bureaucratie non élue l’épine dorsale de leur pouvoir. Quatre décennies plus tard, malgré la marginalisation du PS sur le plan électoral, les socialistes ont conservé leur emprise sur le pouvoir et sont toujours omniprésents à la tête des institutions majeures : du Conseil constitutionnel à la Cour des comptes, en passant par le ministère de l’Éducation nationale et les médias publics. Malgré les périodes d’alternance politique, la droite n’a jamais su ou voulu reconquérir ces institutions, se condamnant à l’impuissance. C’est ce qui explique le désintérêt des Français pour la valse ministérielle actuelle. Lassés que tout change pour que rien ne change, ils ont compris qu’un redressement du pays passerait non par un changement de premier ministre, mais par une reprise en main des commandes de l’administration pour la mettre enfin au service des citoyens.
par Sébastien Laye (Valeurs Actuelles) 13 septembre 2025
"L’attractivité d’un pays, du point de vue des investisseurs, dépend en partie de l’accueil qui y est fait à l’innovation et de la stabilité juridique. À l’heure actuelle, en cette matière, la France va à l’encontre de ses intérêts" https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/economie/le-principe-de-precaution-est-un-obstacle-a-la-croissance-economique