« L’islamisme est le premier ennemi de la laïcité »
« L’islamisme est le premier ennemi de la laïcité »

Valeurs actuelles
. Les 13 et 16 octobre, nous commémorions les assassinats de Dominique Bernard et Samuel Paty ; 78 incidents
ont été recensés lors des minutes de silence leur rendant
hommage, indique l’Éducation nationale. Comment interprétez-vous ces
chiffres ?
Othman Nasrou.
Nos remontées ont malheureusement conduit à
revoir ces chiffres à la hausse. On parle désormais de 119 incidents,
avec des cas concrets extrêmement révélateurs du climat qui pèse sur
notre pays. Dans un lycée d’Indre-et-Loire, un parent
d’élève a demandé que sa fille n’assiste pas à la minute de silence.
Ce parent a cédé parce que la direction a tenu bon et le moment de recueillement s’est déroulé sans accroc. Théoriquement, il n’y a pas eu d’incident, mais je considère qu’il faut faire preuve de transparence et donc inclure ce type de comportements dans nos rapports. Aucune atteinte à la laïcité ne doit être banalisée. Le “pas de vague”, c’est terminé. On nomme les choses, on les caractérise, on les mesure, on les rend publiques et on les combat.
Alors nommons-les. Quelle est la typologie de ceux qui ont perturbé, voire refusé, ces minutes de silence ?
Nous assistons à des revendications identitaires qui visent à
séparer ceux qui les expriment du reste de la société. La montée du
communautarisme participe directement à ces atteintes à la laïcité et à
la cohésion nationale. C’est une véritable guerre que
nous devons mener en ne laissant passer aucune situation. Le temps joue
contre nous.
Un communautarisme qui est essentiellement islamique ? On parle rarement de communautarisme protestant…
L’islamisme politique est aujourd’hui le premier ennemi de la
laïcité. Cette idéologie progresse partout dans notre société et tout
particulièrement chez les jeunes générations. Certaines données qui nous
reviennent sont saisissantes.
En 2024, 21 % des mis en cause pour association de malfaiteurs à caractère terroriste sont des mineurs radicalisés. C’était 1 % en 2022 ! Une partie de cette jeunesse est aujourd’hui susceptible de rompre avec la République. Notre tâche est immense.
Il existe une responsabilité très lourde d’une partie de la gauche, qui insuffle dans les esprits l’idée que la France serait islamophobe.
Comment sanctionner plus sévèrement ces atteintes ?
En milieu scolaire, je souhaite que chaque signalement caractérisé
d’atteinte à la laïcité et d’agression contre un membre de la communauté
éducative donne lieu à un signalement pénal. Je sais que ma collègue
Anne Genetet y veille. Notre main ne doit pas
trembler et nous devons nous réarmer.
Le Premier ministre a ouvert la voie à l’instauration de courtes peines. Le garde des Sceaux a évoqué des exceptions à l’excuse de minorité. Avec Bruno Retailleau, nous estimons que les atteintes à la laïcité peuvent intégrer ces dispositifs.
Un individu qui aurait commis une atteinte à la laïcité pourrait donc, en théorie, passer quelques semaines en prison ?
Sur les faits les plus graves, c’est en tout cas mon souhait, oui.
Frédéric Péchenard, l’ancien directeur général de la Police nationale,
me parlait souvent en reprenant cette citation : « Ce qui compte, ce n’est pas tant la sévérité de la peine que sa certitude. »
Selon un
sondage Ifop publié en décembre 2023, 78 % des Français musulmans estiment que
« la laïcité telle qu’elle est appliquée aujourd’hui par les pouvoirs publics est discriminatoire envers les musulmans » . La question de la compatibilité entre l’islam et la laïcité doit-elle se poser ?
Je fais une différence nette entre nos concitoyens français de
tradition, de culture et de confession musulmane et ceux qui veulent les
séparer de la République. Je serai intransigeant sur la distinction
entre une religion, l’islam, et une idéologie, l’islamisme,
qui prend aussi une forme politique. Les citoyens musulmans qui
respectent les règles doivent être respectés, les islamistes doivent
être combattus.
Il existe également une responsabilité très lourde d’une partie de la gauche, qui insuffle dans les esprits l’idée que la France serait islamophobe et la laïcité incompatible avec l’islam. Tous ceux qui laissent croire cela le font à dessein pour obtenir un carburant électoral, notamment dans un certain nombre de quartiers. Ce discours vient évidemment donner du crédit aux thèses séparatistes. C’est extrêmement dangereux.
Contrairement à ce qu’affirme Jean-Luc Mélenchon, l’antisémitisme en France est tout sauf « résiduel » .
Jean-Michel Blanquer affirmait qu’une société où les femmes sont
voilées n’était tout simplement pas souhaitable. Qu’en pensez-vous ?
La mixité entre les femmes et les hommes, l’égalité entre les femmes
et les hommes, sont des principes non négociables. Concernant les
tenues vestimentaires, nous devons aller au bout de ce qui est prévu
dans nos textes : préserver les écoles et le service
public des signes religieux et de l’entrisme. Nous avons aussi à faire
appliquer jusqu’au bout la loi de 2010 sur le voile intégral.
Voile, qamis, les tenues vestimentaires sont-elles les signaux faibles du séparatisme ?
À l’école, elles sont pour moi au contraire des signaux forts.
Gabriel Attal a eu raison de prendre une circulaire pour réaffirmer
l’interdiction de l’abaya. Cette interdiction, contestée au départ, avec
plus de 1 000 contestations signalées par les établissements
au moment de son entrée en vigueur, est aujourd’hui entrée dans les
mœurs.
Avec de la volonté politique, il est possible de réaffirmer nos principes. Mais il ne faut pas se tromper de débat : la question du séparatisme n’est pas qu’une simple question vestimentaire. L’école de la République doit inculquer les principes républicains à tous les enfants. Et ce que l’école apprend ne doit pas être déconstruit le soir par des parents ou des “grands frères”. Le rôle des familles est là aussi crucial.
Les actes antisémites sont en hausse de 1 000 % depuis l’attaque du 7 octobre. Qui en sont les responsables ?
La France insoumise a directement ouvert la voie à cette
explosion de l’anti sémitisme. Il faut avoir le courage de le dire.
Ce sont des chiffres qui devraient tous nous alarmer. La haine anti
sémite se répand sur tout le territoire. Sur la dernière année, on parle
de 1 600 actes répertoriés, 95 départements
sont concernés.
Contrairement à ce qu’affirme Jean-Luc Mélenchon, l’antisémitisme en France est tout sauf « résiduel » .
Selon une
étude de la Fondapol, 56 % des Français musulmans estiment que les juifs
« utilisent dans leur propre intérêt leur statut de victimes du génocide nazi » . C’est 29 points de plus que dans le reste de la population…
Personne ne peut aujourd’hui nier le fait que l’islamisme politique,
couplé à la rhétorique de l’extrême gauche, est le premier moteur de
l’anti sémitisme dans notre pays. Ce sont des idées nauséabondes. La
République ne connaît que des Français, égaux
en droits et en devoirs et libres de croire ou non.
Les sénateurs Les Républicains Stéphane Le Rudulier et Roger
Karoutchi ont déposé, le 1er octobre, une proposition de loi visant à
pénaliser l’antisionisme. Qu’en pensez-vous ?
Sous couvert d’antisionisme, certains commentateurs versent
évidemment dans l’antisémitisme le plus total. Des failles demeurent
dans la législation actuelle. Nous signalerons à la justice chaque acte,
chaque déclaration qui franchirait la ligne rouge et
qui ferait de nos compatriotes de confession juive des cibles.
Je vois bien que ceux, à l’extrême gauche, qui font preuve de complaisance vis-à-vis de l’islamisme politique n’hésitent pas en revanche à prendre pour cible les chrétiens.
Quelles différences de mentalité établissez-vous entre l’ancienne génération d’immigrés et la génération actuelle ?
Le moteur de l’intégration est cassé. La France a renoncé à
expliquer qu’elle était le fruit d’une longue histoire, riche et
complexe dont on peut être fier. Elle a préféré marteler que le pays
découlait d’une page blanche. Sous la pression d’une partie
de la gauche, la France a peu à peu fait le choix de la
“désassimilation”.
On a incité ceux qui arrivaient à se réclamer uniquement et exclusivement de leur pays d’origine, car on avait consciemment fait disparaître le socle commun national.
L’immigration est-elle une chance pour la France ?
Les flux non contrôlés ne peuvent pas être une chance. J’ai toujours
pensé que l’immigration devait être choisie, à l’instar de ce que
pratiquent certains pays européens.
Polémique autour de la vraie-fausse parodie de la Cène aux JO,
Complément d’enquête sur l’établissement catholique
Stanislas, flambée d’actes antichrétiens… Assiste-t-on, en France, à une vague de christianophobie ?
Les chrétiens sont aujourd’hui quotidiennement pris pour cible. Il
n’y a pas de raison d’occulter ces actes, qui sont tout aussi
inacceptables que les autres. Je vois bien que ceux, à l’extrême gauche,
qui font preuve de complaisance vis-à-vis de l’islamisme
politique n’hésitent pas en revanche à prendre pour cible les
chrétiens.
Il est temps qu’on retrouve la force de défendre nos principes républicains, de manière universelle, sans outrance mais sans compromission.







