Démocratie : oui ! Communautarisme : non !

Natacha Gray • 28 octobre 2019

Les dangers de l’offensive islamiste aux municipales


Dans un contexte politique tendu où les uns s’inquiètent de la progression de « l’hydre islamiste » et de ses attaques tous azimuts pour asseoir sa visibilité dans l’espace français, quand d’autres dénoncent la « stigmatisation des musulmans » voire une « islamophobie ambiante », à l’heure où le débat est réactivé suite à l’attaque terroriste à la Préfecture de Paris et à la nouvelle polémique sur le voile, nous recevons la confirmation qu’un parti communautariste, l’UDMF (Union des Démocrates Musulmans de France), conformément à ce qu’il avait annoncé lors des élections européennes, va présenter un certain nombre de listes lors des prochaines municipales. Toulouse n’y fait pas exception , puisque l’on apprenait ces derniers jours que l’UDMF y prépare une liste, la Ville rose étant considérée par les responsables de ce parti comme un terreau propice aux thèses communautaires musulmanes.


En réaction à ce qui, pour beaucoup, constitue une énième provocation des partisans de l’islam politique, un danger, et un nouveau coup de canif dans la laïcité, le sénateur LR Bruno Retailleau, qui travaille à une proposition de loi sur le sujet, demandait courageusement ces derniers jours, rejoint en cela par nombre de personnalités de droite comme de gauche, d’« interdire tout financement public d’un mouvement communautariste qui ne respecterait pas les principes de souveraineté nationale et de laïcité, et prohiber, sous le contrôle du juge administratif, les candidatures et la propagande électorale communautaristes.»

Est-ce légal d’interdire ces listes communautaristes ou, à défaut, souhaitable ? Est-ce seulement possible ? Y a-t-il vraiment lieu de s’inquiéter face à un parti qui a fait 0,13% des suffrages le 26 mai dernier, soit 28 395 voix, et se positionne 27e sur 34 listes ? Ce score modeste est précisément le principal argument de ceux qui ne souhaitent pas voir le débat s’ouvrir sur la légitimité de ces listes. Mais le problème nous semble infiniment plus complexe et les inquiétudes doivent porter à bien plus longue échéance que ces quelques résultats qui ne sont qu’un premier pas dans une stratégie à long terme de partition et d’affrontement, celle de l’islam politique et plus précisément des Frères musulmans.

1. L’UDMF est bien un vecteur de propagation de l’islamisme au sein de nos démocraties.

Une clarification sémantique d’abord. Le choix de Bruno Retailleau, évoquant des listes « communautaristes » et non « communautaires », semble préférable car le suffixe « iste » est celui que l’on emploie pour désigner une activité, une action, voire une offensive, très souvent au service d’un idéal politique (islamiste, communiste, socialiste, gauchiste, populiste…). Le cas qui nous concerne est uniquement celui de partis autoproclamés « musulmans » (en fait islamistes comme nous allons le démontrer), ne s’adressant qu’à une fraction de la population.

Il existe en France plusieurs partis communautaristes musulmans dont Égalité et Justice, Démocratie représentative, Français et musulmans, l’UDMF … Ce dernier, le plus important, a été créé en novembre 2012 par Najib Azergui et compterait aujourd’hui quelques centaines d’adhérents et quelques permanents.


Tous ces partis récusent le qualificatif de communautaristes et s’abritent derrière des éléments de langage, ce qui est typique de la tactique des Frères musulmans qui font toujours semblant, dans un premier temps, de s’accommoder des règles de la démocratie. Ainsi aux Européennes la liste était baptisée "Union pour une Europe au service des peuples", et l’UDMF affirmait sur son site être " non confessionnel, laïc et profondément républicain ", même si le programme comportait un certain nombre d’items sans ambiguïté sur l’électorat visé (voir paragraphe suivant). Mais il est vrai qu’officiellement les candidats tenaient un discours qui relevait plutôt de la rhétorique gauchiste généraliste : combat social, lutte contre la pauvreté, éducation pour tous, désenclavement des quartiers, lutte contre les discriminations et le « racisme d’Etat » (même si la lecture du programme nous apprend que seuls les musulmans seraient les seuls à les subir), souhait que l’Europe impose aux États membres le droit de vote des étrangers non communautaires aux élections locales …. Illustration s’il en est de la parenté entre islamisme et extrême gauche (« l’islamo-gauchisme » dénoncé en son temps par Manuel Valls).

Pourtant l’UDMF est bien un parti communautaire, qui ne s’adresse qu’aux musulmans . Car c ette modération dans le langage a été abandonnée dès le lendemain des résultats, apportant la reconnaissance de facto qu’il s’agissait bien d’un parti destiné exclusivement aux musulmans de France. C’est sur Oumma.com que Nabil Azergui remerciait ceux qui avaient mené des " opérations de terrain en plein jeûne de ramadan " et les électeurs qui, par leur vote, avait témoigné d’« une colère grandissante notamment quant à la stigmatisation dont font l’objet les musulmans partout en Europe" et permis de dépasser les " listes antimusulmanes " (comme celle de R. Camus).

Pas de surprise toutefois, sauf pour ceux qui ne connaissent pas le jeu assez fin des Frères musulmans avec la démocratie. Reprenons les principaux éléments du programme qui apparaissaient clairement pour qui se donnait la peine de lire autre chose que ce que les candidats donnaient à entendre sur les plateaux (à savoir un parti vivre-ensembliste, laïc, démocrate, non-confessionnel) : il s’agissait d’« assurer la sécurité des communautés musulmanes européennes », de « combattre l’islamophobie sur le sol européen », de « dissoudre toutes associations ou groupements islamophobes », d’organiser une Europe de la défense qui viendrait militairement en aide aux musulmans de par le monde (Ouïghours, Rohingyas, Gazaouis, Yéménites…), à l’exclusion évidemment d’autres populations « opprimées » qui ne sont jamais mentionnées ; de combattre « l’exploitation régulière des musulmans servis en pâture, partout en Europe, afin d’endosser la responsabilité de l’échec des choix politiques menés au sein de l’UE en matière d’économie, de sécurité ou d’intégration »

Les résultats d’ailleurs (comme pour les autres micro-partis musulmans) aux différentes élections montrent qu’ils obtiennent leurs meilleurs résultats dans des bureaux de vote de quartiers où la population de confession musulmane est surreprésentée . On note également la confession de la majorité des candidats, la présence importante de femmes voilées chez les militantes et les candidates, jusque sur l’affiche officielle de l’UDMF pour les Européennes.


C’est, au-delà, un parti communautariste islamiste qui ne cache pas des projets comme celui de vouloir revenir sur les « lois liberticides » de 2004 et 2010 sur le voile et le niqab et sur l’interdiction des prières de rue. Déjà la rhétorique victimaire (voir ci-dessus), l’emploi du terme « islamophobie » inventé par les Frères musulmans pour faire taire tout débat, le qualificatif d’ « antisioniste » parfaitement assumé (dont on sait qu’il est le faux-nez, pour l’islamo-gauchisme, de l’antisémitisme qui, lui, tombe sous le coup de la loi), le parti pris « anti-colonialiste » (qui évoque le discours racialiste des Indigènes de la République et la volonté de s’opposer à l’ancien colonisateur en jouant sur ce que Kipling nommait « le sanglot de l’homme blanc », i.e. la culpabilité, tout en rejetant la civilisation occidentale), le voile chariatique sur les affiches, font partie de l’arsenal de symboles et des éléments de langage qui ne trompaient guère l’observateur averti. Quant à la volonté affichée à plusieurs reprises d’interdire toute recherche scientifique ou critique sur l’islam, elle signe, peut-être mieux que tout autre signal, l’idéologie politico-religieuse des islamistes. Mohamed Sifaoui, dans son récent ouvrage [1] , dénonce d’ailleurs la proximité de l’UDMF avec les Frères musulmans.

D’ailleurs l’UDMF est bien qualifiée de « danger » par les services de renseignements qui y reconnaissent la stratégie de cette organisation tentaculaire dont l’objectif final est, bien évidemment, l’instauration du califat, de la charia, et la destruction de la laïcité. Il en est de même pour les deux autres principaux partis communautaristes : Égalité et Justice, né en 1915, capable de présenter plus de 50 candidats aux législatives de 2017 est considéré comme une filiale du parti islamiste d’ Erdoğan . Quant à Hadama Traoré, le fondateur et tête de liste de Démocratie représentative, présente comme l’UDMF aux élections européennes, rappelons qu’il s’est fait connaître récemment en organisant une manifestation de soutien (interdite) … à Mickaël Harpon, le terroriste de la préfecture de police de Paris.


Prenons le cas de Toulouse . Taoufik Mhamdi, originaire du Mirail-Bellefontaine, très actif au sein de l’UDMF, travaille paraît-il à la constitution d’une liste pour les Municipales. Comme on l’a dit, une très forte proportion d’immigrés de confession musulmane et la radicalisation croissante de certains quartiers où l’islam politique progresse rapidement (comme en témoigne visuellement la prolifération des tenues chariatiques dans l’espace public) laisse espérer un vote massif permettant même de se maintenir au second tour et de faire pression sur les autres candidats. Ajoutons que l’UDMF entretient un contentieux avec Jean-Luc Moudenc : en 2016, suite à un discours du maire de Toulouse dénonçant les dangers du « nazislamisme » [2] lors des cérémonies célébrant le 72e anniversaire de la libération de Toulouse, le fondateur de l’UDMF avait répliqué dans Oumma.com en comparant la situation des musulmans contemporains à celle des Juifs sous Vichy ! Néanmoins le mouvement semble pour l’instant manquer de financements pour soutenir la prochaine campagne et gagner en notoriété, c’est pourquoi les avis sont partagés quant à la possibilité de percer réellement et de constituer une force capable de peser sur les autres candidats entre les deux tours. Mais intéressons-nous au parcours du leader toulousain de l’UDMF : cet ancien agent de sécurité à l’aéroport Toulouse-Blagnac a été licencié en avril 2016 « pour cause sérieuse et réelle ». Ajoutons qu’une perquisition avait été menée à son domicile, 5 mois auparavant, en novembre 2015, dans le cadre de l’état d’urgence, 11 jours après les attentats du Bataclan. Sans suite judiciaire toutefois. Aujourd’hui à son compte, il est considéré, par les services de renseignement, comme proche de la confrérie des Frères Musulmans, en raison de « faits objectifs établissant une proximité », même si lui s’en défend : « qui nous prouve que nous avons des liens avec ce parti qui se trouve à plus de 3500 km de Paris ? » déclare-t-il à France 3 Occitanie qui l’interrogeait à ce sujet. Argument bien faible à l’heure des réseaux sociaux et des financements à distance.



2. Faut-il s’en inquiéter ?

Si l’on en croit un certain nombre de commentateurs, politiques ou sur les médias, ce serait un non-sujet compte tenu de la faiblesse des résultats aux dernières élections européennes. Rappelons que l’UDMF c’est « moins de 29000 voix pour la France entière », comme aiment à le dire d’un air consterné les journalistes aux invités qui s’inquiètent de la prolifération des listes présentées par ce parti aux prochaines municipales. Ajoutons que « Démocratie représentative » est aussi parmi les dernières avec 0,01% des voix et qu’Egalité et Justice n’avait obtenu qu’1% des voix aux législatives de 2017.

Mais ses résultats cachent de profondes inégalités géographiques car ces listes ont pu faire des scores remarquables ( et cela d’autant plus que les électeurs devaient imprimer leurs bulletins) dans certains quartiers où ces partis ont fait campagne, ceux où existe une importante communauté musulmane gagnée par le radicalisme et le séparatisme religieux , où ils concurrencent des listes d’envergure nationale . Ces résultats sont à la fois, en ce sens, les symptômes d’un communautarisme ethnique et religieux et les vecteurs insidieux de sa propagation. Ainsi, en banlieue parisienne, l’UDMF a plusieurs fois dépassé les 5 % et régulièrement les 6% (7,43% à Garges-Lès-Gonesses où le parti termine en quatrième position et même devant les LR, le PS, EELV; 6,77% à Mantes-la-Jolie dont 16,74% dans le quartier du Val-Fourré, plus de 6% à La Courneuve…). Il en est de même dans le Nord, avec par exemple 6,10% à Maubeuge, dont plus de 40% dans un quartier de la ville. On pourrait ici multiplier les exemples et égrener des noms trop souvent synonymes dans l’actualité de zones de non-droit, territoires perdus de la République, où l’on retrouve le cocktail explosif des trafics en tous genres, de la propagande islamiste, des violences contre la police…

Oui il faut s’en inquiéter, car cette stratégie d’occupation de l’espace public et entrisme dans les équipes municipales, départementales, régionales, participe de la politique des petits pas que connaissent bien tous ceux qui ont eu à étudier, fréquenter, écouter des représentants de la confrérie des Frères musulmans, dont les services de renseignement qui l’observent et l’ont mise en évidence depuis longtemps. Comme autrefois le FIS en Algérie, comme en Égypte sous la houlette du l’ancien président Morsi, comme Ennahda en Tunisie, comme Musulmans de France (l’ancienne UOIF, qu’ils ont noyautée), les Frères musulmans font semblant d’accepter le jeu de la démocratie et les lois de la République, que pourtant ils méprisent, rejettent et combattent, pour arriver légalement au pouvoir. Ils ne s’en cachent d’ailleurs pas. C’est ce qui les oppose aux salafistes, car ils n’utilisent pas la violence ni le terrorisme (du moins directement car ils ont toujours une armée de l’ombre, qu'ils inspirent et protègent quand ils arrivent au pouvoir). Contrairement à nombre de nos politiques, ils intègrent le temps long dans leurs stratégies : l’objectif final reste l’islamisation des sociétés occidentales et l’établissement de la charia mais ils savent que cela passera par nombre de compromissions, par la voie légale et, judiciarisant tout, par le retournement des faiblesses de nos démocraties contre elles-mêmes. Ils investissent donc l’espace public, font de l’entrisme dans tous les secteurs-clés (éducation, transports, justice, armées et police, médias…) et dans le monde politique via les élections, habituent les citoyens à l’omniprésence de l’islam politique par des symboles visuels récurrents ou l’envahissement de la sphère médiatique (victimisation ou réactions aux provocations généralement volontaires). Le succès du mot « islamophobie », créé de toutes pièces par ces minorités qui jouent sur la culpabilisation des sociétés anciennement coloniales, est une constante dans leurs revendications. Ils sont ceux que les socialistes français (Fabius notamment) ont qualifiés « d’islamistes modéré », oxymore (puisqu’ils défendent précisément une théocratie où la loi divine, liberticide et misogyne, prime sur celle des hommes) qu’ils se sont empressés de reprendre à leur compte.

Si l’on reprend l’exemple des pays du Maghreb, nos compatriotes musulmans qui ont souffert de l’islamisme sur place rappellent que la stratégie des petits pas commence toujours ainsi : en Algérie laïque, les islamistes ont ainsi réclamé le retour du voile pour quelques-unes, au nom de la lutte contre les discriminations et de la liberté de conscience. Puis, lorsqu’il eût gagné du terrain, la pression fut de plus en plus forte pour que toutes les femmes musulmanes le portent, traitées alors de mauvaises musulmanes en cas de résistance à l’enfoulardisation, puis cette exigence de cette police des mœurs gagna l’ensemble des femmes, désormais persécutées en cas de refus. Après avoir composé pendant des années avec la démocratie, le Front Islamique du Salut, devenu majoritaire en 1990 à l’Assemblée, fit aussitôt tomber le masque, plongeant en réaction le pays désormais divisé en deux camps dans des années de guerre civile meurtrière. Rappelons de même que les Frères musulmans en Égypte, à peine élus de manière démocratique et sur des mensonges, s’engagèrent à établir la charia, les promesses (hier démocratiques) n’engageant que ceux qui les croient : seule la réaction d’un peuple gagné depuis Nasser à la laïcité (17 millions d’Egyptiens dans les rues du Caire lors d’une manifestation monstre et l’appel à l’armée) les fit reculer. En Tunisie des mois de manifestations dans les rues et de sit-in devant l’Assemblée, jour et nuit, entravèrent les projets totalitaires d’Ennahda qui ne cachait plus les mêmes objectifs. On pourrait également prendre l’exemple du parti d’ Erdoğan , l’AKP, présenté pendant des années par les Européens comme la preuve que l’islamisme « modéré » pouvait s’accommoder de la démocratie et dont on sait ce qu’il advient aujourd’hui.

Il faut donc bien avoir en tête que la stratégie des Frères musulmans est de créer des communautés qui vont entrer en concurrence et que l’objectif final est de voir celle des islamistes dominer. Et qu’eux, à l’inverse de notre société de l’immédiateté, se donnent le temps d’atteindre leur objectif, ce temps long dont ils ont une toute autre perception.


Cette stratégie des petits pas s’illustre déjà en France dans plusieurs domaines, dont celui de la politique qui nous intéresse ici. On voit ainsi l’UDMF pointer le bout de son nez en 2015 pour les élections départementales (la plupart des candidatures sont invalidées) ; puis revenir pour les Européennes (où une signature oubliée au moment du dépôt -volontairement ?- lui permet d’être la dernière liste validée in extremis par le ministère de l’Intérieur, ce qui lui fait une publicité inespérée). Considérant que les résultats sont déjà très encourageants, Nejib Azergui annonce aussitôt de nombreuses listes aux Municipales et dit espérer avoir un jour les 500 signatures nécessaires pour participer à une présidentielle . Pour cela, il faut investir les collectivités locales , ou un certain nombre de ces partis communautaires (comme Français et Musulmans) comptent déjà un certain nombre de conseillers municipaux en région parisienne (sur des listes diverses droites ou divers gauche). Le fondateur de l’UDMF s’est d’ailleurs allié à l’UDI à Bobigny pour les dernières municipales.

L’exemple de nos voisins européens devrait pourtant nous ouvrir les yeux sur le danger des listes se réclamant de l’islam.

Aux Pays Bas, le parti Nida , a obtenu deux sièges au conseil municipal de Rotterdam (où les musulmans représentent 20% de la population), rejoignant un autre parti communautariste musulman, financé par la Turquie (Denk) et qui a remporté un total de 24 sièges dans 13 villes néerlandaises, dont trois à Amsterdam et trois à Rotterdam. Les exigences de ces partis sont grosso modo comparables à celles qui sont exprimées par l’UDMF si ce n’est qu’ils n’hésitent pas à promouvoir un développement séparé des communautés. Si en Allemagne, « l’Alliance pour l’innovation et la justice » (BIG), lobby ouvertement pro- Erdoğan , n’a obtenu jusqu’à présent que des scores assez faibles (inférieurs à 1%), la situation est plus grave en Belgique. Dès 2012, s’est présenté aux élections le parti ISLAM («Intégrité, Solidarité, Liberté, Authenticité, Moralité») dont le programme se bornait apparemment à défendre une meilleure intégration des musulmans : obtenant deux élus et autour de 2% dans la région de Bruxelles, le parti a aussitôt tombé le masque et changé son discours pour faire … la promotion de la charia.

Il faut s’en inquiéter, enfin, car même avec des résultats modiques, ces élus dans les conseils, ou le poids représenté par ces listes entre deux tours, peuvent pousser un certain nombre de candidats à des alliances contre nature et à l’électoralisme le plus racoleur . Sans compter que tout ce qui donne aux propagandistes de l’islam radical une visibilité et une tribune, et bien évidemment une occasion de se victimiser, est à proscrire par tous les moyens possibles.


3. Peut-on interdire les listes communautaristes ?

A priori non, rien dans la loi actuelle ne le permet. Dans l’exemple belge ci-dessus, malgré les réactions virulentes, une pétition en ligne, l’action des élus, ce fut impossible. En France, en droit électoral, la liberté d’expression l’emporte sur tout. Ce qui explique que nombre de listes communautaires (chasseurs et pêcheurs, royalistes, listes corses, bretonnes, basques) aient pu se présenter, élection après élection. Il est vrai que leur cas n’a jamais été vraiment discuté, bien que défendant les intérêts d’une partie de la population, leurs programmes ne mettant pas en péril notre système démocratique ou n’entrant pas en contradiction avec lui.

Mais que ces listes soient légales ne signifient pas nécessairement qu’elles soient souhaitables : nous avons vu que le programme des partis musulmans relève de l’islamisme, c’est-à-dire d’un totalitarisme politico-religieux et d’une volonté d’affrontement entre les communautés. Il faut donc trouver des parades pour entraver cet entrisme islamiste au sein des conseils municipaux.


Les musulmans (ou plus exactement les islamistes, car le projet politique de ces listes ne fait pas illusion comme on l’a vu plus haut) rétorquent qu’il existe bien des partis qui se réclament du christianisme et que l’interdiction serait donc une discrimination. Il en fut ainsi, dans l’Histoire récente, des partis qui relevaient de la démocratie chrétienne, le MRP (Mouvement républicain populaire), le CDS (Centre des démocrates sociaux), le FRS (Forum des Républicains sociaux) devenu en 2009 le PCD (Parti Chrétien démocrate). Il en est de même Outre-Rhin avec les chrétiens démocrates de la CDU-CSU. Sur le fond, évidemment, comparaison n’est pas raison. Tous ces partis sont non-confessionnels, restent dans un cadre national, ne visent aucunement la satisfaction de la communauté des chrétiens et ne se sont jamais réfugiés dans une logique de victimisation. La référence chrétienne est seulement liée à des valeurs et bien évidemment à l’Histoire de la France, longtemps « fille aînée de l’Eglise ». Que l’on soit croyant ou non, les valeurs portées par le christianisme ont profondément marqué notre identité, comme l’islam définit celle de pays où il reste généralement religion d’État (même dans la moderne Constitution de la Tunisie). En d’autres termes les partis dits « chrétiens » ne heurtent évidemment pas les fondamentaux de notre contrat social, de la même façon que la religion chrétienne a, depuis longtemps, fait la preuve de sa capacité à s’insérer dans le débat démocratique et à se situer dans une logique de respect et de promotion de notre démocratie. Comme l’écrit pertinemment Céline Pina dans Le Figaro, c’est même une position radicalement opposée à celle des islamistes puisque si « les chrétiens-démocrates s’inspirent des valeurs chrétiennes au bénéfice de tous, les démocrates musulmans consacrent leurs efforts à la défense des musulmans au détriment de l’ensemble ». Cela étant dit, il est évident que l’on ne peut critiquer la mention confessionnelle « musulman » dans le nom de la liste ou du parti sans se voir rétorquer qu’il s’agit d’une énième discrimination antimusulmane tant qu’il existe un parti chrétien démocrate autorisé.


4. Alors que faire ?

La première parade se place au moment du dépôt de candidature de ces listes, ce qui suppose évidemment que les préfectures ne se contentent plus d’examiner la légalité des listes sur le plan formel et administratif mais évidemment que des commissions ad hoc puissent statuer sur le fond en y traquant tout ce qui est anti-républicain. Il s’agirait d’identifier et de dénoncer tout ce qui est incompatible avec notre Constitution (bien qu’il s’agisse évidemment avant tout d’attaques programmées contre la laïcité et la civilisation européenne, ce qui est plus difficile à prouver). Car il est évident que ces mouvements politiques n’ont aucune compatibilité avec notre système politique et notre échelle de valeurs, notamment en faisant la promotion, dans leurs programmes, de revendications faisant prévaloir la loi religieuse sur celles de la République. Le projet de loi proposée par le sénateur Retailleau, englobant de façon indifférenciée tous les partis que l’on peut qualifier de communautaires (sur une base confessionnelle ou non), permettrait donc à la fois de ne pas utiliser de financement public pour des intérêts particuliers (ce qui, au-delà du cas des listes islamistes, semble relever du bon sens même, le contribuable n’ayant pas à financer des intérêts catégoriels, même honorables, et a fortiori ceux qui vont contre ses propres intérêts) mais surtout d’interdire des listes dont le programme entrerait en contradiction avec les lois et valeurs de la République. Ceci dit, on peut faire confiance aux Frères musulmans et affidés pour avancer habilement masqués dans la présentation de leurs programmes afin de ne pas tomber d’amblée sous le coup de la loi.

On peut bien évidemment décider d’interdire purement et simplement les listes communautaires explicitement religieuses au nom de la laïcité. Tous les sondages montrent qu’une écrasante majorité de Français y sont favorables, tous bords confondus. Cela pénaliserait, entre autres, des partis se réclamant du christianisme dont les valeurs ne sont évidemment pas en contradiction avec la Constitution. Mais cela aurait l’avantage d’éviter l’inévitable victimisation des listes musulmanes qui hurleront, sinon, à la discrimination à la moindre interdiction. Toujours sur le plan juridique, cela supposerait de définir clairement ce que l’on entend par liste communautaire ou confessionnelle. Néanmoins, même en enlevant le mot « musulman » du nom des partis, il est probable que leurs électeurs les reconnaîtraient au travers d’éléments de langage, même choisis avec soin pour ne pas tomber sous le coup d’une interdiction (discriminations, antisionisme, racisme d’Etat…). En outre cela reviendrait à ne pas nommer l’ennemi, ce qui revient à ne pas le combattre . Car le fait est que tous les communautarismes ne nous attaquent pas. Un seul a pour projet de détruire les fondements de la République de la démocratie et les valeurs fondamentales de la France et, au-delà , de l’Occident : l’islam politique, qu’il soit celui du wahhabisme ou des Frères musulmans.

Le problème dépasse évidemment la simple question des listes communautaristes, et supposerait qu’en parallèle soit enfin posée la question de ce que doit être l’islam de France , de ce qu’il nous est possible de tolérer, ou pas, ce fameux débat que le Président de la République, comme son Premier ministre, ne cessent de différer : interdiction du voile de type chariatique dans l’espace public ; interdiction de tout mode de propagation du salafisme ou de l’idéologie des Frères musulmans sur notre territoire (et donc définition précise de ce qui caractérise la propagande de l’islam politique), classement des Frères musulmans parmi les sectes comme aux États-Unis, ce qui est d’ailleurs la manière dont le confrérie est considérée par tous les musulmans (de foi ou sociologiques) laïcs et démocrates sur notre territoire et dans leur propre pays. Rappelons que Philippe Bas, le président de la commission des lois au Sénat, avait proposé que soit inscrit dans la Constitution le principe que « nul ne puisse se prévaloir de son appartenance ethnique ou religieuse pour se soustraire à la règle commune ».

Avant l’élection , à défaut de pouvoir interdire ces listes (ou, si on les interdit, pour couper court à la victimisation), le combat doit rester politique et pédagogique. Il faut interroger les candidats sur les questions qui fâchent (égalité homme/femme par exemple), les pousser dans leurs retranchements afin qu’ils se dévoilent, expliquer que ce parti est islamiste et ne concerne pas tous les musulmans ; il faut sans relâche faire comprendre à ceux qui sont intégrés, respectueux des lois de la République et du mode de vie français, pratiquant un islam personnel, moderne et ouvert, souvent engagés eux-mêmes contre l’islam politique, qu’ils ne doivent en aucun cas se laisser convaincre par une rhétorique identitaire apparemment « soft » car elle est le premier pas d’une adhésion, par habitude et imprégnation, au modèle théocratique de la charia. L’effort pédagogique suppose également, enfin, de nommer précisément l’ennemi , le communautarisme et le séparatisme islamistes, bref l’islam politique, fondé sur une lecture littérale du Coran, ce que se refuse à faire clairement, pour l’instant, le Président de la République.

Après l’élection, la vigilance est de rigueur , suivie de sanctions. Déjà la loi, dans son état actuel, peut suffire à sanctionner, au nom de la laïcité, ou plus généralement au nom de la Constitution, tout représentant de la fonction publique ou agent de l’Etat qui rompt l’obligation de neutralité car devant appliquer, sans aucune discrimination possible, les lois de la République, il ne peut sous aucun prétexte afficher une quelconque préférence religieuse. Sont évidemment concernés par extension un maire ou un conseiller municipal, rémunérés sur fonds publics. L’exemple belge nous donne aussi quelques pistes : beaucoup, dès avril 2018, ont pointé certains points du programme du parti ISLAM qui appelait sans complexe à l’introduction de la charia, de séparer hommes et femmes dans les transports publics, pendant que son leader (Redouane Ahrouch) refusait de se faire maquiller par une femme, de serrer la main des candidates. Plusieurs plaintes ont été déposées et le tribunal de Bruxelles l’a condamné en avril 2019 à six mois de prison pour s’être rendu coupable de discrimination envers des femmes et à des dommages et intérêts pour les plaignantes. Les réactions fermes de la part des femmes discriminées (dont une journaliste) et de la Justice ont donc ouvert les yeux de bien des musulmans non islamistes sur les intentions de ce parti qui se prétendait, comme tous ceux du même genre, démocrate et laïc. Aux Pays-Bas, de la même manière, suite à des dérapages ultérieurs systématiquement pointés et sanctionnés par les partisans de la laïcité et de la démocratie, le parti Nida a perdu ses deux sièges au conseil municipal de Rotterdam.

Cela suppose de cesser toute culpabilisation face à la victimisation inévitable , de répondre argument après argument comme l’ont fait les Belges et les Néerlandais. On en est encore loin en France. Il est évident que toute tentative d’interdire ou de mettre en cause les listes communautaristes islamistes (islamistes car elles ne représentent que le modèle de société prôné par les littéralistes, et en aucun cas les objectifs et les valeurs de tous les musulmans) se heurtera à la tactique déjà rôdée des tenants de l’islam politique qu’Alexandre Del Valle a résumée par la trilogie : provocation-victimisation-médiatisation . Il faut donc prendre garde de rester scrupuleusement dans le cadre du droit, de la Constitution, des obligations liées aux lois sur la laïcité. Et faire évoluer nos lois dans les directions ci-dessus exposées.

Enfin il revient aux candidats de ne pas s’allier , que ce soit directement ou entre deux tours, à l’UDMF ou tout autre parti communautariste musulman, mais il est surtout de la responsabilité des électeurs de refuser leurs suffrages à quiconque conclura une alliance électorale avec les ennemis de la République. Rappelons à cette occasion le clientélisme imprudent de l’UDI : l’UDMF a obtenu son premier conseil municipal à Bobigny (où l’UDMF a obtenu un score vingt fois supérieur à son score national aux Européennes), dans l’équipe du maire Stéphane de Paoli. De même Nizarr Bourchada, fondateur de Français et Musulmans, tête de liste de l’UDMF aux régionales en Ile-de-France, vient du même parti centriste, tout comme d’autres responsables de ces mouvements musulmans, illustrant la porosité entre l’UDI et les militants islamistes.

Interdire les listes UDMF est souhaitable, mais à l’heure actuelle n’est malheureusement pas légal. Le projet de loi Retailleau donnerait des armes à la démocratie contre ses ennemis qui utilisent désormais des voies légales pour la combattre de l’intérieur. Il faut désormais, au-delà, oser clairement nommer cet ennemi : le problème, ce ne sont pas les listes communautaires en général, mais les listes dites musulmanes, qui sont les chevaux de Troie de l’islamisme . Dans l’attente d’une clarification législative, le remède ne peut être que politique avant d’être juridique : vigilance et pédagogie, fixation sans ambiguïté puis rappel régulier des limites à ne pas dépasser, qui sont celles de la Constitution, volonté de ne plus céder au chantage de la victimisation, décomplexion face à l’accusation d’ « islamophobie », refus d’alliances quel qu’en soit le prix électoral et, pour l’électeur, qui doit prendre ses responsabilités, sanction immédiate des listes qui franchiraient cette ligne rouge.



[1] Taqiyya ! Comment les Frères musulmans veulent infiltrer la France , l’Observatoire, septembre 2019

[2] « Le terrorisme et la barbarie nous ont frappés et nous frappent encore… Notre premier devoir est de nommer le mal. Ceux qui préfèrent édulcorer la réalité se contentent de parler de « terrorisme » et de « barbarie », évitant soigneusement de désigner l’idéologie qui les inspire. C’est comme si, derrière Vichy, on avait ignoré qu’il y avait « Mein Kampf »… Ce mal c’est le « nazislamisme » … » ( https://www.infos-toulouse.fr/2016/09/16/nazislamisme-les-propos-de-jean-luc-moudenc-emeuvent-la-communaute-musulmane/ )




par Alexandre Devecchio dans FigaroVox 4 octobre 2025
The body content of your post goes here. To edit this text, click on it and delete this default text and start typing your own or paste your own from a different source.
par Étienne Gernelle 1 octobre 2025
Un éditorial d'Étienne Gernelle dans Le Point : https://www.lepoint.fr/editos-du-point/etienne-gernelle-le-zucmano-lepenisme-ou-le-fantasme-du-quelqu-un-d-autre-paiera-25-09-2025-2599534_32.php L’incroyable opération Zucman a encore frappé. Dans une France oppressée de ses difficultés économiques, on peut comprendre que l’appel pour la beauté des démonstrations mathématiques, l’autorité conférée par l’aura d’une grande université américaine (Stanford, rien de moins !) et l’image flatteuse de l’exil fiscal retourné contre lui séduisent. Mais ce n’est pas parce qu’une idée est enrobée dans des habits de prestige qu’elle est juste. Gabriel Zucman, économiste de gauche, très respecté dans son milieu, mène depuis des années une campagne pour la création d’un impôt mondial sur la fortune. Son raisonnement est simple : puisque les riches peuvent déplacer leurs fortunes pour éviter l’impôt, il faut créer un prélèvement coordonné à l’échelle planétaire. Avec cette manœuvre habile, on peut faire passer l’utopie du grand soir pour un pragmatisme de bon sens. L’idée séduit les partis de gauche, évidemment, mais aussi le RN, qui l’utilise dans sa rhétorique « anti-riches » tout en caressant l’espoir de voir cet argent magique remplir les caisses de l’État français. Le problème est que l’impôt mondial, même présenté avec le sérieux des économistes bardés de diplômes, reste une chimère. Il n’existe aucune instance capable de le mettre en œuvre, aucun mécanisme de contrainte universelle pour obliger tous les pays à l’adopter, et encore moins à le percevoir et le redistribuer. Déjà qu’à l’échelle européenne, l’harmonisation fiscale ressemble à un chemin de croix interminable, on imagine mal la Chine, les États-Unis, l’Inde, la Russie et d’autres accepter de s’aligner sur une taxation commune des patrimoines. En réalité, cet impôt mondial, c’est un peu la version contemporaine du mythe de l’argent magique. L’idée que l’on pourrait financer les dépenses publiques toujours croissantes non pas en faisant des choix, en hiérarchisant, en arbitrant – bref en gouvernant –, mais en allant chercher ailleurs des ressources illimitées. Le grand fantasme du « quelqu’un d’autre paiera ». Dans son livre Le triomphe de l’injustice, Zucman, avec son complice Emmanuel Saez, avait déjà popularisé cette vision, qui a rencontré un immense écho. Le discours est rassurant, flatteur : si les services publics se dégradent, si la dette explose, ce n’est pas à cause d’un excès de dépenses, d’une fuite en avant budgétaire, mais de la rapacité des riches et de l’insuffisance de la redistribution. La réalité, d’abord, est que la France n’est pas avare en matière de prélèvements : elle figure parmi les pays les plus taxés au monde, avec une fiscalité déjà très redistributive. Ensuite, croire qu’un impôt mondial règlerait tout revient à s’installer dans une illusion dangereuse. Au lieu d’affronter nos problèmes réels – la faible productivité, l’absence de réformes structurelles, l’endettement chronique –, on préfère croire qu’une baguette magique fiscale viendra nous sauver. La facilité d’adoption de ce discours tient au fond à un trait bien français : le refus de la responsabilité budgétaire. Depuis quarante ans, la dépense publique croît sans frein, chaque gouvernement repoussant le moment de la vérité en empruntant davantage. Comme si le monde entier était condamné à payer notre confort. Bref, le zucmano-lépénisme est une jolie fiction. Mais elle ne résout rien. Au contraire, elle alimente notre incapacité à voir la réalité en face. À force de rêver d’un impôt universel et miraculeux, on se prive des vraies solutions, certes moins spectaculaires, mais infiniment plus efficaces : réformer, produire plus et dépenser mieux.
par Franz-Olivier Giesbert 1 octobre 2025
Un edito de Franz-Olivier Giesbert dans Le Point https://www.lepoint.fr/editos-du-point/fog-comme-un-champ-de-ruines-24-09-2025-2599462_32.php Que la gauche ait perdu toutes les élections depuis 2017, même quand elle clamait victoire, cela ne l’empêche pas de détenir les clés du pouvoir : tel est le paradoxe qui contribue à ruiner notre vieille démocratie. D’où le sentiment qu’ont les Français de n’être plus gouvernés et leur tentation de renverser la table. Certes, il est toujours sain, dans une démocratie, qu’un pouvoir soit confronté sans cesse à des contre-pouvoirs. Mais à condition que ceux-ci ne finissent pas par le paralyser ou par prendre sa place. Or la gauche d’atmosphère contrôle à peu près toutes les institutions de la République. Sur le papier, c’est beau comme l’antique : vigie de la République, le Conseil constitutionnel est censé vérifier notamment que les lois sont conformes à la Constitution. Sauf qu’il penche fortement à gauche et à la peur du crédit, notamment en censurant, l’an dernier, la commande d’Emmanuel Macron et de son ministre Laurent Fabius, près de soixante textes d’application de la loi immigration dédiée au contrôle et à l’intégration et pilotée, entre autres, par Bruno Retailleau. L’immigration est un totem, pas touche ! Le 19 juin, le Conseil constitutionnel, toujours dans la même logique immigrationniste, a réduit à néant la loi Attal sur la justice des mineurs, qui, dans notre pays, continuent ainsi de bénéficier d’une sorte de sauf-conduit après avoir commis leurs forfaits, au grand dam d’une majorité de Français. Le 7 août, il a encore enfoncé le même clou en retoquant, au nom de la liberté individuelle, la loi visant à autoriser le maintien en rétention d’étrangers jugés dangereux. En somme, le vénérable institut ignore de moins en moins le droit, tout comme le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative, qui a inscrit dans le marbre le regroupement familial en 1978, sans en référer bien sûr à la souveraineté populaire. Les magistrats jugent souvent en fonction de leur conviction – de gauche ou d’extrême gauche. Pas tous, Dieu merci, mais, pour paraphraser La Fontaine, selon que vous serez de gauche ou de droite, les jugements vous rendront blanc ou noir. Une preuve parmi tant d’autres : apparemment, la justice a mis un mouchoir sur l’affaire des assistants des eurodéputés du parti de Jean-Luc Mélenchon, soupçonné de détournements de fonds, comme l’a rappelé opportunément l’Office européen de lutte antifraude, alors que, pour des faits semblables, François Bayrou a déjà été jugé et qu’une peine d’inéligibilité menace Marine Le Pen. Vous avez dit bizarre ? À voir ses « trophées », le célèbre Parquet national financier (PNF) est surtout une machine de guerre contre la droite, avec une obsession : Nicolas Sarkozy, coupable d’avoir comparé un jour les magistrats à des « cassation » à « des petits pois qui se ressemblent tous ». Pour avoir critiqué dans ce journal ses méthodes, nous savons à quoi nous en tenir : ce n’est pas l’objet du PNF, acharnant judiciairement depuis vingt ans à ruiner des hommes et des femmes, souvent avant même un début de moyens. C’est bien simple : avec sa présidence du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), l’audiovisuel public est presque totalement noyauté à gauche, sous la houlette de l’inévitable Arcom, « régulateur des médias » qui dépend, entre autres, de l’Éducation nationale... Dans sa “Déambulation dans les ruines”, un livre magnifique, Michel Onfray nous emmène en voyage dans la civilisation gréco-romaine, qui est morte pour laisser place à la nôtre, la judéo-chrétienne, aujourd’hui en point. Dans son introduction, il cite les Fragments posthumes de Nietzsche, où le philosophe allemand évoque les « valeurs du déclin », et force est de constater qu’elles commencent à recouvrir le mur sur notre vieux continent : la désagrégation de la volonté ; le triomphe de la populace ; la domination de la lâcheté sociale ; la honte du mariage et de la famille ; la haine de la tolérance ; la généralisation de la paresse ; le goût du remords ; une nouvelle conception de la vertu ; le dégoût de la situation présente. Réveillons-nous. Maintenant que, grâce à la pédagogie de François Bayrou, les Français saisissent la gravité de la situation financière du pays, il est temps de se ressaisir et de relever la tête. De passer à l’espoir ! Comme disait Tocqueville, « ce n’est pas parce qu’on voit poindre à l’horizon qu’il faut arrêter d’avancer ».
par Vincent Trémolet de Villers 30 septembre 2025
Une tribune de Vincent Trémolet de Villers dans FigaroVox https://www.lefigaro.fr/vox/politique/l-editorial-de-vincent-tremolet-de-villers-sur-les-ruines-de-la-democratie-20250926 L’autorité judiciaire, en état d’ivresse, remet en liberté surveillée des lyncheurs de policiers pris en flagrant délit mais coffre pour 5 ans un ancien président de la République, triplement relaxé, avant même son procès en appel. Il faudrait Juvénal pour décrire cet effondrement. Entre parade du président à New York et conciliabules à Matignon, l’exécutif mime un pouvoir qui lui échappe. Sur à peu près tous les sujets, comme nos ministres, il est démissionnaire. L’Assemblée nationale, nouvelle nef des fous, fait tourner les députés comme des hamsters, de censure d’humeur en budget de fortune. L’autorité judiciaire, en état d’ivresse, remet en liberté surveillée des lyncheurs de policiers pris en flagrant délit mais coffre pour 5 ans un ancien président de la République, triplement relaxé, avant même son procès en appel. Motif de condamnation ? « Association de malfaiteurs » ! Apparemment c’est ainsi que certains magistrats envisagent les politiques, encore plus s’ils sont de droite, et par principe s’ils s’appellent Nicolas Sarkozy. Il faudrait Blaise Pascal pour peindre une telle confusion des ordres. Nos cours suprêmes font de la théologie morale ; après que le contribuable a payé la dîme, la gauche de droit divin prêche dans les médias publics ; un ancien garde des Sceaux fait sa grosse voix pour nous rappeler le grand dogme : une décision de justice, même incompréhensible, ne peut pas être critiquée. Celui qui cède à cette tentation met en péril la démocratie : qu’il soit anathème ! Parlons-en de la démocratie ! Le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple, dit la Constitution. Pour nos prédicateurs, le peuple n’est plus qu’un monstre hostile à tenir à distance. C’est lui pourtant qui ploie sous le poids de la dette, vit le supplice de l’enfer normatif, subit les effets dissolvants d’une politique d’immigration suicidaire, supporte, dans sa chair et celle de ses enfants, une délinquance de plus en plus barbare. Il faudrait Albert Camus pour rappeler que l’État de droit, trésor des démocraties libérales, n’est pas le paravent des pulsions despotiques de quelques-uns mais « l’arbitre qui garantit la justice et ajuste l’intérêt général aux libertés particulières ». Il faudrait de la hauteur de vue, de la clairvoyance, du courage - de la démocratie -, sinon, à force d’osciller entre radicalisation et faiblesse, le régime finira par tomber sur lui-même.
par Arno Klarsfeld dans FigaroVox 20 septembre 2025
Une tribune de Arno Klarsfeld à lire dans FigaroVox : https://www.lefigaro.fr/vox/monde/arno-klarsfeld-l-hostilite-des-elites-europeennes-a-l-egard-d-israel-est-une-forme-d-aveuglement-20250915 TRIBUNE - Alors que les chefs de gouvernement européens sont de plus en plus nombreux à élever la voix contre la guerre menée par Israël, l’ancien avocat des Fils et filles des déportés juifs de France rappelle l’enjeu existentiel que représente le conflit au Moyen-Orient pour le petit État juif. Accuser l’État d’Israël de génocide aujourd’hui à Gaza est comparable à l’accusation faite aux Juifs d’empoisonner les puits au XIVe siècle. Beaucoup y croyaient alors et certains y croient aujourd’hui. Quand Emmanuel Macron renvoie aux historiens la responsabilité de déterminer si Israël commet un génocide et qu’il accuse Israël de se comporter de manière barbare, y croit-il ? S’il prend les chiffres du ministère de la Santé du Hamas comme véridiques, c’est-à-dire 60.000 morts dont sans doute près la moitié de combattants du Hamas sur une période de deux ans et sur une population de plus de 2 millions pour Gaza (ou près de 6 millions si l’on inclut la Judée-Samarie ou Cisjordanie), comment croire, alors, qu’Israël commettrait un génocide ? Lors des commémorations du Débarquement durant lequel les Alliés ont bombardé les villes normandes, causant en peu de temps plusieurs dizaines de milliers de morts parmi la population française, le président de la République a-t-il évoqué un génocide ? A-t-il parlé de génocide lors de son discours en 2024 devant la Frauenkirche à Dresde, auquel j’assistais avec mes parents, alors qu’en deux nuits en février 1945 les Alliés ont tué par leurs bombardements des dizaines de milliers de civils allemands ? Et pour Hambourg avec 50.000 morts en un mois de bombardement ? Et pour Tokyo, 100.000 morts en deux nuits ? Hiroshima et Nagasaki ? Contrairement aux Israéliens, les Alliés n’ont jamais cherché à prévenir la population allemande avant les bombardements. Et pourtant, dans le Bureau ovale, le chancelier allemand il y a trois mois remerciait les États-Unis d’avoir libéré l’Allemagne du nazisme. Les Israéliens se battent aujourd’hui pour que la Shoah, qui s’est déroulée avec des complicités dans tous les pays européens, ne se reproduise pas en Israël. Rendons hommage à la population française qui, nourrie de valeurs républicaines et de charité chrétienne, a protesté durant les grandes rafles de l’été 1942 et a permis ainsi aux trois quarts des Juifs de France de survivre. Mais excepté ces Justes, les élites ont été silencieuses ou complices. Et, aujourd’hui encore, au lieu de faire pression sur le Hamas pour libérer les otages et baisser les armes – ce qui arrêterait aussitôt la guerre –, c’est sur Israël que bien des gouvernements européens font pression. Cette hostilité des élites européennes est une forme d’aveuglement, ce sont les fondements de la civilisation occidentale qui sont sapés, l’Europe et Israël ayant le même ennemi inflexible : l’islam radical qui doit être vaincu. Le monde arabe n’a-t-il pas obtenu au bout d’un siècle et demi la disparition des royaumes francs en Palestine ? Évidemment, comme le président de la République le dit, la sécurité d’Israël passe par la paix et une solution étatique pour le peuple palestinien. Il suffit de voir sur la carte ce petit bout de territoire qu’est Israël, plus réduit que la Bretagne, entouré de millions de kilomètres carrés du monde arabe avec des centaines de millions d’habitants (tout aussi intelligents que les Israéliens), avec des richesses incommensurables, et de se remémorer qu’il y a 14 millions de Juifs pour plus de 2 milliards de musulmans pour comprendre qu’Israël a intérêt à la paix. Israël est toujours David. Avec ces données, le président de la République comme de nombreux dirigeants européens pourraient également comprendre que c’est une grande partie de ce monde arabe qui ne veut pas la paix et qui est prête à sacrifier générations après générations pour obtenir ce qu’il désire avec passion : la destruction de l’État d’Israël comme État juif. Le monde arabe n’a-t-il pas obtenu au bout d’un siècle et demi la disparition des royaumes francs en Palestine ? Et c’est avec ce souvenir en tête qu’une partie du Quai d’Orsay et des élites européennes considèrent Israël comme une parenthèse dans l’histoire et que le monde serait moins compliqué si le Moyen-Orient était débarrassé de cet État juif qui « enquiquine tout le monde », selon les mots d’un ancien ambassadeur français. Après tout, en termes de fiction géostratégique, cela peut se comprendre. Mais, au moins, il ne faut pas reprocher à l’État qui est agressé de chercher à se défendre de manière bien moins cruelle que l’Occident lorsqu’il menait ses guerres d’expansion et même de défense. Tous les Juifs de France se demandent si leur avenir sera toujours en France. Quant à la majorité de la population française, elle comprend que si les Juifs sont chassés de France comme ils ont déjà été chassés des banlieues des grandes villes, ce n’est pas en raison d’un antisémitisme chrétien ou de celui de l’extrême droite. Elle comprend qu’elle risque ensuite d’avoir elle aussi à se soumettre ou à s’en aller.
par Henri Guaino 17 septembre 2025
Magnifique tribune d'Henri Guaino à lire dans le JDD : https://www.lejdd.fr/politique/henri-guaino-le-naufrage-des-politiciens-et-lexigence-dun-chef-161718
par Une interview de Sami Biasoni, docteur en philosophie et essayiste 16 septembre 2025
"Dans l’«Encyclopédie des euphémismes contemporains et autres manipulations militantes», le docteur en philosophie et essayiste a réuni 41 intellectuels, dont Chantal Delsol, Pierre Vermeren, Ferghane Azihari ou Christophe de Voogd pour déconstruire cette «novlangue»." Une interview de Sami Biasoni par Alexandre Devecchio dans FigaroVox : https://www.lefigaro.fr/vox/societe/sami-biasoni-le-neoprogressisme-nous-fait-entrer-dans-une-nouvelle-ere-langagiere-20250911 «Antifascisme », « antispécisme », « écriture inclusive », « matrimoine », vous consacrez, avec 41 contributeurs, une encyclopédie aux termes chargés d’idéologie qui inondent nos débats. La langue est-elle devenue un champ de bataille idéologique ? Depuis quand ? Cette bataille sémantico-politique est-elle menée par l’État, les médias, le monde universitaire ? Dans mon précédent essai (Malaise dans la langue française, 2022), également consacré à la question de la langue française, je rappelais que « la langue est non seulement ce qui permet de dire, mais aussi le matériau premier de la pensée construite. Les idéologies, de quelque nature qu’elles soient, sont éprouvées par et dans la langue, mère de toutes les causes politiques ». Les manipulations militantes de la langue que nous analysons dans l’ouvrage s’inscrivent quant à elles dans une histoire plus récente : celle du « politiquement correct », dont on peut dater l’origine au tournant des années 1970. Il s’agit d’un phénomène nouveau car il n’est pas imposé par un régime totalitaire, mais émane surtout de normes culturelles et d’usages institutionnels « démocratiques ». Son vecteur de diffusion a trait à un conformisme moral qui se répand à mesure que nos sociétés se fragmentent. Comme l’a montré George Orwell , n’est-ce pas le propre des régimes totalitaires de vouloir transformer la langue ? Sommes-nous face à une nouvelle novlangue ? Les révolutionnaires de 1789 ont promu le « salut public », terrible antiphrase qui masquait l’horreur des exécutions arbitraires pendant la Terreur ; les bolcheviks ont imposé l’usage d’antinomies simplificatrices et manichéennes (par exemple, camarades contre ennemis du peuple) ; le nazisme avait instauré un système langagier complet qualifié de « langue du IIIe Reich » par Klemperer. Nous avons affaire en Occident à une novlangue soft, ce qui la rend d’autant plus pernicieuse. Toutefois, il ne faut pas négliger les forces militantes à l’œuvre : les x-studies (études de genre, de race, de subalternités, etc.), nées sur les campus américains en même temps que s’est diffusée la pratique du politiquement correct dans les milieux dits progressistes outre-Atlantique, ont proactivement et méthodiquement promu ce que je nomme le « foisonnement (pseudo) conceptuel ». En outre, la pensée de la déconstruction est intrinsèquement narrativiste : elle valorise le récit, la subjectivité et l’hyperbole. C’est pourquoi le néoprogressisme et son avatar radicalisé woke nous ont fait entrer dans une nouvelle ère langagière, celle de la saturation de l’espace par ces euphémismes contemporains et autres manipulations sémantiques qui sont l’objet de notre ouvrage. Il est bien plus aisé de vilipender un mauvais usage du mot « femme » que d’aller défendre physiquement celles que l’on opprime dans certaines de nos villes… Paradoxalement, vous montrez aussi que le politiquement correct langagier, souvent porté par une certaine gauche, est loin de favoriser concrètement le progrès social. Les conquêtes langagières symboliques remplacent les réelles avancées sociales… Cette manipulation du langage est-elle le fruit de l’impuissance du politique et en particulier de la gauche progressiste ? La situation actuelle me paraît résulter de la conjonction de deux phénomènes : d’une part celui que l’on nomme usuellement « paradoxe de Tocqueville », en vertu duquel « quand l’inégalité est la loi commune d’une société, les plus fortes inégalités ne frappent point l’œil ; quand tout est à peu près de niveau, les moindres le blessent » ; autrement dit, à mesure que nous approchons de l’égalité de facto, toute inégalité résiduelle, même infime, nous semble insupportable. D’autre part, il est effectivement probable que l’affaissement du pouvoir politique au sein des démocraties libérales contribue à une survalorisation des causes « symboliques ». Je crois qu’il ne faut pas non plus négliger le confort moral de l’indignation de salon : il est bien plus aisé de vilipender un mauvais usage du mot « femme » que d’aller défendre physiquement celles que l’on opprime dans certaines de nos villes, au Moyen-Orient ou ailleurs. Mais je crois que le sens commun continuera de résister à la rééducation forcée de ceux qui refusent le débat serein, je crois que l’humanisme sincère l’emportera au détriment de l’intolérance de ceux qui préfèrent la forme du discours au discours lui-même. À terme, quelles peuvent être les conséquences en matière d’éducation ? Nos enfants ne sauront-ils plus définir des mots aussi usuels qu’un « homme » et une « femme » ? Posez la question aux militants les plus radicaux : ils ne le peuvent plus ! Certaines définitions qui leur sont imposées relèvent de tautologies dangereuses (une femme est une femme parce qu’elle se sent femme), qui contreviennent à la fois à ce qu’énonce la science (l’existence du fait biologique, sans que soit niée la possibilité de vécus de genre différents de la norme statistique) et à ce que révèle le bon sens. Dans une perspective plus large, il faut comprendre que la langue est tout aussi organique que mécanique : on peut tolérer son évolution – c’est même nécessaire – mais elle ne doit pas être forcée. La brusquer revient à troubler non seulement la pensée des individus, mais aussi leur capacité à constituer un corps social stable. Selon vous, le politiquement correct langagier est également à l’origine de la montée des « populismes », en particulier du trumpisme. Pourquoi ? Ce que vous appelez le « populisme » est-il une réaction démagogique ou simplement une réponse salutaire ? Il s’agit de l’une des causes majeures de la montée des « populismes » dans la mesure où ces derniers prennent essor sur le décalage entre le réel perçu et vécu par les citoyens et la manière dont on décrit le monde. Le trumpisme substitue aux ratiocinations du néoprogressisme une proposition antithétique radicale : celle d’un langage dépouillé, rudimentaire et pragmatique. Or, la simplification outrancière du langage est un autre procédé que les totalitarismes ont toujours encouragé. En matière d’usage de la langue, le pouvoir américain tombe, à mon sens, de Charybde en Scylla. La France, heureusement, résiste. C’est pour cela que nous avons écrit cette Encyclopédie des euphémismes contemporains. Quant au populisme, il est à la fois salut, parce qu’il en revient au sens commun et au souci du corps social dans sa globalité, et un péril, dans la mesure où l’on sait les tentations de contrôle politique démagogique qu’il engendre. Votre livre s’attaque principalement à la novlangue néoprogressiste. Existe-t-il aussi une novlangue de droite ? Par exemple, le mot « woke » est-il employé de manière trop systématique et parfois dans le seul but de discréditer une pensée de gauche ? J’ai relevé près de 300 termes que l’on pourrait qualifier de « manipulations militantes de la langue » : la plupart sont promues par les tenants du néoprogressisme. Il existe bien sûr des néologismes de droite, mais ils sont moins nombreux et fonctionnent différemment. Il s’agit généralement, pour la droite, de résister ou de contre-attaquer. C’est ainsi que des termes comme politiquement correct ou woke ont servi à dénoncer des doléances excessives émanant de la gauche. Parfois, les néologismes issus des rangs de la droite servent à qualifier avec emphase des fantasmes ou des phénomènes émergents indûment présentés comme massifs : les expressions « zone de non-droit », « État profond », « submersion migratoire » sont de cet ordre. S’il est initialement destiné à mettre en lumière les personnes noires victimes de confrontations avec les forces de l’ordre, le terme « woke » se voit rapidement repris et amplifié par d’autres activistes des mouvements identitaristes Le mot woke a une histoire intéressante : il prend racine dans les années 1930 aux États-Unis, sous la forme de l’injonction « stay woke » (littéralement « restez éveillés ») reprise par divers auteurs et artistes noirs victimes du régime de ségrégation raciale prévalant alors. Il reste néanmoins peu usité durant plusieurs décennies, jusqu’à sa reprise par le mouvement Black Lives Matter en 2012. S’il est initialement destiné à mettre en lumière les personnes noires victimes de confrontations avec les forces de l’ordre, le terme se voit rapidement repris et amplifié par d’autres activistes des mouvements identitaristes pour progressivement prendre le sens plus large qu’on lui connaît aujourd’hui. Au gré du temps, comme dans le cas de la locution « politiquement correct », ce mot a servi à désigner les excès et dérives de la radicalité néoprogressiste, c’est pourquoi peu se réclament aujourd’hui ouvertement du wokisme. Il s’agit là d’une des rares victoires sémantiques dont peut se targuer la droite. Toutefois, il convient de constater que cela s’est produit au détriment de la rigueur, voire de l’honnêteté intellectuelle : nombreux sont ceux qui utilisent désormais ce terme pour qualifier des comportements qui n’en relèvent pas. C’est un abus malheureux. C’est pourquoi Sylvie Perez et moi-même consacrons deux entrées à ce mot central au sein de l’Encyclopédie. Aucune manipulation n’est souhaitable, quel que soit le dessein poursuivi.
par Jean-Baptiste Michau, professeur de macroéconomie à l’Ecole polytechnique 14 septembre 2025
Une tribune de Jean-Baptiste Michau, professeur de macroéconomie à l’Ecole polytechnique, dans les Echos à propos de la taxe Zucman https://www.lesechos.fr/idees-debats/cercle/pourquoi-la-taxe-zucman-appauvrirait-la-france-2185537 "L’économiste Gabriel Zucman soutient l’instauration d’une taxe plancher de 2 % sur le patrimoine au-delà de 100 millions d’euros. L’adoption de cette taxe, qui est envisagée pour le budget 2026, serait profondément nuisible pour l’économie française. Un impôt sur la richesse soulève d’abord un problème de valorisation : la base taxable est fluctuante pour les entreprises cotées en Bourse et difficile à établir pour les entreprises non cotées. Il pose ensuite un problème de liquidité pour les propriétaires d’entreprises en croissance ne versant pas encore de dividendes. Cela pose la question de l’exil fiscal, dont l’ampleur est incertaine. D’un côté, les études empiriques suggèrent que le flux de départs serait limité. D’un autre côté, jamais une taxe aussi massive n’a été mise en œuvre. En outre, si les flux sont limités, le stock de Français fortunés installés à l’étranger est déjà substantiel. L’objectif devrait plutôt être de les faire revenir en France. Frein à l’innovation Outre ces effets, la taxation de la richesse poserait un problème de mécanicité à la croissance. Rappelons que la valorisation d’une entreprise est déterminée par les gains futurs escomptés. La taxation de la richesse diminue donc les perspectives de gains futurs en rendant plus difficile le financement des entreprises innovantes. De même, l’action d’une entreprise innovante valant essentiellement par ses perspectives de croissance future, une taxe sur la richesse lui est particulièrement nuisible. La taxe Zucman aurait donc un effet très négatif sur l’innovation et sur la croissance. La taxation de la richesse affaiblirait certainement notre potentiel de croissance à long terme. Une caractéristique des milliardaires est que leur taux d’épargne est particulièrement élevé, avec une consommation souvent négligeable au regard de leurs revenus. Par conséquent, une taxe sur leur richesse consiste pour l’Etat à prélever puis à dépenser des revenus du capital qui auraient sinon été épargnés et réinvestis. Ainsi, cette taxe réduit mécaniquement l’épargne et donc l’investissement. Plus précisément, l’Etat consacre environ 10 % de ses dépenses à l’investissement public et ses dépenses supplémentaires transférées aux Français, qui en consomment une large fraction. Or notamment aux Etats-Unis, l’investissement des entreprises représente environ 80 % des sommes investies, celui de l’Etat environ 20 %. L’investissement public étant en outre moins productif que l’investissement privé, une substitution de ce dernier par le premier réduit le potentiel de croissance. Ainsi, si la taxe Zucman rapportait 16 milliards d’euros par an (0,6 point de produit intérieur brut – PIB – privé), on devrait en conclure que l’investissement privé diminuerait d’autant et que l’investissement public augmenterait au mieux de 0,1 point de produit intérieur brut (PIB) – soit un manque à gagner net de 0,5 point de PIB d’investissement. En finançant l’investissement public par un impôt sur la richesse, on substitue de l’investissement public peu productif à de l’investissement privé productif, et on suscite une dégradation du solde de la balance commerciale. Donc, à PIB inchangé : soit l’investissement diminue de 16 milliards d’euros ; soit ils seraient financés par l’étranger et le déficit commercial se creuse alors de 16 milliards ; soit, plus vraisemblablement, on a une combinaison de ces deux possibilités. Pire : en France, les entreprises innovantes rencontrent souvent des difficultés à se financer. Or, les milliardaires sont précisément les investisseurs les plus à même d’effectuer des placements risqués au service des entreprises en croissance, avec à la clé des rendements élevés. La taxe Zucman entraverait ce vecteur de croissance. Mesure idéologique Bref, en appauvrissant les riches, et en empêchant les grandes fortunes de se constituer, c’est la France qu’on appauvrirait. D’ailleurs, peu après l’instauration de l’impôt sur les grandes fortunes au début des années 1980, les sociétaires ont été conduits à s’expatrier dans des Etats exonérés de l’impôt sur la fortune. La taxe Zucman affaiblirait certainement notre potentiel de croissance à long terme en réduisant l’investissement, en pesant sur l’innovation et en aggravant les déséquilibres extérieurs. En réduisant les recettes fiscales futures, elle pèserait en outre sur le financement des dépenses publiques, dont les principales sont : TVA, impôt sur le revenu, impôt sur les sociétés, etc. Cette taxe s’inscrit donc dans une logique purement idéologique et non pragmatique. En instaurant la taxe Zucman, la France serait probablement le seul pays à se l’imposer à elle-même, puisque d’autres pays refusent d’adopter une telle mesure d’idéologie purement idéologique et sans aucune pertinence économique."
par Alexandre Devecchio dans Le Figaro 14 septembre 2025
Une tribune très instructive d'Alexandre Devecchio dans FigaroVox sur la perception par les Français de notre nouveau Premier Ministre: https://www.lefigaro.fr/vox/politique/alexandre-devecchio-pourquoi-la-majorite-des-francais-n-attendent-rien-de-sebastien-lecornu-20250911 LA BATAILLE DES IDÉES - L’enquête Odoxa-Backbone pour Le Figaro révèle que 69% des Français jugent que le choix du nouveau premier ministre ne correspond pas à leurs attentes. Plus que son manque de notoriété, cela traduit la grande fatigue démocratique des Français. Au suivant ! La valse des locataires de Matignon continue. Moins de vingt-quatre heures après la chute de François Bayrou, l’Élysée a annoncé la nomination de Sébastien Lecornu en tant que nouveau premier ministre. Le troisième en moins d’un an. Le cinquième depuis la réélection d’Emmanuel Macron. Compte tenu du fait que le président de la République a exclu toute dissolution ou démission, le choix d’un homme politique connu pour sa souplesse (il va lui en falloir !) et son humilité (qualité rare en Macronie !) était plutôt judicieux. Mais cela intéresse-t-il encore vraiment les Français ? « La vie politique est une pièce de théâtre totalement décalée se jouant devant une salle vide », observait le politologue Jérôme Fourquet dans Le Figaro après la chute de François Bayrou. Les sondages semblent lui donner raison. Une majorité de Français n’attend rien de Sébastien Lecornu. L’enquête Odoxa-Backbone pour Le Figaro révèle que 69% d’entre eux jugent que ce choix ne correspond pas à leurs attentes. Il est même moins bien accueilli que ses deux derniers prédécesseurs François Bayrou et Michel Barnier. Cela tient moins à son déficit de notoriété ou à ses qualités propres qu’à la grande fatigue démocratique des Français. Celle-ci est accentuée par le contexte politique lié à la dissolution : sans majorité claire et dans une situation budgétaire contrainte, les marges de manœuvre du nouveau locataire de Matignon seront très réduites. "Aucune institution ne peut être vraiment réformée si ses membres n’y consentent pas, à moins de faire table rase par la dictature ou la révolution" Le général de Gaulle à propos du ministère de l’Éducation nationale Mais elle vient de beaucoup plus loin. Depuis des décennies, les majorités politiques et les premiers ministres se succèdent, ce qui n’empêche pas la politique menée de s’inscrire dans une certaine continuité : les impôts augmentent en même temps que l’immigration avec les résultats que l’on connaît ! Sous la Ve République, le vrai pouvoir se situe à l’Élysée, non à Matignon, mais aussi au sein de l’administration. Celle-ci reste inamovible. Loin de se contenter d’exécuter les décisions des gouvernements, elle agit comme un État dans l’État, autonome et guidée par une idéologie progressiste en décalage croissant avec l’opinion publique. «Le désintérêt des Français pour la valse ministérielle actuelle» « Aucune institution ne peut être vraiment réformée si ses membres n’y consentent pas, à moins de faire table rase par la dictature ou la révolution », constatait déjà le général de Gaulle à propos du ministère de l’Éducation nationale. En vérité, aujourd’hui, ce constat s’étend bien au-delà de la Rue de Grenelle. Jusqu’au sein même de l’audiovisuel public, comme l’a montré la récente affaire France Inter. L’État profond, notamment par le biais de la justice administrative et constitutionnelle, décide du destin du pays au mépris de la souveraineté populaire. Le tournant a eu lieu en 1981 avec l’élection de François Mitterrand. À défaut de changer la vie, les socialistes se sont emparés de tous les postes clés de l’État faisant de la bureaucratie non élue l’épine dorsale de leur pouvoir. Quatre décennies plus tard, malgré la marginalisation du PS sur le plan électoral, les socialistes ont conservé leur emprise sur le pouvoir et sont toujours omniprésents à la tête des institutions majeures : du Conseil constitutionnel à la Cour des comptes, en passant par le ministère de l’Éducation nationale et les médias publics. Malgré les périodes d’alternance politique, la droite n’a jamais su ou voulu reconquérir ces institutions, se condamnant à l’impuissance. C’est ce qui explique le désintérêt des Français pour la valse ministérielle actuelle. Lassés que tout change pour que rien ne change, ils ont compris qu’un redressement du pays passerait non par un changement de premier ministre, mais par une reprise en main des commandes de l’administration pour la mettre enfin au service des citoyens.
par Sébastien Laye (Valeurs Actuelles) 13 septembre 2025
"L’attractivité d’un pays, du point de vue des investisseurs, dépend en partie de l’accueil qui y est fait à l’innovation et de la stabilité juridique. À l’heure actuelle, en cette matière, la France va à l’encontre de ses intérêts" https://www.valeursactuelles.com/clubvaleurs/economie/le-principe-de-precaution-est-un-obstacle-a-la-croissance-economique