Les péchés capitaux d’Emmanuel Macron
- par Jean-Marie Belin
- •
- 09 déc., 2018
- •

L’orgueil est le premier péché capital d’Emmanuel Macron ; il peut devenir péché mortel…
S’arc-bouter sur une réforme alors qu’il ne s’agit pas de cela, mais simplement d’une taxe, feindre de confondre les deux et ne pas chercher à comprendre, montre à quel degré de raideur intellectuelle est arrivé notre Président de la République après seulement 18 mois de pouvoir… Sa solitude, remplie de courtisans pour la plupart trop jeunes et immatures, l’a conduit à cet isolement fautif. Il ne comprend pas ce qui arrive ; il ne voit pas ce qui monte ; il ne sent pas l’inquiétude et le malaise qui grandissent, il n’entend pas la détresse des plus touchés par la crise. En fait, il ne peut pas, il ne sait pas, et c’est ce constat qui est grave…
Le
premier défaut de son système tient à la falsification démocratique de sa
présidence. Aimé peut-être, mais si mal élu, il croit encore avoir été désiré,
choisi, voulu, alors qu’il n’a été que préféré à Marine Le Pen dans la dernière
étape. Episode précédé de celui, orchestré, de l’élimination, par tous les
moyens, avouables ou non, du seul candidat dangereux pour lui, plébiscité par
la primaire. Elle mérite d’ailleurs qu’on s’y attarde un instant. On a beaucoup
entendu cette expression à propos des manifestations des Gilets Jaunes :
ce sont des gens qu’on n’avait jamais vu auparavant. La petite classe moyenne
et les retraités. Cette réflexion, nous sommes nombreux à nous l’être faite au
soir de la primaire : tous ces participants, en grande majorité, nul ne
les avait vus jusque là. 4 400 000 votants à s’être exprimés et dont
une grande majorité considère encore aujourd’hui avoir été laissée pour compte,
oubliée, ignorée et en tous cas non entendue. Sans que ce soient les mêmes (et
encore…), on a le même phénomène d’exaspération de ceux qui n’ont pas été
entendus. Il faudra sans cesse rappeler au chef de l’Etat qu’on ne gouverne pas
de façon si autoritaire et “jupitérienne“ quand on a été élu au premier tour
par si peu de Français : 18,2% des inscrits, moins d’un Français sur cinq,
et 24% des exprimés. C’est une tare durable.
Ce
premier défaut est aggravé par l’absence d’une majorité réelle, et non
virtuelle. Qui sont ces députés qu’en grande partie personne ou presque ne
connaissait un mois avant leur élection ? Leurs votes ne sont que
l’expression d’un suivisme placide et non d’avis ou de propositions réfléchies
et étayées par le terrain puis argumentées, préparées sous la conduite d’un
parti politique responsable. Il n’y a pas en réalité, hors le Sénat, de corps
législatif réel. Les députés ne portent pas leurs circonscriptions, leurs
départements, leurs régions, ils ne représentent ni les électeurs (pas même les
leurs !) ni les forces vives de leurs territoires, ils ne portent pas à
Paris la parole de leurs mandants, des pauvres, des riches, des entrepreneurs,
des travailleurs, des chômeurs, des retraités. Non, ils sont “à sens unique“,
leur action n’est que descendante. Le Président de la République n’a pas en
fait de majorité à écouter, c’est lui seul qui dit. Et les électeurs ou les
citoyens n’ont pas de députés, ils ont des VRP de Macron.
Le
second défaut est celui de la méconnaissance des attentes ou des priorités des
Français. Ils sont pourtant responsables, bien informés et avertis ; pour
eux, le danger climatique existe, l’écologie n’est pas un gadget,
l’environnement, le leur, est une préoccupation importante. Mais ce n’est pas
aujourd’hui leur priorité absolue ! Le problème pour eux n’est pas d’abord
celui des impôts ou des taxes surnuméraires, mais celui tout simplement de la
peur du lendemain, de l’incertitude et de l‘insécurité des revenus. Ce pouvoir
a réussi, en associant des mots imprévus, fiscalité écologique, à générer de
l’hostilité et du rejet pour la protection de l’environnement. D’une ambition
sympathique, le Gouvernement a réussi à installer durablement la notion
d’écologie punitive, il faut le faire ! Les Français savent qu’il faut
agir, mais ils veulent hiérarchiser les priorités eux-mêmes. Leur priorité,
c’est le maintien du niveau de vie ; or ils ont le sentiment, vrai ou
faux, qu’il ne cesse de baisser et que leur qualité de vie suit le même chemin.
Ce n’est qu’une fois ce souci légitime apaisé ou classé qu’on pourra s’occuper
du reste, à savoir le réchauffement climatique. Ne pas connaitre son lendemain
interdit de s’occuper du surlendemain.
Pourquoi
cette méconnaissance du ressenti des Français ? Parce que le Président est
un Parisien, un homme de la métropole, un urbain et un citadin. Ceux qui crient
aujourd’hui leur colère le sont peu ; ce sont des habitants des
territoires éloignés, des petites ou moyennes villes et de la campagne ;
jamais pris en compte et jamais écoutés ! Quel étrange étonnement chez nos
ministres de découvrir que parmi les interpellés de dimanche près des Champs
Elysées, il y avait des “provinciaux“ ! Justement, monter à Paris, y
crier, y manifester, et même y casser, n’est pas un geste innocent, il est
plein de symboles ! Le rejet de la capitale absorbe le rejet de l’élite
souvent arrogante qui y habite et y décide… Ceux qui président aux destinées de
nos grandes villes et métropoles devraient eux aussi apprendre à se méfier de
ce sentiment qui ne manquera pas de les toucher par ricochet. La France urbaine
n’est pas populaire, et n’est pas prête de l’être…
Le
troisième défaut est celui du langage… Il ne peut pas être compris comme étant
sincère. On ne peut pas dire qu’on a entendu et ne rien faire ou simplement
différer et reporter ; si la première affirmation est juste, la seconde
devient incompréhensible pour le peuple. “Soit tu as entendu et tu agis en
conséquence, un peu ou beaucoup ; soit tu ne bouges pas d’un iota et dans
ce cas, cela montre que tu n’as pas entendu !“ Ce n’est pas l’un sans
l’autre, c’est, justement et pour une fois, en même temps ! Le langage
trahit l’homme et dessert le Président ; le “qu’ils viennent me
chercher !“ n’est pas un langage compréhensible car il ne va pas avec
l’habit. Les Français ont besoin de concordance et de cohérence, même sur ce
plan, sans quoi, il n’y a plus de crédit et la parole est ipso facto dévaluée.
Le
quatrième faute, aussi grave que les autres sans doute, est celle d’une absence
totale de gestion réfléchie de l’image. Sans faire appel à l’Ancien régime, et
à la théorie des deux corps du roi, avec un corps charnel et un corps
symbolique, et qu’incarnait à la perfection le Général de Gaulle, les images
les plus marquantes de Macron dégradent non l’homme qu’il a le droit d’être,
mais la figure du Président qu’il devrait être ! Les exemples deviennent
hélas trop nombreux. Mais le Président devrait savoir qu’il incarne tout le
temps la République et qu’il ne peut en galvauder la représentation.
Cet
orgueil, celui du succès rapide et de l’intelligence supérieure mal guidés,
rend sourd et aveugle. Par chance pour Macron, la Constitution de la Vème
République protège le chef de l’Etat. Mais quand à ce péché grave s’ajoutent
autant de défauts ou de fautes, pourtant faciles à corriger ou à éliminer,
c’est la paralysie qui guette et qui menace. Par sa seule erreur, il perd
chaque jour un peu plus de crédibilité. En France, mais aussi à l’extérieur et
notamment parmi nos partenaires européens qui ne supportent plus depuis
longtemps ses leçons et son arrogance. Or, notre pays ne peut pas se le
permettre tant sa situation économique, financière et internationale est
mauvaise.
S’il
ne faut pas bousculer les échéances, il faut en tirer les leçons et changer de
cap ; gérer, dans un premier temps, pour remettre le pays debout, innover
et avancer ensuite sans oublier personne sur le bord de la route. Expliquer aux
Français les vertus de la liberté et du travail, la nécessaire réforme de l’Etat,
le retour aux vraies valeurs, dont l’estime de soi et le partage, avec le souci
de rendre l’impôt à nouveau supportable et admis parce que compris. Trop de
taxes et d’impôts tuent les taxes et les impôts, d’autant plus radicalement
qu’ils ne sont pas clairement délimités et affectés là où ils doivent
l’être ; la fiscalité écologique qui sert à combler la dette, les Français
n’en ont pas été dupes un seul instant. C’est ce type de tromperie, où on les
prend pour des ignorants/payants, qu’ils rejettent. Il faut donc changer de
méthode et même les paramètres. Plus que des partis traditionnels et paralysés,
qu’il ne faut pas écarter, c’est d’hommes et de femmes neufs, d’entrepreneurs
et de créateurs, c’est de la société civile, de mouvements ou de nouveaux partis
comme Objectif France, que doit venir la réponse. Le Président de la République
s’est de lui-même disqualifié, pendant un moment encore, pour montrer le
chemin ; c’est donc à eux de prendre le relais et de le faire ! Que
voilà un joli mot, un beau verbe puissant, qu’il convient de remettre en avant
après l’avoir mis à neuf, et replacé entre de bonnes mains !
Jean-Marie
BELIN
4 décembre 2018.

TRIBUNE - La façon caricaturale dont est présenté le libéralisme dans le débat public est la preuve d’un manque criant de culture sur cette école de pensée, son exercice pratique, mais aussi sur ses acteurs et leurs origines, regrettent la docteur en sciences et l’essayiste*.
* Aurélie Jean a récemment publié « Le code a changé. Amour et sexualité au temps des algorithmes » ( L’Observatoire, 2024). Erwan Le Noan est l’auteur de L’Obsession égalitaire. « Comment la lutte contre les inégalités produit l’injustice » (Presses de la Cité, 2023).
Admettons-le, en France le libéralisme n’a pas bonne presse. Il est réduit à une conflictualité sociale, à un chaos économique, à une vilenie humaine dont il faudrait se méfier et s’éloigner. Dans un contresens alimenté par quelques esprits acerbes ou ignorants, l’imaginaire collectif l’associe à des figures autoritaires, à des héros immoraux ou à des épisodes brutaux. Le débat politique le présente comme une idéologie, à la fois dominante et sans cesse vacillante, structurée mais incertaine. La caricature le décrit sous les traits de privilégiés avides, soucieux de leur égoïsme. Tout cela est faux et démontre un manque de culture populaire sur cette école de pensée et son exercice pratique, sur ses acteurs et sur leurs origines. Car, contre l’idée reçue, on ne naît pas libéral, on le devient !
Être libéral, c’est se demander sans cesse comment, en toutes circonstances, rendre chaque individu plus libre de choisir sa vie, en respectant celle des autres. Être libéral, c’est être convaincu que la meilleure voie pour y parvenir est l’autonomie (non l’indépendance) individuelle et l’échange, qui fait croître la richesse et le savoir - et la cohésion sociale par l’entraide. Être libéral, c’est se rappeler que la liberté est fragile et que la défendre est un combat continuellement renouvelé, qui n’accepte pas de solution unique et implique un questionnement permanent.
Le libéralisme ne propose ainsi qu’un guide de lecture, une référence dans toute réflexion : en revenir systématiquement au choix libre et responsable de l’individu, pour que chacun puisse déterminer par soi-même la voie de sa propre conception d’une vie réussie. C’est un goût pour le doute qui impose la modération et le changement en réponse aux déséquilibres sociaux, économiques et culturels. Le libéral assume de se tromper et corrige sa pensée.
Aussi, le libéralisme ne s’hérite pas, il s’acquiert. Les plus convaincus des libéraux et les plus convaincants sont certainement ceux qui, venant de tout horizon social et économique, ont fait un cheminement intellectuel propre à leurs expériences.
Sa quête est celle de la créativité. Être libéral, c’est reconnaître à chacun sa part de talent et d’inventivité – et donc sa légitimité à participer à l’enrichissement intellectuel ou matériel du monde.Le libéral est, très tôt, revêche à toute forme d’autorité qui ne se légitime pas ou qui vient limiter l’épanouissement de l’individu. Il aime, chez Camus, l’aspiration à la révolte philosophique. Il remet sans cesse en question les affirmations. Cet esprit de fronde naît parfois dès l’école, comme chez Stefan Zweig.
Cette indocilité du libéral est une inquiétude, qui le conduit à se méfier de tout pouvoir, surtout démesuré, surtout s’il n’accepte pas la contestation : le libéral est fébrile devant les réflexes courtisans de ceux qui s’aplatissent complaisamment devant le renforcement continu de la puissance publique et son contrôle de nos vies. Il se retrouve dans Tocqueville ou Montesquieu. Il ne peut oublier que, au XXe siècle, c’est l’État, pas l’entreprise, qui a été l’instrument privilégié des pires abominations de l’histoire : le fascisme, le communisme, le nazisme. Le secteur privé n’est pas parfait, mais lui est soumis à la contradiction permanente de la concurrence.
Défier les vérités imposées
La révolte libérale est, plus encore, celle de tous ceux qui, au nom de la dignité de l’individu, ont résisté par les mots ou par les armes, aux totalitarismes : Arendt, Aron, Havel, Voltaire… Un libéral cherche à défendre la liberté des autres, même celle de ses contradicteurs ou celle dont il ne bénéficie pas.
On devient libéral en doutant des choix subis, en défiant les vérités imposées : tous les individus étant égaux, personne n’a le droit de choisir votre vie à votre place sans votre consentement explicite. Le libéral se retrouve dans les combats de Simone Veil pour les femmes. Il est ouvert à une réflexion honnête sur les évolutions de la société : la liberté individuelle sera-t-elle confortée ou amoindrie si la société admet la GPA ou une loi sur la fin de vie ?
Le libéral ne saurait dès lors être conservateur et encore moins réactionnaire, car il refuse les états de fait, il conteste les vérités imposées, il renie les réflexes qui obstruent la pensée. Il s’inquiète, il s’interroge, il doute jusqu’à se forger une conviction intime, conscient qu’elle n’est pas nécessairement partagée.
Le libéral n’est pas non plus un révolutionnaire, car, convaincu de l’égalité entre les individus, il privilégie le droit et la délibération. Il croit à la dignité de chacun et à la légitimité de toutes les paroles. Il se défie de « l’homme providentiel ». Il est démocrate.
Dépasser nos propre limites
Le libéral est dans un questionnement régulier, même en contradiction avec les siens. Avec Germaine de Staël, il s’inquiète des passions - et des populistes qui prétendent clore le débat. Il a appris à dompter les élans emportés de la colère, il plaide pour maîtriser la violence, même légitime. Il refuse tout ce qui attache les individus à une caste et rejette les assignations. Avec Vargas Llosa, il repousse l’obligation d’appartenir à une « tribu » et ne reconnaît que les allégeances choisies.
Sa quête est celle de la créativité. Être libéral, c’est reconnaître à chacun sa part de talent et d’inventivité - et donc sa légitimité à participer à l’enrichissement intellectuel ou matériel du monde.
La quête libérale se réalise souvent dans l’entrepreneuriat, c’est-à-dire dans la recherche du dépassement de nos propres limites, de notre propre finitude, en prenant le risque de créer ce vers quoi ou ceux vers qui conduisent nos aspirations. Est libéral celui qui cherche à créer sa voie. En ce sens, il favorise le marché, car il y voit le meilleur instrument de coordination volontaire de milliards de volontés divergentes.
Certains deviennent enfin libéraux par émotion. Par une répulsion instinctive de l’oppression, de l’injustice, de l’écrasement. Par une bouffée charnelle de liberté. Par une volonté irréductible et indomptable de tromper le sort. Par la découverte d’une force intérieure ou d’une espérance inextinguible. On ne naît pas libéral. On le devient.


Nouveau grand succès pour la conférence de Lignes Droites du 3 avril !
Tous nos remerciements à Monsieur Patrice Michel pour son exposé très pédagogique sur le système judiciaire français, ses liens avec les instances européennes, son histoire, et son organisation au sein des différentes justices administratives, civiles et pénales.
Tous les participants (environ 75 personnes) ont particulièrement apprécié la clarté de cet exposé et quelques idées pour améliorer son efficacité. Deux rappels essentiels ont été fait :
- notre système judiciaire est là pour faire respecter la loi et bon nombre des reproches qui lui sont fait viennent en fait du politique.
- la neutralité de la justice française a été largement entamée par certains individus, en particulier issus du syndicat de la magistrature. Ce devrait être au Conseil Supérieur de la Magistrature de garantir cette neutralité politique. Mais sans doute par corporatisme et lâcheté, il n'intervient pas assez, même face à des situations extrêmes comme celle du "mur des cons". Là encore ce devrait être au politique d'avoir le courage de mener à bien les réformes nécessaires pour s'assurer du bon fonctionnement du Conseil de la Magistrature.

Aujourd’hui, la France traverse un moment décisif. Dans une décision qui ne laisse aucun doute, Marine Le Pen se voit infliger une peine d’inéligibilité, à seulement deux ans des présidentielles. Ce verdict dépasse largement le simple domaine juridique pour s’inscrire dans un affrontement politique direct.
La magistrate Bénédicte de Perthuis affirme s’inspirer d’Eva Joly pour son parcours judiciaire et son engagement en tant que magistrate. Elle l’a d’ailleurs déclaré sans ambiguïté : « Eva Joly a changé mon destin. » lors d’un podcast en 2020. Une phrase forte, qui traduit bien plus qu’une simple admiration professionnelle. On y perçoit une affection profonde pour une figure dont les opinions, notamment sur la justice, sont tranchées et assumées.
Mais Eva Joly, au-delà de son parcours de magistrate, reste aussi un personnage politique clivant, dont l’engagement écologiste et les prises de position marquées ne laissent personne indifférent. L’apprécier, c’est souvent adhérer aussi, d’une certaine manière, à une certaine vision du monde et des combats idéologiques. Dès lors, difficile d’ignorer que cette inspiration, aussi sincère soit-elle, puisse laisser planer un doute sur une possible proximité idéologique.
Dans ce contexte, le Syndicat de la magistrature, connu pour ses positions marquées à gauche et ayant publiquement appelé à voter contre l’extrême droite le 12 juin 2024 ajoute une dimension particulière à cette affaire. Cette prise de position contribue à brouiller la frontière entre engagement idéologique et impartialité judiciaire.
Dès lors, difficile de ne pas voir dans cette condamnation un verdict dont l’écho dépasse le cadre strictement juridique pour résonner sur le terrain politique, au moment même où se prépare une échéance électorale majeure.
Encore plus inquiétant, l’identité des deux assesseurs qui ont participé au verdict reste inconnue, un manque de transparence qui renforce le sentiment d’un coup d’État judiciaire. Ce flou soulève des questions cruciales sur l’impartialité et l’indépendance de notre système judiciaire, surtout à l’approche d’un scrutin historique.
Ce moment demeure un symbole fort : la justice, qui devrait être la gardienne impartiale de nos lois, se retrouve aujourd’hui au centre d’interrogations profondes. Si la magistrate ne revendique pas ouvertement d’engagement politique, son admiration pour une figure aussi marquée qu’Eva Joly, ainsi que le contexte entourant cette décision, peuvent laisser penser que son jugement pourrait être influencé par une certaine orientation idéologique. Cela envoie un message clair à l’ensemble du paysage politique français et soulève inévitablement des questions sur la frontière, de plus en plus ténue, entre justice et politique.
Face à cette situation inédite, la nécessité de transparence s’impose, et il est essentiel que les interrogations sur l’indépendance de la justice soient pleinement abordées. Ce moment marque un tournant dans la vie politique française et pose une question fondamentale : la justice peut-elle encore être perçue comme une institution neutre, ou court-elle le risque d’être influencée par des dynamiques idéologiques qui dépassent son cadre strictement juridique ?
Comme l’ont souligné plusieurs responsables politiques, dans un moment aussi décisif, même si une condamnation doit être prononcée, le fait de rendre Marine Le Pen inéligible à seulement deux ans des présidentielles soulève des doutes légitimes sur la volonté politique et idéologique de l’empêcher d’accéder au pouvoir. Selon des estimations récentes de l’IFOP, Marine Le Pen aurait eu la possibilité d’obtenir entre 34 et 38% des voix au premier tour des présidentielles de 2027, selon plusieurs sondages récents. Cette décision semble dépasser le simple cadre juridique. Ce choix, dans un contexte aussi crucial, appartient au peuple et non à une juridiction.
Il en va de la confiance des 11 millions d’électeurs qui, sans pouvoir débattre, parlementer ou exercer leur droit démocratique, se voient privés de la possibilité de voter pour la représentante politique qui, selon les projections, aurait toutes les chances de jouer un rôle clé dans la politique de 2027. Cette décision semble porter une forme de nonchalance envers ces électeurs, en les privant de la possibilité d’exprimer leur voix de manière libre et démocratique. Ce n’est pas simplement une question de légalité, mais une tentative potentielle de déstabiliser le Rassemblement National, d’affaiblir ses capacités à se renforcer et à atteindre, d’ici 2027, une représentativité de 37% des suffrages, au moment où le débat politique pourrait être radicalement transformé par leur ascension.
NDLR : Merci à Maxime Duclos pour ses billets d'humeur toujours très intéressant. On pourrait ajouter queBénédicte de Perthuis n'avait pourtant pas une réputation de sévérité
particulière puisque c’est elle qui avait prononcé la relaxe du ministre
Olivier Dussopt, jugé pour favoritisme (et finalement condamné
en appel !). Deux poids et deux mesures ?

Par la voix d'Eric Lombard, le ministre de l’économie, Bpifrance annonçait la semaine dernière vouloir collecter 450 millions d’euros auprès des Français pour les entreprises de défense, et la création à cette fin d’un fonds baptisé « Bpifrance Défense », réservé aux particuliers et destiné à la défense et à la cybersécurité.
Voyons le côté positif des choses : les Français vont peut-être enfin découvrir ce qu'est le private equity et ses bienfaits ! Sur la période 2013/2023, les rendements du private equity français ont été de l'ordre de 13% brut. Quelqu'un qui aurait investi 500 € en France dans cette classe d'actifs aurait aujourd'hui un capital net de frais d'environ 1000 €. Sur le papier, cet investissement a donc tout pour plaire avec des entreprises qui existent déjà et qui sont souvent bien implantées, un marché a priori florissant dans les années à venir et a priori une montagne de commandes à venir. Mais comme cela est répété pour toute publicité pour un placement financier : " Les performances passées ne préjugent pas des performances futures ". Car dans ce cas de figure en particulier, il y a des hics et pas des moindres ... Le problème essentiel n'est pas l'investissement ! Il y a énormément d'épargne et de trésorerie sur le marché actuellement. Le problème essentiel c'est qu'il faut des commandes sur le long terme. Or ces commandes publiques annoncées par les pays européens seront-elles encore là dans cinq ans ?
Il faut souligner plusieurs aspects sur le risque qui porte sur ces commandes publiques en particulier pour la France :
1. Chaque pays européen va investir en fonction de deux logiques :
- diplomatique : certains continueront à acheter du matériel américain quoi qu'il arrive
- industrielle : les commandes seront soumises à des impératifs nationaux pour soutenir l’industrie locale.
On peut donc toujours mettre en avant les investissements prévus pour l'ensemble de l'Europe, l'essentiel des retombées pour l'industrie française seront essentiellement issues de la politique nationale et pas seulement européenne ...
2. Quelle confiance peut-on avoir dans les annonces d'aujourd'hui ? L'Europe a toujours été une vraie girouette sur les sujets relatifs à la défense européenne, à la fois en termes de stratégie et d'investissement.
Encore aujourd'hui, un label ESG dans ce domaine est, de fait, quasi impossible (aux côtés de l’alcool, du tabac et des jeux d’argent ...).
Même la France qui a pourtant fait partie des bons élèves en termes d'investissement dans le domaine de la défense n'a pas toujours fait preuve d'une réelle constance (en particulier sous Hollande).
Au lendemain d'un inéluctable traité de paix signé entre l'Ukraine et la Russie dans l'année à venir, ou après un hypothétique effondrement du régime russe dont ils rêvent tous, l'hystérie collective de nos dirigeants européens sera-t-elle encore d'actualité ?
3. Acheter des chars est un investissement qui trouvera toujours des détracteurs acharnés dans notre société. Bien malin est celui capable aujourd'hui de nous dire qui sera au pouvoir en France en 2030 à l'échéance de ce fond d'investissement.
4. Comment la France compte tenu de son endettement pourra-t-elle financer ces investissements ? Compte tenu de notre niveau d'endettement, il faudra soit augmenter la fiscalité (mais nous sommes déjà champion du monde ce qui plombe nos entreprises), soit trouver des arbitrages au détriment d'autres dépenses ... Mais quels sont les arbitrages que les français accepteront : la justice ? l'éducation ? La santé ? Je ne vous parle même pas des retraites ! Certains sondages montrent qu'une majorité de Français (et j'en fais partie) est favorable aujourd'hui à cette politique de réarmement ... Mais dès que le même sondage pose des questions sur les moyens de financer cette politique, d'ores et déjà, cette majorité s'effondre. Qu'en sera t'il dans deux ou trois ans ?
La France fait déjà aujourd'hui face à un mur de la dette absolument vertigineux ( la question n'est pas son existence mais la distance à laquelle il se trouve et le temps qu'il nous reste avant qu'on se le prenne en pleine figure) et une incapacité depuis 50 ans à apporter la moindre réforme à son modèle social. Comment peut on considérer sérieusement les annonces d'augmentation du budget français de la défense de plusieurs dizaines de milliards d'euros ?
Bref, ce type de financement peut éventuellement être une poule aux œufs d'or. Il présente aussi des risques intrinsèques majeurs ! Et il faudra regarder en détail l'offre qui sera faite et analyser de manière très prudente les engagements sur les commandes à venir. Mais il est fort à craindre que dans la précipitation, nous soyons en train de mettre la charrue avant les bœufs pour participer au développement de nos entreprises !