3 questions à ... Jean-Luc Moudenc
3 questions à ... Jean-Luc Moudenc

Suite de
notre série d'interviews de personnalités de la droite haut-garonnaise
avec les réponses de Jean-Luc Moudenc, Maire de Toulouse et Président de
Toulouse Métropole, et candidat
à sa réélection.
1) Que signifie pour vous « être de droite » ?
C’est d’abord un état d’esprit. Si la solidarité est indispensable, il lui faut, au préalable, un principe de réalité : on n’a aucune richesse à redistribuer si on ne crée pas d’abord de la réussite. Et, il ne peut y avoir de droits sans devoirs. C’est cela, la Démocratie et la République.
Être de droite, c’est aussi affirmer que la sécurité est la première des libertés. Sans elle, pas de cohésion sociale, pas de « vivre ensemble ». Lorsqu’il y a désordre, les premières victimes sont les plus faibles.
La notion de tradition est également très importante. Il faut, bien sûr, être dans le présent, regarder l’avenir, mais ne jamais se couper de ses racines. C’est vrai pour une ville, un pays ou l’Europe. Cette tradition, qui renvoie à notre identité, débouche territorialement sur une autre notion : la Patrie. Être patriote ne veut pas dire être nationaliste. Bien au contraire ! On aime son pays mais on ne le dresse pas contre les autres, c’est là toute la différence entre la droite et l’extrême droite sur ce sujet.
Ces quatre valeurs ne sont évidemment pas l’exclusivité de la droite, sa chasse gardée, ni même la définition complète de la droite. Mais elles constituent son socle, des points de repère fondamentaux.
2) Pourquoi êtes-vous engagé en politique ? Quels idéaux vous animent ? Quelles lignes voudriez-vous voir bouger ?
Je me suis d’abord engagé sur des valeurs. La démocratie décentralisée en fait partie. Tout ne peut pas se décider à Paris, les élus locaux connaissent leur territoire, il faut s’appuyer sur leur expérience. C’est aussi parce qu’il était ancré dans un territoire, loin de Paris, que Jacques Chirac a été un grand Président.
Je crois aussi profondément en l’Europe. Si la France est une grande nation, sa population représente aujourd’hui bien moins d’un pour cent de la population mondiale. Seule, isolée, elle ne pourrait pas peser suffisamment. Elle doit se réaliser dans la construction européenne, en être un des principaux pays moteurs, de ceux qui donnent l’impulsion.
Dans un monde de plus en plus dangereux, je crois plus que jamais à la pertinence de ce projet de construction politique qui est aujourd’hui, bien trop imparfait, partiel et largement inachevé.
M’inscrivant dans la tradition de la démocratie chrétienne, je suis pour la liberté d’entreprendre, mais je crois que le libéralisme échevelé entraîne systématiquement l’écrasement du plus faible par le plus fort et nourrit, en réaction, la démagogie gauchiste. C’est pourquoi il faut opter pour une solidarité, mais une solidarité responsable.
Le deuxième pilier de mon engagement, celui qui m’anime au quotidien, est local. Il est, depuis longtemps, devenu l’essentiel de mon engagement public, ma vraie passion. C’est Toulouse ! Mon attachement à Toulouse n’est pas à démontrer. Je suis né dans cette ville, j’y ai grandi, et je m’y suis engagé politiquement dès l’âge de 17 ans. Bien des années plus tard, je suis devenu le plus jeune élu toulousain aux côtés de Dominique Baudis, auprès de qui j’ai beaucoup appris. Pouvais je avoir meilleur mentor municipal ?
Ma conception du mandat municipal n’a jamais changé. Dans une ville multiple, le rôle du maire est de rassembler, de fédérer en mettant du lien. Ce n’est pas toujours facile, il faut savoir trancher pour faire avancer les choses, mais cet équilibre est nécessaire. Être fidèle à son idéal tout en rassemblant dans l’intérêt général des Toulousains et de Toulouse, c’est ma ligne à moi. Une ligne droite.
Au niveau national, l’histoire politique bégaie sans cesse : nous sommes toujours confrontés aux mêmes difficultés. Très vite, à chaque quinquennat, la popularité de l’exécutif laisse place au désamour. Les alternances se succèdent et la majorité du moment a tendance à défaire ce que la précédente a tenté de mettre en place. Au final, notre pays n’est pas capable, par manque de courage et de constance, d’accomplir les réformes indispensables pour l’avenir. D’autres pays y arrivent pourtant. En créant la Vème République, De Gaulle l’avait magistralement fait et il avait su rassembler au-delà des clivages politiques. Il faut méditer cette période. On peut avoir en 2020 cette vision, gaullienne, que l’on soit ou non gaulliste. Elle conjugue l’ordre et le progrès, la tradition et la modernité, la démocratie et l’autorité, la conviction et le rassemblement.
3) Quels constats faites-vous sur le climat politique en général en France ? Quels sont vos peurs et vos espoirs ?
Il y a un climat d’inquiétude et de méfiance généralisée. Après chaque élection présidentielle, les gens sont vite déçus, comme s’il existait une fatalité propre à la politique française. Cette déception structurelle se traduit aujourd’hui par la montée des extrêmes. Comme toujours, ce phénomène s’accompagne de multiples violences. On se souvient des Gilets jaunes qui défendaient initialement une juste cause avant d’être infiltrés et dépassés par des radicalisés en tout genre, d’extrême-gauche principalement.
Il y a aussi les violences liées à l’insécurité, qui monte partout en France.
Le trafic de drogue mine beaucoup de quartiers des grandes villes, l’islamisme radical également, portant atteinte aux valeurs de la République et de notre civilisation tout en déformant l’Islam.
Je pense encore à l’homophobie, aux violences conjugales, aux dangers qui menacent l’environnement. Notre planète aussi souffre. Il en va de l’avenir de nos enfants de prendre ce sujet à bras le corps et de ne pas l’abandonner aux seuls écologistes », étiquetés ainsi, que j’appelle les « pastèques » (verts à l’extérieurs pour séduire, rouges à l’intérieur pour punir).
Cette violence se retrouve ensuite dans les urnes.
Mon espoir est de voir les grandes familles politiques de notre pays trouver un moyen de réaffirmer leurs valeurs pour être audibles dans la société. Plus fortes, mieux adaptées aux complexités du monde actuel, elles seront alors pleinement en mesure de porter les grandes réformes dont le pays a besoin. Je pense ici à la compétitivité économique, à la solidarité forte et exigeante et pas aveugle, à la sauvegarde de nos retraites, à un État déconcentré, qui rééquilibre ses forces entre Paris et nos régions. Je souhaite aussi une Europe moins normative, qui pèse politiquement dans le monde au service des valeurs - menacées - de la démocratie, et qui soit un jour assez forte pour nous amener une plus-value en matière de défense, de sécurité et d’environnement.







